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"Pris à la gorge" le vignoble dévoile son "plan de sauvetage" : arrachages, distillation, prix rémunérateurs, trésoreries…
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Face à la crise 🛟
"Pris à la gorge" le vignoble dévoile son "plan de sauvetage" : arrachages, distillation, prix rémunérateurs, trésoreries…

Partageant avec la ministre de l’Agriculture le constat d’une crise inédite, la filière vin détaille de multiples demandes suscitant de la compréhension gouvernementale, mais nécessitant de lever des blocages réglementaires et financiers dès l’après-vendange.
Par Alexandre Abellan Le 15 juillet 2025
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« La filière viticole est à un tournant. Soit nous l’accompagnons, soit nous assistons à son effondrement » assurent les membres de l’AGPV à la sortie de leur rencontre avec la ministre. - crédit photo : Adobe Stock (JJfoto)
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eçus pendant 1h30 ce mardi 15 juillet par la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, les membres de l’Association Générale de la Production Viticole (AGPV) présentent un front uni et un ensemble de revendications proportionnées à la crise inédite dans son ampleur qu’affronte la filière. « Il n’y a pas un bassin, dans toute la France viticole, qui n’ait pas aujourd’hui de difficultés » pose Jérôme Despey, le président du conseil spécialisé vin de FranceAgriMer, pointant que « le constat est partagé avec la ministre : la filière viticole traverse l’une des plus grandes crises de son histoire, sur le plan de la déconsommation, du climat, de l’international (encore récemment avec la menace américaine de taxes de 30 % dès le premier août). » Cet été 2025, « le contexte est très compliqué pour la viticulture » confirme Jérôme Bauer, le président de la Confédération Nationale des producteurs de vins et eaux de vie de vin à Appellations d'Origine Contrôlées (CNAOC), pointant que « nos entreprises souffrent et il est urgent de trouver un dispositif tant structurel, avec de l'arrachage, que conjoncturel avec la biocarburation. »

Inquiétante depuis des mois, la situation économique du vignoble ne cesse de se dégrader et « la réunion s’est tenue dans un climat de très grande écoute de nos demandes, avec une forme de solennité et de gravité, la ministre ayant dit son inquiétude face aux difficultés que traverse la filière » rapporte Jean-Marie Fabre, le président des Vignerons Indépendants de France. « Il y a peu d’avancées au final. Les conclusions tirées, on les connaissait déjà » tempère Joël Boueilh, le président des Vignerons coopérateurs de France, qui souligne que « la ministre a bien conscience que la viticulture est dans une crise très importante, mais elle n’a pas les moyens d’y faire face. On est partagés, entre l’attention apportée et le mur des finances publiques disponibles. Il va falloir voir comment les choses avancent concrètement. Après les vendanges, les appels au secours viendront de partout. La ministre a mis en avant notre sens des responsabilités [des représentants du vignoble], mais je crains que le ras le bol et détresse ne finissent par nous rattraper et il va falloir mettre en place des réponses à une situation de crise explosive. La situation est alarmante. »

Plan de soutien

Dans un communiqué aussi collectif que combatif, les représentants de l’AGPV affirment que « la filière viticole est à un tournant. Soit nous l’accompagnons, soit nous assistons à son effondrement. Nous en appelons à la responsabilité de l’État pour engager, sans délai, un véritable plan de sauvetage ». Rappelant que « la filière viticole traverse l’une des crises les plus graves de son histoire »*, le vignoble dévoile ce 15 juillet un « plan de soutien fort et structurant » permettant « d’assainir les stocks et de réduire structurellement le potentiel de production national afin de réadapter l’offre à la demande et de soulager les trésoreries des entreprises. »

Nouvelles aides

Concrètement, cela passe par la mise en place d’une « aide à l’arrachage définitif et temporaire pour adapter le potentiel de production à la demande » (la filière parlant en 2024 de retirer 100 000 hectares de vignes de manière définitive et temporaire, quand le plan d’arrachage définitif à 4 000 €/ha de 2024-2025 a permis d’en retirer 27 000 ha, alors que la demande française d’outil temporaire a reçu comme réponse européenne une proposition de délai rallongé à 8+5 ans des autorisations de replantation) ; l’« ouverture de la distillation des vins vers des biocarburants pour préparer l’arrivée de la future vendange » avec la « bonification de la biocarburation si couplage avec un arrachage définitif ou temporaire » (la filière vin ayant annoncé que les distillations covid et Ukraine à 400 millions € seraient les dernières, elle évoque ici un nouveau mécanisme d’entraînement pour une réduction structurelle et non ponctuelle des volumes) ; l’« évolution des aides de trésorerie pour éviter les faillites à court terme » (les prêts de consolidation bancaire actés cet hiver nécessitant des adaptations pour leur mise en œuvre optimale) ; l’« aide à la restructuration économique des caves coopératives pour maintenir l’outil économique » (dotée de 10 millions € et suspendue à un audit en cours du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux, CGAAER) et l’« évolution d’Egalim pour garantir une juste rémunération aux producteurs » (ce qui devient une forte demande dans le vignoble, notamment à Bordeaux après de nouveaux prix cassés, mais aussi dans le Rhône où d’autres outils sont sollicités).

