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Ouverture de la chasse aux vins blancs dans le Gers
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Concurrence croissante
Ouverture de la chasse aux vins blancs dans le Gers

Alors que les volumes disponibles de vins blancs gascons s’annoncent réduits, les investissements d’opérateurs extérieurs à la zone semblent créer de petites étincelles.
Par Alexandre Abellan Le 03 août 2022
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Ouverture de la chasse aux vins blancs dans le Gers
Un aperçu de l'important projet de construction d'un site de vinification à Gondrin par la Distillerie de la Tour. - crédit photo : DR
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n cette période de festival Jazz In Marciac, on entend dans le Gers de grands crooners, mais aussi des échos du blues de l’union coopérative Plaimont face aux développements, à Grondin dans le Gers, de la Distillerie de la Tour (opérateur de spiritueux à Cognac et de vins charentais) et du négociant de vin en vrac Sudvin (filiale du groupe InVivo). Comme le rapporte la Dépêche du Midi, « après 40 ans de travail sur l’appellation, l’amélioration des crus, la conquête de marchés, il est tentant de raccrocher les wagons au train déjà lancé, confie un responsable d’une coopérative gersoise », le quotidien citant ensuite le directeur général de Plaimont, Olivier Bourdet-Pees, pour qui « cela impose une vigilance de notre part. S’il s’agit de mastodontes absolus, qui viennent capter la valeur ajoutée sans nourrir le territoire, ils deviennent dangereux. »

Chez la Distillerie de la Tour, on ne se considère pas comme un nouveau-venu : « cela fait 30 ans que l’on travaille dans le Gers avec un prestataire, Guy Boué » indique Christophe Thomas, le directeur général de la Distillerie de la Tour (basée à Pons, Charente-Maritime). Ce dernier revendique la production 50 000 hectolitres de vins l’an passé dans le Gers (essentiellement des vins de bases mousseux et des vins tranquilles sans indication géographique) et espère produire plus ce millésime 2022 (avec 5 à 6 000 hl de vins IGP Côtes de Gascogne en sauvignon blanc). Avec la construction d’une cave de réception de vendange et de vinification à Grondin, la Distillerie de la Tour vise une production de 80 à 100 000 hl dans les prochaines années (essentiellement en VSIG, pour les bases mousseux et les vins tranquilles, avec 15 % en IGP et pas d’alcools à ce stade).

Répondre aux besoins en vins blancs

Pour l’opérateur charentais, la raison principale de son implantation en dur dans le Gers est son « vignoble capable de répondre aux besoins en vins blancs. Nos clients historiques ont des demandes, mais le vignoble charentais est totalement orienté vers le cognac » explique Christophe Thomas, pour qui « il n’y a pas un choix très large en France pour les vignobles blancs : il y a la Loire, mais avec peu de possibilités. Le vignoble du Gers s’impose pour du vin blanc sec avec une certaine acidité. » En matière de vins blancs standards à hauts rendements, « tout le monde convient du potentiel du Gers « c’est justement parce qu’il y a beaucoup d’attraits et apparemment de gens qui s’intéressent à ce marché que l’on est tous d’accord sur le constat. Ça ne fait pas de doute » confirme Philippe Leveau, le directeur général délégué de Cordier (filiale vin du groupe coopératif InVivo).

Rappelant acheter par le passé avoir acheté des vins au groupe coopératif Vivadour (40 000 hl pour ses marques propres et des marchés du nord de l’Europe), Philippe Leveau indique que le groupe coopératif réfléchit depuis trois ans à des développements dans le Gers depuis le rachat de la marque de vins mousseux Café de Paris (à Pernod-Ricard en 2019). L’enjeu étant de « trouver de nouveaux sourcings de bases mousses et le Gers a cette capacité aujourd’hui, et encore plus demain » indique le directeur général délégué, qui compte mettre à profit ce potentiel avec la reprise en location du chai 931 de Vivadour par le groupe Sudvin (à Grondin). « Le chai était fermé, on réactive l’outil. C’est la preuve que l’on est créateur de valeur » glisse Philippe Leveau.

200 000 hl pour Sudvin

En 2022, Sudvin Gascogne compte amorcer la pompe avec 15 000 hl de vins. Un volume modeste sur la capacité de 150 000 hl de l’outil, que le groupe coopératif compte remplir à terme avec les achats de moûts et raisins assurés localement par Jean Leplus sur toute la gamme des vins du Gers. « Des bases de mousseux aux vins d’appellation pour inciter le monde coopératif à se mobiliser et soutenir ce projet plutôt que de penser aux seuls négociants privés (De la Tour, Grands Chais de France…). « Nous sommes une alternative et c’est la loi du marché qui s’enclenche : plus nous sommes nombreux, plus le territoire est en vogue et plus nous créons de la valeur » estime Philippe Leveau, qui compte arriver à 200 000 hl d’approvisionnement et de production sur le long terme.

