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Vendange de cessations de paiement à Bordeaux
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Urgence économique
Vendange de cessations de paiement à Bordeaux

C’est une augmentation dont le vignoble bordelais se serait bien passé : l’explosion des procédures collectives devant les tribunaux. Un signal inquiétant sur un mur de dette pouvant s’effondrer en abîmes de liquidations judiciaires.
Par Alexandre Abellan Le 16 octobre 2024
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Vendange de cessations de paiement à Bordeaux
La déconsommation de vins rouges se transforme en décapitalisation des vignobles bordelais. - crédit photo : Alexandre Abellan
C

’est un constat qui alerte : sur le seul premier semestre 2024 pour les exploitations viticoles, le tribunal judiciaire de Bordeaux a autant ouvert de procédures collectives que sur toute l’année 2023. Un doublement qui reste limité en nombres absolus, mais témoigne d’une fragilisation extrême du premier département viticole de France, avec des domaines passés en procédure à l’amiables alors qu’elles sont déjà à la limite de la cessation de paiement. Dans sa dernière étude sur les défaillances au troisième trimestre 2024, le groupe Altares note qu’elles augmentent de 81 % pour la viticulture par rapport à juin-septembre 2023*, ces 38 défaillances se concentrant à plus de 80 % en Gironde.

Relevant « la "faiblesse" des volumes » concernés sur « un seul trimestre  », Thierry Millon, le directeur des études Altares préfère « lire l’évolution des défaillances d’entreprises viticole (culture de la vigne) en données annualisées (calcul 12 mois glissées chaque fin de trimestre) » ce qui donne un graphique (ci-dessous) montrant que « jusqu’en fin 2022 la sinistralité viticole de Nouvelle aquitaine (à plus de 80 % girondine) est contenue autour d’une moyenne de 34 défaillances sur 12 mois, mais qu’à partir de début 2023 le rythme accélère pour, en moyenne, plus que doubler (74 contre 34). De plus on observe que la Nouvelle-Aquitaine est de plus en plus représentée dans la sinistralité viticole française (de 31 % en 2018-2020 à 41 % sur 2020-2023). Quand la Gironde faiblit, c’est la viticulture qui trinque. »

Graphique par Altares.

Sachant que les tribunaux sont fermés en août, la tendance pourrait encore être sous-évaluée pour l'été 2024 qui a vu s'accélérer les difficultés de trésoreries. Dans le champ de bataille que devient l'économie viticole bordelaise, les avocats spécialisés sont aux premières loges comme médecins urgentistes cherchant à sauver ce qui peut l'être. « Hormis les tribunaux judiciaires, très sollicités, je me demande si les pouvoirs publics ont vraiment conscience de ce qui se passe dans les campagnes » glisse maître Alexandre Bienvenu, avocat spécialisé en droit rural, qui pointe que « les primes à l’arrachage dans l’immédiat ne suffisent pas (on verra dans quelques mois si cela contribue vraiment à rééquilibrer l’offre et la demande), les trésoreries sont exsangues et les charges liées à la campagne 2024 ont encore explosé ».

Entre des ventes à l’arrêt, de trop faibles prix d’achat, des coûts de production élevés des millésimes 2023 et 2024, l’impossibilité de diversifier ou restructurer l’activité faute d’actifs, « il n’y a pas forcément de choses nouvelles par rapport à ces derniers mois » analyse Antony Cararon, responsable du service conseil de Cerfrance Gironde, pour l’expert, « c’est la durée de la crise qui fait que les trésoreries ne tiennent plus. La crise ne faiblit pas en particulier pour les vracqueurs dont le marché reste bloqué. Les structures rentrant en procédures collectives sont souvent passées avant par les procédures à l’amiable et n’ont plus d’alternative. »

C'est difficile pour tous

Avec cette crise s’enlisant nettement depuis 2018, plus personne ne semble épargné : le cœur des difficultés dans l’Entre-deux-Mers et les Côtes s’étend au Médoc et dans le Libournais. Pour Antony Cararon, « toutes les appellations rouges sont touchées, quelle que soit l’AOP derrière. Ceux qui produisent des vins blancs et du crémant sont plus résilients, mais le problème est qu’ils ne font jamais de volumes importants. Ceux qui s’en sortent le mieux ont des circuits de commercialisation bien développés sur la totalité de leurs productions : ce qui ne concerne pas énormément de ces structures. C’est difficile pour tous. »

Alors que la Confédération Paysanne de Gironde parle de cessation des paiements objective dans le vignoble, Antony Cararon précise « qu’il est possible de devoir aujourd’hui la totalité des phytos de 2024, voire une partie de ceux de 2023, sans être en situation de cessation de paiement grâce à des accords d’échelonnement avec ses créanciers. Dans la pratique, l’appréciation auprès du tribunal judiciaire est assez tolérante. » De quoi permettre de gagner du temps en réduisant la voilure, par l’arrachage et l'arrêt de fermages, mais pas de quoi permettre de se projeter vers d’autres productions. « Le sujet de la diversification est rarement présent pour ces entreprises » poursuit l’expert, notant que « les gens ne l’écartent pas, mais rencontrent des difficultés à se projeter, la priorité étant de traiter les sujets du court terme. Par ailleurs un projet de diversification soulève des questions autour des compétences à développer, de besoins de financement… Il s’agit de projets qui demandent du temps dans leur mise en œuvre. » Alors que les liquidations de domaines viticoles se banalisent, et scandalisent par la vente aux enchères à prix bradés de vin en vrac et en bouteilles.

