ans la plupart des régions, les fermentations alcooliques n’ont pas posé de grosses difficultés. Certaines peinent toutefois à s’achever. Les vins secs s’annoncent très bons, alors que la météo complique la récolte des liquoreux. Voici ce que retiennent les œnologues de ce début de campagne.
Eric Grandjean, du centre œnologique de Bourgogne n’en revient pas. « On a des intensités colorantes de 27. C’est exceptionnel pour le pinot noir qui généralement ne dépasse pas 12 à 15. En 2018, le millésime le plus coloré jusqu’à présent, les records étaient de 20-22. Cette année, on les pulvérise », détaille l’œnologue. Les rendements sont faibles, de l’ordre de 30 à 35 hl/ha avec de très petites baies concentrées.
Ces intensités colorantes élevées sont aussi relevées en Val de Loire. « 2020 fait partie des millésimes où les IC sont les plus élevées sur pinot noir avec des valeurs de 8 à 11 contre 6 à 8 habituellement et cette couleur s’extrait facilement », observe aussi Fabrice Doucet, du Sicavac à Sancerre.
Pareil dans le Beaujolais, « 2020 se place dans les trois millésimes les plus colorés de ces dix dernières années », indique Jean-Charles Fabre, du laboratoire Oenoconseil Laroche. Les vignerons ont récolté des raisins concentrés et mûrs avec des rendements faibles à moyens. « Beaucoup de vins finis affichent 13 – 13, 5 °" indique l'oenologue.
« Dans tous les chais, il y a au moins une cuve à relancer avec un pied de cuve et des levures de refermentation. C’est lié aux degrés élevés des raisins qui ont pratiquement séché sur pied et sont rentrés à 15 voire 16, et au manque d’azote assimilable », constate Damien Le Grelle, de l’oenocentre de Bergerac-Duras.
« On a pas mal de cuves de rouge qui traînent pour finir les sucres, observe aussi Eric Grandjean, du centre œnologique de Bourgogne, le 30 septembre. Il faut bien séparer les presses des gouttes pour les laisser finir de fermenter ». En revanche pas de soucis pour les blancs.
A Chinon et Saumur, dans le Val de Loire, Florent Doublier du laboratoire Litov note quelques arrêts liés à des échauffements de cuves. « Mais c’est loin d’être général ».
Dans le Languedoc et dans les Côtes-du-Rhône, les fermentations ont en revanche été rapides. Olivier Roustang, de Rhône-Œnologie a observé des teneurs en azote assimilable exceptionnelles : souvent plus de 300 mg/l sur des syrahs et même plus de 500 mg/l sur une cuve.
Dans le bordelais, le monde des liquoreux est coupé en deux, avec Sauternes d’une part et les autres appellations d’autre part. Au 1er octobre, « la plupart des vignerons de Sauternes avaient fait leurs deux premières tries. Et qu’ils ont rentré est plutôt joli avec 19 à 20° pour la première trie et de 21 à 24° pour la deuxième. C’est très net, très fruité avec des notes confites et une belle acidité », explique Marie-Laurence Porte œnologue chez Enosens Cadillac Podensac Leognan.
En revanche à Sainte-Croix du Mont, Loupiac, Cerons et Cadillac, c’est une autre affaire. « Ces vignobles ont quinze jours de décalage avec Sauternes. Le botrytis s’est y installé sous forme de pourri plein plus que de pourriture noble. Les vignerons ont seulement fait la trie de nettoyage avec des degrés autour de 17. Ils n’ont même pas rentré 1/5 des volumes alors que la météo se dégrade ».
A Gaillac, Francine Calmels, du laboratoire œnologique départemental craint que les viticulteurs ne puissent pas faire de vendanges tardives avec le cépage loin de l’œil. « Actuellement les degrés sont de 13 à 14. C’est bon pour les moelleux, mais pour les liquoreux il en faudrait 18, alors que le temps est frais et que des pluies qui arrivent. Les peaux commencent à se fragiliser ». Même chose en Alsace où les vignerons craignent de ne pas pouvoir faire de vendanges tardives.