Une politique sans ressources est une politique sans effet

Mais alors qu’une nouvelle réglementation européenne sur la filière doit aboutir cet automne (le paquet vin), l’AGPV note le paradoxe entre « des intentions louables » (la réintroduction de l’arrachage et de la distillation dans les outils européens notamment) et « l’absence de moyens financiers » dédiés : « une politique sans ressources est une politique sans effet » alerte le vignoble, qui demande à Annie Genevard d’obtenir l’ouverture des fonds de réserve de crise de l’Union européenne au profit de la filière.

Le dernier groupe de contact vitivinicole entre l’Espagne, la France et l’Italie témoignant de besoins partagés d’accès à ces fonds de gestion confirme Jérôme Despey. Le premier vice-président de la FNSEA fait état de réserves communautaires annuelles de 450 millions €/an pour les crises de tous les États membres et toutes les filières production : « tout le monde a conscience que le secteur viticole subit l’une des crises les plus fortes de son histoire et a besoin en priorité des crédits de réserve. La ministre a vraiment la faculté de pouvoir en faire une priorité. »

L’intendance suivra-t-elle ?

Si les symptômes et les risques d’aggravation de la crise viticole sont actés, les besoins de nouveaux remèdes urgents ne vont pas pouvoir être immédiats dans leur mise en place, que ce soit réglementairement ou financièrement. Alors que la France réduit ouvertement ses dépenses, crises du vin et des finances publiques ne faisant pas bon ménage, les représentants de la filière viticole comptent sur la Commission européenne pour débloquer sa réserve de crise agricole et la France pour ajouter des fonds nationaux. « Le plus complexe maintenant va être de trouver des budgets dans un contexte budgétaire particulièrement tendu » analyse Jérôme Bauer, pour qui « la mobilisation du fonds de réserve de crise va être notre priorité, en parallèle de l'aboutissement des dispositions du paquet vin, qui nous donnent la base règlementaire de l'arrachage ».

« Il faudra des crédits de crise, complétés par des crédits nationaux, d’où l’intérêt de mesurer par une enquête les demandes d’arrachage et de distillation qui pourraient être formulées » souligne Jérôme Despey. « L’Europe ne peut pas ne pas répondre positivement à une telle demande. Sinon, elle serait défaillante pour un secteur en très grande difficulté » estime Jean-Marie Fabre. Qui note qu’après des années de difficultés cimentées dans la filière vin, la ministre de l’Agriculture affirme sa volonté de mobiliser des outils de gestion de crise ayant un effet durable sur l’avenir du secteur.

Vendange de raisins et de relance

« Vous pouvez compter sur mon écoute et mon entière disponibilité car la filière viticole est celle qui rencontre le plus de difficultés actuellement » aurait indiqué la ministre, citée par l’AGPV, s’engageant à donner suite à plusieurs demandes dans les prochains mois : pour que le vignoble récolte à la rentrée son millésime 2025 et des aides d’urgence dans la foulée. Pour le fonds de restructuration des caves coopératives, un troisième inspecteur du CGAAER va être nommé afin de mener rapidement les travaux d’audit à leur fin. « C’est une bonne pour aller plus vite dans l’audit » note Joël Boueilh, qui regrette que des « mesures qui ne coûtent pas un euro ne soient pas mises en œuvre ». Le viticulteur gascon pensant aux Organisations de Producteurs (OP), qui ne font pas consensus dans la filière vin (et n’ont pas été discutées ce matin). Concernant la révision d’Egalim 4, la ministre annonce une lecture prochaine par les parlementaires d’un nouveau dispositif d’encadrement de la valorisation, un tunnel des prix évoqué depuis des mois. La mise en œuvre de simplifications sur les charges administratives et les conditions de production sera également suivie par le ministère de l’Agriculture.

Arrachage et distillation

Sur l’arrachage définitif/temporaire, « Annie Genevard s’est montrée compréhensive vis-à-vis de la demande, avec toutefois plusieurs conditions préalables : qualifier les vignes qui sont arrachées (causes de l’arrachage, friches ou vignes productives, alternatives après l’arrachage, …) » et la conduite d’un sondage dans le vignoble pour chiffrer les besoins rapporte le communiqué collectif. Qui ajoute que pour la distillation de vin destinée à produire des biocarburants, « elle, ne sera possible qu’avec une modification des textes européens, notamment le paquet vin » et la « bonification de la biocarburation, si couplage avec arrachage, sera étudiée au regard de la comptabilité avec la mobilisation du fonds de réserve de crise européen ». Le sondage sur les besoins en arrachage et distillation doit être ouvert au plus vite indique Jérôme Despey, rappelant que FranceAgriMer avait mené une enquête similaire l’an passé. En l’état, de telles mesures n’ont ni support réglementaire (le paquet vin n’étant pas adopté) ni financement ferme (européen comme national), mais il faut des résultats dès la fin des vendanges pour avancer dès l’automne souligne Jérôme Despey. Qui note que le dispositif d’arrachage ne pourra être supérieur à 4 000 €/ha, et qu’il ne souhaite pas que la prime soit inférieure.

