Déjà croisée l’an passé à Wine Paris, la bouteille blanche s’impose cette année pour les rouges clairs avec un objectif : attirer l’œil sur la jolie robe de ces vins.
À Bordeaux d’abord. Tutiac a présenté deux merlots à 11° seulement avec une même robe : rouge et cristalline ! Le premier, baptisé « Rouge frais », en IGP Atlantique s’adresse à la grande distribution (GD), avec 8 g/l de sucres résiduels. Le second, « Mode rouge », est un bordeaux destiné au réseau CHR. Même vinification : un écoulage après 72 heures de macération et une fermentation à 18 °C. Prix public : 6 € pour le « Rouge frais » et 8 € pour le « Mode rouge ».
Non loin de là, Laurent Cassy, vigneron au Château Chillac à Morizès (33), présente « Coup de blouge », un IGP Atlantique à 11,5°. « C’est un assemblage de six cépages rouges et blancs. Je laisse macérer de 8 à 9 heures avant de vinifier en phase liquide à 16 °C », explique le cofondateur du collectif Bordeaux Pirate. Résultat : un rouge presque translucide. Autre création : « Trempette », un bordeaux rosé 100 % cabernet-sauvignon, destiné en priorité au circuit traditionnel et à un prix public entre 8 et 10 €.
Dans le même hall, la maison Jules Lebègue surfe elle aussi sur la vague des rouges clairs en bouteille blanche avec son Merlot polaire. L’étiquette thermosensible montre un ours avec une écharpe autour du cou qui passe de bleue à blanche lorsque le vin descend à 10 °C. Les 20 000 bouteilles sont destinées à la GD, au prix de 6,95 €.
Un étage plus haut dans le hall 7.2, la cave de Plaimont dans le Gers, suit la tendance. « Le consommateur moderne ne passe plus son dimanche à table, raconte Olivier Dabadie, son président. On a donc créé PapaRoc, un assemblage de tannat et de cabernet-sauvignon, un vin rouge léger et fruité pour l’apéritif. » Là encore, une étiquette « rock » casse les codes.
La Loire n’est pas en reste avec « le P’tit Cab’ », un cabernet franc fruité et léger du Château de la Roulerie, en Maine-et-Loire. « On a fait une macération de 36 heures et une fermentation en levures indigènes », explique Marie Fabre-Germain, chargée de communication. Là aussi, du fruit rouge croquant prévu pour le marché CHR.
Pour attirer les jeunes, le Château Lamothe de Haux, dans le Bordelais, mise sur Guinguette, un cocktail à 6°, pétillant et sucré à base de vin en bouteille de 25 cl. Ce cocktail existe en deux couleurs. « Le blanc ressemble au mojito avec des arômes naturels de menthe et de citron vert tandis que le rouge est à base d’agrumes et de gingembre, façon sangria », présente Valentine Chombart, responsable de la communication. À destination du CHR et cavistes, au prix de 2,90 €.
À Béziers, le Domaine de la Colombette mise sur la 33 cl pour installer deux nouvelles cuvées sans alcool, un 100 % souvignier gris et un rosé d’assemblage de grenache noir et de cépages résistants. « Seulement 12 kcal/100 ml », indique Vincent Pugibet comme argument de vente pour un prix situé entre 3 et 4 €.
Laure Dubreuil a retenu le même contenant pour sa gamme « Fizz’in » aux étiquettes colorées style manga. « La bouteille de 33 cl convient aux festivals et à la GMS. L’étiquette, c’est parce que les Français sont les deuxièmes lecteurs de mangas après le Japon », indique la propriétaire des Vignobles Dubreuil en Touraine, venue à Wine Paris pour tester son idée. Fizz’in est du vin gazéifié : cabernet franc pour le rosé et chenin pour le blanc. Laure Dubreuil compte aussi sur l’export : « On va aussi le tester à Prowine Tokyo. »
Ses voisins, Marine et Arnaud Chon-Madec, à la tête du vignoble Gilbert Chon en Loire-Atlantique, ont déjà vendu leur canette de 25 cl de muscadet Beau-Marin aux Etats-Unis et en Suède. « En France, ça prend moins mais ça nous ouvre des portes : on nous a demandé de créer la gamme bouteille », explique Marine Chon-Madec. C’est chose faite : « Beau Marin » se décline désormais en trois monocépages (chardonnay, sauvignon et gamay rosé) tirés en bouteilles de 75 cl avec capsule vis.
