réparer le futur en s’ancrant dans le passé prend du temps… présent. Devant aboutir en 2032 dans le Sud-Ouest, le programme d’obtention de cépages résistants adaptés aux typicités de la Gascogne et du piémont pyrénéen (le projet Gascon’Idéos) passe un nouveau cap avec la fin de la plantation de 180 cépages résistants dont le potentiel doit maintenant être étudié sur le château de Mons (propriété de la Chambre d’Agriculture du Gers).
Collectivement porté par sept vignobles du Sud-Ouest*, ce projet de création variétal lancé en 2019 va tester sur les prochains millésimes les caractéristiques des 180 génotypes retenus après des croisements entre des variétés résistantes obtenues par la recherche française (Resdur de première et deuxième générations) et trois cépages autochtones du Sud-Ouest (colombard, gros-manseng et tannat). « Si on ne le fait pas, personne d’autre dans le monde ne le fera » résume Alain Desprats, le directeur du syndicat des vins Côtes de Gascogne.
Demandant un travail de bénédictin (avec la castration des fleurs du cépage autochtone devenant femelle et l’apport du pollen des vignes Resdur), les croisements ont abouti à 2 000 pépins candidats, qui ont été sélectionnés par analyses génétiques (soit une variété hermaphrodite, de la bonne couleur, avec des gènes de résistance au mildiou et à l’oïdium…). Pour finir, seules 60 obtentions par cépage croisé ont été retenus, pour une plantation de 6 ceps à chaque fois. Plantés en juin 2021 et juin 2022 sur parcelle calcaire, ces variétés vont être suivies au vignoble (phénologie, port, vigueur, rendement, assimilation d’azote, rendements, résistances aux maladies et à la contrainte hydrique…) et au chai avec des microvinifications (1 litre de vin avec des robots microfermenteurs pour analyser les taux de sucre, l’acidité, les arômes variétaux...).
Se basant des profils idéaux des descendants (les idéotypes), une sélection de 10 à 12 descendants par cépage sea faite pour lancer des plantations à plus grande échelle sur parcelle mesurant leur Valeur Agronomique Technique et Environnementale (VATE). Soit les prémices à une inscription de nouvelle variété au catalogue français des variétés de vignes. « Avec les 3 années de mise en production et les 3 années d’essais, on arrive vite en 2032 » note Alain Desprats.
Demandant une quinzaine d’année et 500 000 euros de budget (soutenu par des fonds européens et régionaux), ce programme doit récompenser la patience et les investissements de ses acteurs avec des obtentions ressemblant aux clones actuels du colombard, du gros manseng et du tannat, mais avec des caractéristiques adaptées à l’avenir. Soit la résistance aux maladies cryptogamiques qui permet de réduire l’usage de pesticides (-80 % de produits phytosanitaires épandus d’après de premières données de l’Observatoire du déploiement des variétés résistantes, Oscar) et de viser des vignobles plus durables et des vins sans résidus de pesticides. Ainsi que l’adaptation au changement climatique.
D’autres programmes régionaux existent : en val de Loire (sur melon, chenin et sauvignon blanc), à Cognac (monbadon, montils, Vidal36, ugni blanc et folle blanche), à Bordeaux (cabernet franc et petit verdot), Languedoc (piquepoul), Provence (cinsault et vermentino), Vallée du Rhône (grenache, muscats petits grains et syrah), Bourgogne et Champagne (pinot noir, pinot meunier, chardonnay, gouais et aligoté) et Alsace (gewurztraminer et riesling).
* : Les vins IGP Côtes de Gascogne, les vins AOP Irouléguy, Madiran Pacherenc du Vic Bilh, Saint-Mont, Tursan, les eaux de vie AOP d’Armagnac et le vin de liqueur AOP Floc de Gascogne. Avec le soutien technique de l'Institut Français de la Vigne et du Vin (IFV) et de l'Institut National de la Recherche pour l'Agriculture et l'Environnement (INRAe).