DD reconduit. Après 10 jours de suspense, le nouveau premier ministre François Bayrou annonce ce lundi 23 décembre son gouvernement et le maintien d’Annie Genevard au ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire (la Forêt étant retirée de l’intitulé*). Nommée le 21 septembre dernier dans l’éphémère gouvernement de Michel Barnier, la députée du Doubs peu experte des sujets agricoles a dû apprendre au pas de course face à la résurgence des tensions dans les campagnes. Les demandes de juste rémunération (notamment avec Egalim 4 et les Organisations de Producteurs), de simplification administrative (malgré de premières avancées) et d’aides fiscales multiples (sur le GNR, l’emploi saisonnier, la transmission familiale des vignobles…) portées depuis ce début d’année 2024 n’ayant pas trouvé de traductions concrètes faute de transcription parlementaire (entre dissolution de l’Assemblée Nationale le 9 juin et motion de censure le 4 décembre).
En trois mois (dont un d'expédition d'affaires courantes), Annie Genevard aura marqué son attention aux problématiques viticoles, avec l’accueil 10 jours après sa nomination des représentants de la filière vin pour recevoir leur plan stratégique, sa participation à la réunion interministérielle des 100 ans de l’Organisation Internationale de la Vigne et du Vin (OIV), des visites dans les vignobles du Midi touchés par la sécheresse (en octobre dans le Roussillon et en novembre dans l’Aude), la mise en œuvre dans les temps de l’arrachage définitif à 4 000 €/ha et l’annonce de soutiens bancaires. Cette dernière mesure se concrétisant actuellement, avec la signature récente de protocoles d’engagement pour les prêts à taux bonifiés de court terme avec un taux d’intérêt maximum de 1,75 % sur deux ans (plafonné à 50 000 €) pour les agriculteurs ayant perdu plus de 20 % de leur chiffre d’affaires en 2024, tandis que le prêt pour reconsolidation de la dette à long-terme (jusqu’à 12 ans) avec un plafond à 200 000 € et une garantie à 70 % par la Banque Publique d’Investissement (Bpifrance) est en finalisation. Avec la maintien d’Annie Genevard, la filière vin peut espérer que ces mesures annoncées pourront être suivies efficacement afin de se concrétiser rapidement, sans avoir à recommencer tout le processus d’explications et de négociations pour répondre aux urgences économiques des entreprises vitivinicoles.
Longue liste de demandes
Se cumulant, les crises climatiques, économiques, géopolitiques et sociologiques font flamber les coûts de production de la filière vin alors que les rendements chutent et que la commercialisation s’effondre avec des prix de vente non rémunérateurs. Ce qui se traduit dans la chute de rentabilité généralisée du vignoble, une augmentation significative des défaillances et une banalisation des procédures collectives. L’état d’urgence étant déjà dépassé, la filière vin continue de répéter sa liste de mesures nécessaires pour se relancer. Sont demandées par la filière la concrétisation de l’arrachage temporaire (ou d’un système s’en rapprochant), l’obtention des 40 millions € de solde pour l’aide à l’arrachage définitif, le déploiement rapide des dispositifs de prêts à court-terme et de restructuration de l’endettement bancaire, la mise en place d’un nouveau fonds d’urgence viticole face aux aléas climatiques de la très petite récolte 2024, une aide à la restructuration des caves coopératives, le soutien face aux tensions géopolitiques (taxes chinoises sur le Cognac ou nouveaux droits de douanes promis par le président américain Donald Trump), un soutien à l'export pour le développement commercial dans le monde entier…
En somme, il est demandé à la ministre de poursuivre sur sa lancée : après l’écoute et les diagnostics, l’action et les remèdes de choc. « Il ne faudra pas s’en tenir à l’arrachage, qui est tout de même une forme d’échec, mais penser l’avenir » déclarait en octobre Annie Genevard, soulignant que « bien que la situation soit vraiment préoccupante pour la filière, la grande majorité des vignerons ne se résigne pas pour autant. Heureusement, puisque leur passion de la vigne et du vin contribue à notre économie à hauteur de 92 milliards d’euros. »
4 gouvernements en 1 an
Après « quatre gouvernements successifs qui ont pris des engagements forts auprès du monde agricole », les syndicats Jeunes Agriculteurs et FNSEA indiquent dans un communiqué que « dans cette période de forte instabilité, la reconduction d’Annie Genevard au poste de ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire doit permettre d’assurer une continuité sur les dossiers agricoles ». Pour le syndicat agricole majoritaire, « ce nouveau mandat doit marquer une accélération de la concrétisation des engagements et des mesures tant attendus par les agriculteurs français » avec « l’examen d’ici le printemps 2025 d’un projet de loi ambitieux sur le revenu agricole, visant à apporter des adaptations nécessaires aux lois Egalim » alors que la « ministre Genevard s’y était engagée, aujourd’hui, son nouveau mandat lui offre une opportunité de concrétiser son engagement. »
* : Agnès Pannier-Runacher devient la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.