Et si le vigneron était le cinquième élément ? Ainsi commence le storytelling des Vignerons Corsicans pour leur cuvée Iliani, qui « veut dire l’îlien en Corse », explique Pierre-Michel Tardy, le directeur général. Chacune des quatre bouteilles de cette gamme représente un élément : la terre, l’eau, l’air et le feu. Puis dessous l’explication : « l’Iliani, l’Homme, le cinquième élément, les réunit au travers de l’amour de la vigne et de sa terre ». Surbouchées à la cire, ces bouteilles ont vocation à s’implanter en CHR.
Au Château Gassier, le storytelling tourne autour d’une nouvelle bouteille hexagonale, unique et brevetée. « Ses six faces rappellent la France », explique Olivier Soulevain, le directeur général. Sur l’étiquette la mention « Craft Wines of Provence » souligne le côté artisanal de l’entreprise. Sur la capsule, un trait rose sur fond noir dessine la ligne d’horizon de la Sainte-Victoire, le terroir du château. Des cuvées bio destinées au marché CHR et cavistes à partir de 14,50 €.
« On voulait des étiquettes qui attirent l’œil », indique Estelle Cognard, propriétaire du domaine Cognard, à Saint-Nicolas-de-Bourgueil (Indre-et-Loire). Pour sa nouvelle gamme, Estelle Cognard opte pour le jeu de mots en jouant sur l’assonance canard-Cognard : « Le vilain petit canard » devient « Le vilain petit Cognard ». Trois vins de France en 100 % cabernet franc pour cette gamme : un blanc de noirs, un rouge et un rosé pour un lot 3 000 bouteilles à destination du marché traditionnel.
Même esprit espiègle chez Edwige Thuillé, gérante du domaine Valensac, à Florensac (Hérault), qui complète sa gamme avec deux IGP Pays d’OC, dont les noms évoquent des musiciens célèbres : « Barri white », pour le blanc et « Choupa pink », pour le rosé.
Sur corner de la « Nouvelle Vague », Edouard Barkhausen tente un jeu de mots plus périlleux. Ce vigneron qui a repris le Château du Grand Roc, à Lamothe-Montravel en Dordogne, en 2023, présente sa cuvée « Roux Pet’ », un vin de France rosé en méthode ancestrale. « Idéal pour les apéritifs estivaux, avec des bulles très fines », souligne-t-il.
Pour attirer les jeunes, encore faut-il « parler jeune », à l’image de Pauline Desfarges, cofondatrice de « Yoleau », allusion à « YOLO », acronyme de « You Only Live Once » (on ne vit qu’une fois »). Derrière ce marketing, deux Spritz sans alcool à base de verjus issu du Domaine de Siorac, en Dordogne. L’un est aromatisé à la framboise, l’autre à la fleur de sureau. Disponible en bouteille de 33 cl (3,90 €) et de 75 cl (10,90 €) dans le circuit traditionnel.
Dans le hall 7.3, la start-up EPC – pour épicurien – attire la foule sur son stand vert bouteille aux allures de show-room de marque de mode. Néons, mannequins et fausses cabines d’essayage, ce négoce a tout fait pour mettre en valeur son « cool-bag ». « Il se porte à l’épaule et conserve une bouteille au frais pendant 1 heure, affiche Clémentine Reyboubet, chargée de communication. Idéal pour les pique-niques. » Prix public : 8 €.
Dans les Corbières, au domaine du Vieux Moulin, la musique est une histoire de famille. Et les vignerons le font savoir. Derrière chaque bouteille, ils impriment un QR-code qui renvoie vers une playlist (une par cuvée) des plus variées. « C’est un mélange de nos goûts : plutôt rock pour mon père, pop pour ma mère et des nouveautés pour moi » explique Eglantine They, commerciale du domaine.