« Quand il y a un négociant hors-zone qui consolide un partenariat qu’il avait déjà, il n’y a pas d’inquiétude, c’est de la consolidation » analyse Alain Desprats, le directeur du syndicat des vins Côtes de Gascogne, ajoutant que « c’est bien pour le marché des Côtes de Gascogne quand il y a l’arrivée d’un nouvel opérateur. » Pour l’Organisme de Défense et de Gestion, il n’y pas d’inquiétude sur ces développements, mais des questionnements sur les pertes de marché liées à la petite production 2021 et aux perspectives de millésime 2022 peu généreux. « La récolte à venir ne va rien arranger, ça va dépendre de la pluie » ajoute Alain Desprats, faisant état de 20 à 25 % de pertes de récolte avec le gel et la grêle.

Déstabilisation sur une petite récolte

Dans ce contexte d’approvisionnement resserré, il est paradoxal que la Gascogne suscite de l’intérêt quand elle va manquer de vin analyse Joël Boueilh, co-président de l’interprofession des vins du Sud-Ouest (ayant présidé Plaimont par le passé). « C’est quand l’on va revenir à la pleine production que l’on va voir les dégâts de ce que l’on vit : tant que l’on manque de vin, les prix flambent et tout semble bien aller. Quand on retrouvera une récolte normale, on va s’apercevoir que les marchés laissés en 2021 et 2022 vont être difficiles à rouvrir » prévient le coopérateur de Saint-Mont. « Ce qui me fait peur, c’est la déstabilisation sur une petite récolte avec des opérateurs qui ont besoin de vins et de raisins et qui, pour rentrer dans leurs objectifs, pourraient tourner la tête de vignerons » ajoute-t-il, prévenant qu’« il y aura beaucoup de déçus. Les gens venus de l’extérieur peuvent surfer sur la dynamique de l’appellation, cela risque à contribuer à mettre la pagaille cette année et ce sera décevant l’an prochain si l’on retrouve une production normale et qu’il faudra baisser les prix. »

Il n’existe pas de bon moment pour arriver estime Philippe Leveau, se demandant ce qu’on lui aurait dit si Sudvin s’était installé dans le Gers sur un millésime abondant. Annonçant un travail sur le temps long, il ajoute ne pas venir « faire un coup. On sait que sur cette zone il y a aujourd’hui un déséquilibre entre le poids des négociants et l’autonomie du monde coopératif pour bien valoriser les revenus. » Relevant des petites annonces pour vendre des raisins dans la presse agricole, Philippe Leveau y voit les signes d’un marché tendu et volatile où InVivo peut remettre de la valeur : « on veut juste être sûr que l’empreinte coopérative sur ce vignoble reste forte*. » Du côté de la Distillerie de la Tour, « j’entends les inquiétudes, on est en concurrence, je ne le nie pas. Même si je ne vois pas la concurrence avec Plaimont : nous ne sommes pas sur la même zone d’approvisionnement et nous ne faisons pas de bouteilles » indique Christophe Thomas.

Nouveaux marchés sans se marcher sur les pieds

« Nous sommes attentifs à un développement économique de la Gascogne laissant une grande partie de la valeur ajoutée sur le territoire. C'était une région en grande souffrance il y a 30 à 40 ans, tout le monde est le bienvenu pour créer de la valeur » précise à Vitisphere Olivier Bourdet-Pees, ajoutant que pour l'IGP Côtes de Gascogne, « de gros acteurs arrivent, mais j'aimerai un Brad Pitt [comme en Provence] pour amener de l'image et construire un positionnement de locomotive. Ce sont de grosses machines industrielles en attendant d'en voir la puissance commerciale. » Face aux affirmations des entreprises investissant, Joël Boueilh indique également qu’il jugera sur la création de nouveaux débouchés : « la réussite de la Gascogne tient aux opérateurs qui recherchent de nouveaux marchés sans se marcher sur les pieds ou se piquer la place en baissant les prix. Espérons que ces gens-là ne se nourrissent pas sur la bête, mais fassent grandir les Côtes-de-Gascogne. » Si l’orchestre s’agrandit pour le prochain festival Jazz In Marciac, il doit encore apprendre à jouer en harmonie.

 

* : « La vocation de Cordier est à terme d’être présent dans tous les territoires français » indique Philippe Leveau, notant que la structure « Invivo est une union coopérative et a capacité à agréger toutes les coopératives qui elles défendent la territorialité ».

 

 

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