rois vignerons, trois appellations, mais une même motivation : élever des rouges avec la micro-oxygénation d’une barrique, mais sans le boisé. Et une même solution pour atteindre leur objectif : les cuves ovoïdes en polyéthylène (PE) de Wine & Tools.
À Puycelsi, en AOC Gaillac, Alix David ne supportait plus les arômes boisés dans ses vins. Après avoir changé d’Å“nologue-conseil en 2018, la copropriétaire du Château de Terride – 32 ha en conversion bio – élève tous ses vins rouges dans ces cuves en forme d’Å“uf. « La syrah et le braucol, mes cépages majoritaires, sont trop austères lorsqu’ils sont élevés en barrique. Cependant, la micro-oxygénation des barriques arrondit leurs tanins. Ces cuves ovoïdes ont la même perméabilité. J’y élève tous mes vins sept à huit mois. Leur fruité, leur rondeur et leur typicité s’en trouvent accentuées », affirme-t-elle.
Ces cuves existent sous deux versions – Soft et Power – et en deux contenances – 11,25 et 14,5 hl. « Soft apporte autant d’oxygène qu’une barrique de trois ou quatre vins, soit entre 11 et 13 mg par litre de vin et par an, Power apporte l’équivalent d’une barrique d’un ou deux vins, soit entre 15 et 17 mg/l/an d’oxygène », précise Frédéric Planchon, gérant de Wine & Tools, qui distribue ces cuves en France et en Europe.
Alix David possède 14 cuves Ovoid Power. Philippe Vatan, propriétaire du Château de Hureau – 19 ha en AOC Saumur-Champigny –, les a aussi choisies. Il s’est équipé d’une première cuve de 14,5 hl en 2020 pour y élever son cabernet franc sans soufre. Au vu du succès de ce vin, il en a acquis deux nouvelles en 2021.
« La micro-oxygénation et la neutralité aromatique de ce contenant respectent le fruit et apportent une belle structure. Mon vin est aussi plus rond qu’en barrique. L’élevage dure environ 12 mois et je n’interviens presque pas, sauf pour un soutirage afin de mettre le vin au popre », précise le vigneron.
Frédéric Planchon explique l’apport de rondeur et de gras par le brassage des lies dû aux mouvements naturels de convection qui se produit lorsqu’il existe un gradient de température entre le haut et le bas de l’Å“uf. Un effet qu’il a validé auprès de Celsius, une société indépendante, confirmée en 2020 par une étude de l’Université de Reims.
À Albas, en AOC Cahors, Didier Pelvillain, est le troisième utilisateur que nous avons interrogé. En 2019, ce vigneron a élevé sa cuvée haut de gamme, un malbec très concentré et fruité, durant 15 mois dans un Å“uf en PE. Un vin vendu 35 €. « En plus d’accentuer le fruité, cette cuve apporte un confort de travail car l’hygiène est simplifiée. Un seul rinçage avec une légère pression et elle est propre. De plus, je n’ai pas du tout sulfité pendant l’élevage. Le SO2 libre a diminué de 10-15 %. Rien qui nécessite un réajustement. L’ouillage est aussi bien moindre qu’en barrique ou en terre cuite, voire inexistant, puisque le PE ne “boit pas de vin” », ajoute le vigneron.
Pour un volume équivalent à 5 barriques, le modèle Ovoid pèse 45 kg à vide, un poids plume. « C’est un réel bonheur de travailler avec cet Å“uf, d’autant qu’on n’a pas peur de le casser. J’ai deux chais à 3 km de distance et nous pouvons les déplacer sans problème. Je peux aussi nettoyer seule une cuve. Le tartre se dépose très peu », constate Alix David.
Les deux autres vignerons apprécient aussi la facilité de manipulation de la cuve. « Elle est posée sur un coquetier et facilement maniable avec un transpalette quand elle est pleine », souligne Didier Pelvillain. Le seul petit souci pour Philippe Vatan « c’est que je ne peux plus me servir d’une échelle pour nettoyer l’intérieur quand elle est vide, sinon elle bascule. Alors je monte sur un escabeau ».
Ces trois vignerons ont été séduits par le coût de la cuve Ovoid, environ 2 000 €, équipée d’une vanne de soutirage, d’un robinet dégustateur et d’une trappe au sommet. « Il faut le dire, les barriques coûtent cher et il faut les remplacer régulièrement, sans compter la main-d’Å“uvre pour les nettoyer, surveiller et ouiller les vins », soutient Didier Pelvillain. Frédéric Planchon, lui, affirme que « par rapport à une barrique, notre cuve divise les coûts d’élevage par cinq puisqu’on peut facilement l’utiliser pendant vingt ans. Et pour ceux qui souhaitent malgré tout boiser leurs vins, nous venons de fabriquer un petit accessoire pour accrocher des douelles ».
Lorsqu’ils visitent sa cave, certains clients de Didier Pelvillain l’interrogent sur ses cuves en plastique. « J’explique simplement que leur production n’est pas plus polluante que celle des barriques », indique-t-il. Alix David ne s’émeut pas davantage de l’impact environnemental de ses cuves. « Je n’ai aucun problème écologique ou éthique avec le fait d’utiliser un contenant en plastique que je vais garder plus de vingt ans et qui me demande très peu d’eau pour le nettoyage », affirme-t-elle. Pour Frédéric Planchon, il faut se demander s’il est légitime de couper des arbres pour fabriquer des barriques qui durent trois ans en moyenne. En vue d’améliorer l’aspect visuel d’Ovoid, il vient de sortir des versions en couleur, notamment la teinte béton qui plaît car plus discrète que la couleur blanche actuelle. « Pour ma prochaine commande, j’ai demandé des coquetiers (sur lesquels reposent les oeufs) rose fuchsia. J’ai hâte de les recevoir », se réjouit Alix David.