ne « vraie lecture du terroir ». Selon François Chidaine, du domaine éponyme, tel est le résultat que l’on obtient lorsque l’on vinifie ses vins dans Wineglobe, des petites cuves en verre commercialisées par la famille Paetzold. Le vigneron en utilise six de 250 litres depuis trois campagnes. « Tout est parti d’une dégustation chez un collègue qui avait vinifié un sauvignon blanc en Wineglobe, raconte-t-il. J’ai été interpellé par la pureté aromatique du vin, tout comme mon fils avec qui je travaille et qui a dégusté au même endroit à huit jours d’intervalle. »
Séduit, en 2020, il achète deux Wineglobe, un troisième en 2021 et trois autres en 2022, dans lesquels il vinifie un 100 % chenin blanc produit sur un de ses plus beaux terroirs, des sols argileux à silex appelés « aubuis ». Après un pressurage direct puis un débourbage statique à froid pendant 24 heures, il remplit les Wineglobe avec son pistolet-entonneur. « Je travaille en levures indigènes. Chez moi, les fermentations peuvent durer jusqu’à trois mois. Avec le Wineglobe, certaines ont mis presque quatre mois. » Comme pour ses barriques, le vigneron surveille régulièrement la densité et la température – toutes les semaines lorsqu’elles languissent – et régule la température grâce à un aéroconvecteur prévu dans la pièce à cet effet. « Après douze mois d’élevage, je soutire avec un plongeur et j’assemble : 40 % Wineglobe et 60 % élevage en fût. » Avantage non négligeable : compte tenu de l’absence d’oxygénation, le SO2 combine moins dans le verre et permet de conserver un SO2 total bas. « Je mets entre 2 et 3 g/hl de SO2 à la vendange, et pendant l’élevage, j’en rajoute peu, voire pas du tout, et j’ajuste à 25 mg/l de SO2 libre avant la mise. »
Mais, pour François Chidaine, le véritable inconvénient reste le prix, même s’il tempère son propos. « C’est cher mais réutilisable à l’infini… Si on ne le casse pas, bien entendu. » Comptez entre 4 000 et 5 000 € HT pour un modèle de 220 litres –environ 95 % des ventes– et 2 500 € HT pour un 115 litres. Malgré un verre borosilicate –le même que celui utilisé dans les laboratoires– plus résistant aux chocs thermiques et mécaniques que le verre classique, la manutention est délicate.
Niveau nettoyage, c’est très facile d’entretien. « Le tartre ou les lies n’accrochent pas sur le verre. Tout part à l’eau chaude à 60 °C », constate le vigneron. Et, pour se protéger des goûts de lumière lors de l’élevage, François Chidaine enfile des housses noires satinées sur ses Wineglobe, accessoire aussi esthétique que le contenant vendu par la famille Paetzold.
Au domaine Combier, au sud de Tain-l’Hermitage à Pont-de-l’Isère, David Combier n’en est pas à son coup d’essai. « Pendant quatre ans, j’ai expérimenté le Wineglobe sur plusieurs cépages. Sur différentes parcelles de marsanne et de roussanne vinifiées séparément, certains lots ressortaient mieux avec une acidité et une fraîcheur préservées. Ce sont donc ceux que je vinifie désormais en Wineglobe. En revanche, je reste sur une vinification classique pour la syrah, les Crozes-Hermitage demandant une certaine structure. »
Ce vigneron élève ensuite son vin pendant huit à dix mois dans ses dix Wineglobe, puis assemble avec un élevage barrique, « pour garder de la structure », explique-t-il. « En 2022, malgré l’année caniculaire, les blancs vinifiés et élevés en Wineglobe sont restés frais et tendus », précise-t-il. Et pas besoin d’ouillage, ou très peu.
Pour éviter la casse, il a installé des tapis en caoutchouc. « On manipule les Wineglobe dessus, il faut apprendre à travailler avec ces contenants. J’utilise encore des dames-jeannes de mon arrière-grand-père ! », confie David Combier. Mais, selon Paetzold, casser un Wineglobe reste exceptionnel. « En 2022, sur les 2 000 Wineglobe vendus dans le monde, un seul a été brisé. Un accident de cave avec les pales d’un chariot », note Arnaud Mennesson, responsable des ventes export, rappelant qu’il est possible d’assurer le contenant.
Dans le Médoc, Stéphane Dief, propriétaire du domaine Manou, élève un merlot issu de vignes préphylloxériques pendant douze mois dans ses deux Wineglobe. « On réalise uniquement l’élevage. Notre objectif est de coller au plus près du terroir et c’est ce qui ressort. Il y a vraiment une marque de fabrique. » Pour autant, pas question de tenter une cuvée 100 % Wineglobe. « Ce n’est pas ce qu’attendent les consommateurs en achetant du bordeaux. En dégustation, il manque de la structure en bouche. Notre assemblage oscille donc entre moitié et deux tiers élevage Wineglobe et le reste en barriques neuves, pour une cuvée de 1 000 bouteilles. »
Aujourd’hui, la famille Paetzold souhaite internaliser la production de ses Wineglobe, développés par ses fournisseurs. « Nous avons construit un four verrier à Bordeaux et nous sommes en pleine phase de test pour déterminer le bon type de verre. » Un contenant de 400 litres très attendu devrait donc bientôt voir le jour, le modèle de 500 litres présenté au Vinitech fin 2022 n’étant pas disponible compte tenu des coûts de production disproportionnés.
Quelle différence avec l’inox ? À la vue du prix des Wineglobe, la question est légitime. Pas d’explication scientifique pour Arnaud Mennesson, responsable des ventes export, qui constate en revanche une vraie valeur ajoutée d’un point de vue organoleptique. « Cela peut venir du verre lui-même, un matériau inerte. Le vin est plus frais, plus ouvert et ne se comporte pas de la même façon, là où l’inox contribue à obtenir des notes plus fermées et moins aromatiques. » Des essais confirment une combinaison du SO2 plus rapide en cuve inox, ainsi qu’une oxydation accrue des polyphénols au niveau de la couleur.