Trésoreries

Au sujet des encours bancaires, la ministre crante également un travail à mener dès l’automne sur le prêt de consolidation (ouvert jusqu’au début janvier 2026). Alors que le système se déploie progressivement avec la clôture des exercices comptables (souvent au 31 juillet), il y a des éléments bloquants le rendant inopérant, comme le critère des fonds propres à revoir rapporte Jean-Marie Fabre, qui pointe que les difficultés financières s’aggravent et s’amplifient : « le prêt de consolidation est un bon outil grâce à la réponse rapide de la ministre, qui évoque la possibilité de faire évoluer les critères européens avec la réalité des entreprises bénéficiaires, d’ouvrir un outil complémentaire ou nouveau selon les remontées ».

Plus qu'une écoute

Pour le président des Vignerons Indépendants, l’ampleur de la crise est non seulement pleinement actée par la filière, mais aussi par la ministre qui « a fait preuve d’écoute et a conscience d’une situation nécessitant un engagement majeur. La situation est telle que la ministre s’est engagée à envisager toutes les voies, n’en excluant aucune, si les solutions sont durables et pas seulement ponctuelles. Cela demandera du temps pour construire ces outils. » Pour Jérôme Despey, la filière peut acter que « la ministre a eu plus qu’une écoute. Elle est très préoccupée par la situation du secteur vitivinicole comme elle nous l’a dit plusieurs fois ». Le président du conseil spécialisé vin de FranceAgriMer soulignant que la ministre s’est dite « prête à peser de tout son poids sur l’accélération du paquet vin et la mobilisation des crédits de réserve de crise ».

Notant que « l’arrachage sera indispensable et [qu’] il convient d’accompagner les jeunes viticulteurs dans les transitions qui seront à venir », l’AGPV a demandé à la ministre de rencontrer l’ensemble de la filière à l’issue des vendanges pour faire un point d’étape sur les outils et financements à mettre en œuvre. Le niveau de la production française de vin ce millésime 2025 étant également un élément capital pour la gestion de la sortie de crise du vignoble.

 

* : « Entre effondrement de la consommation, stocks invendus, augmentation des coûts de production, problématiques commerciales internationales et aléas climatiques à répétition, les viticulteurs sont pris à la gorge » alerte l’AGPV, pointant que « les marchés sont saturés et de nombreuses caves sont pleines à craquer, alors que la vendange approche à grand pas. Dans le même temps, les charges continuent d’augmenter, creusant les déficits et étranglant les trésoreries. » L'AGPV réunit la CNAOC, les Vignerons Coopérateurs, les Vignerons Indépendants de France, la Confédération des Vins IGP, la FNSEA, les Jeunes Agriculteurs et le Comité National des Interprofessions des Vins à appellation d’origine et à indication géographique (CNIV).

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augustin Le 18 juillet 2025 à 10:46:16
on ne peut pas dire que nous soyons decus ni surpris Mme genevard a réussi à nous endormir à coup de calinotherapie ... mais à l évidence elle n à pas et n'aura pas l oreille de Bercy. Cette fois c est bien la fin de notre filière et il faudra une demi génération de politiques, pour auditer plus tard le sujet.Le déficit du commerce exterieur va prendre un coup mais il semble que tout le monde s en fiche. Ce ne sont pas des subventions dont nous avons besoin ...mais de treso de la part des banques et d une aide à l export.Mais cela Mme genevard n en a cure ou encore n y peut mais . Varenne est resté dans l histoire pour la fuite de Louis XVI , le fait d avoir domicilie ce ministere dans la rue éponyme aurait dû nous mettre sur à piste :*) !!!
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PH COSYNS Le 17 juillet 2025 à 08:01:43
Bla, bla, bla, et Re-blablabla...
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GG Le 16 juillet 2025 à 18:31:56
Ce n'est pas un plan de sauvetage mais un plan de naufrage ... Nous ne trouvons que des recettes éculées et en plus elles sont pour le moment en partie incompatibles avec la règlementation européenne en vigueur! Il serait plus productif de concocter de grandes manifs parisienne et dans nos capitales régionales ou nous ferions déguster nos vins en exposant clairement nos problématiques auprès du grand public et relayées dans les médias. Faisons le buzz, il n'y a que cela qui marche. Nos dirigeants en sont-ils capables?
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Renaud Le 16 juillet 2025 à 13:15:51
En résumé une promesse de l'Etat d'agir sans précipitation en repoussant de Pâques à la trinité l'action future. Aucune dimension politique NON COÛTEUSE. Des représentants qui se réveillent tard alors que l'incendie est général. Le représentant dés VIF qui en plus de se faire aussi gros que le bœuf continue préférer passer sous la table qu'à la renverser. En gros ce n'est pas l'espoir d'évolution positive qui m'etreind . Et pendant ce temps là les campagnes meurent.
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