 

* : Les derniers indicateurs trimestriels du Conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires (CNAJMJ) recensent 32 défaillances dans le vignoble de juin à septembre 2024, en hausse de 100 % par rapport au troisième trimestre 2023.

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Tous les commentaires (7)
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augustin Le 24 octobre 2024 à 10:21:06
Prétendre que les engagements bancaires restent présents comme le relate le pseudonyme (très manipulateur) de Rémi relève de la fake news. Tous je dis bien tous les administrateurs judiciaires et mandataires liquidateurs dénoncent la non assistance à viticulteur en danger venant des banques. Et la fameuse réduction de l offre pour faciliter la demande sent bon la capitulation de 1940 :les vins concurrents déférlent en gd comme en chr prenant rapidement des parts de marché qu il nous sera difficile de reconquérir ! Pourquoi l Interprofession ne met elle pas la pression sur Bercy pour intervenir au niveau bancaire et à quoi rime cette campagne d arrachage à deux balles, pardon 4 k qui ne résout rien.
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J.Henry DAVENCE Le 18 octobre 2024 à 07:36:12
La situation est sans doute dramatique à Bordeaux du fait de la rapidité (5 ans) de la dégradation de la situation économique. Dans le Muscadet ou le Beaujolais , pour ne citer qu'eux, les conséquences ont été les mêmes mais diluées sur 20 ans et sans aide massive de l'europe ... On ne parle pas ou peu de Cognac mais la situation risque de suivre la même courbe avec des entreprises qui ont investi pour s'agrandir et qui voient leurs principaux marchés se fermer! Dans ces 2 cas, faire l'autruche depuis 15 ans pour Bordeaux et s'enflammer pour Cognac, les échecs des politiques initiées par dirigeants professionnels et suivis par l'état français sont avérées. Commencer par le connaitre permettrait sans doute d'initier de vraies nouvelles politiques.
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Remi Le 17 octobre 2024 à 18:21:34
Augustin, La solution ne viendra pas des banques, certaines vont d'ailleurs au delà de ce qu'elles devraient d'ailleurs ! La problématique vient du marché, de l'offre supérieur me à la demande. C'est simple : soit on arrive à faire progresser la demande, soit on réduit l'offre. C'est la 2nde solution que l'interprofession met en œuvre avec les fonds européens en arrachant les vignes et en distillant les stocks... Mais qui fait bcp de mal aux viticulteurs, premières victimes de cette situation !
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augustin Le 17 octobre 2024 à 15:12:29
Attention aux divers diaphoirus y compris associatifs encore capables de parler imprprement de "faillite" lorsque le terme exact est liquidation... Parlons a des avocats, pas des amateurs bénévoles fussent ils bien intentionnés ! La liquidation est un sujet grave, affaire de spécialistes !
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Michel Baucé Le 16 octobre 2024 à 17:19:21
Vigneron et vice-président de Solidarité Paysans Aquitaine, je vous confirme que la situation girondine est plus que préoccupante. Bénévole dans cette association depuis environ 10 ans, nous avions, par le passé, des appels de vignerons fragiles et fragilisés par un évènement climatique, familial ou économique. Depuis 2023, des entreprises qui pouvaient être citées en exemple il y a cinq ans, sont aujourd'hui au bord de la faillite! Même des domaines dans des appellations prestigieuses connaissent de grosses difficultés. Les membres de notre association qui je le rappelle, aide les paysans dans la difficulté et cela gratuitement, afin qu'ils retrouvent leur dignité et puissent être aider face aux procédures collectives souvent complexes, sont très inquiets et craignent que cette détresse de grande ampleur ait des conséquences désastreuses. Je profite de ce message pour faire un appel aux potentiels bénévoles. Nous vous accueillerons chaleureusement, et vous formerons si nécessaire, alors acteurs du monde agricole, on compte sur vous.
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augustin Le 16 octobre 2024 à 17:16:18
Àltarés fait le job et c est tant mieux. Ce que ne dit pas l étude c est le détail des périodes d observation 1, 2 ou 3. Ce qui risque de se passer prochainement c est un tsunami de lj suite à des rj en ultime po 3. ( des liquidations suite à des règlements et en derniere période d'observation). Et c est malencontreusement le scénario le plus probable sinon post vendanges 24 mais à coup sûr post vendanges 25. Si Bercy ne fait pas intervenir les banques sur l octroi nouveau de trèsorerie et le échelonnement des dettes actuelles, la filière tombe.Les mandataires sont unanimes :ce sont les banques qui déclenchent, pas la msa ni la dgfip et encore moins les fournisseurs. Et les crca et ce ne semblent pas les moins agressives sur le terrain, au delà de leur communication politiquement correcte. Il faut faire vite. Ensuite les juges commissaires n auront alors plus du tout la bande passante pour des ventes de gré à gré... et iront directement à la vente aux enchères... Sommes au bord du gouffre et sur le point de faire un grand pas en avant :-( Bercy Varenne depechez vous !!!
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Loulou Le 16 octobre 2024 à 15:37:28
Que fait France Agrimer avec tous ces fonctionnaires ??? A t on besoin de commander une étude à un cabinet conseil pour constater que notre viticulture est dans une situation économique catastrophique et que des dépôts de bilan ou des mise sous surveillance des entreprises viticoles sont en cours . Avec cet argent aidez nous à surmonter la crise. RAS le bol d études qui confirment ce que l on vit.
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