naugurée en janvier 2024 à Sauveterre-de-Guyenne, la première unité de désalcoolisation industrielle du vignoble bordelais a produit sur sa première année 17 000 hectolitres de vins totalement ou partiellement désalcoolisées (no et low-alcohol) à la fois pour la propre production de l’union coopérative qui l’accueille (2/3 des volumes) et en prestation de service (1/3). Un bilan « au-delà de nos attentes » résume Philippe Cazaux, le directeur général de Bordeaux Families (300 adhérents pour 5 000 ha de vignes en Entre-deux-Mers), pointant avoir « prévu un plan de charge sur trois ans. Nous y sommes arrivés dès la première année. Le point mort de 80 % d’activité est atteint. » Ce qui représente 50 à 60 % de la capacité de production de l’outil industriel, permettant d’envisager de nouveaux développements. « Nous sommes sur un bon rythme. Tout va maintenant dépendre des marchés. Nous y verrons plus clair dans un an, pour savoir si cela se maintient » esquisse prudemment Philippe Cazaux.
Si le marché du no-low semble en forte croissance (porté par des évolutions de consommation, mais aussi de fiscalités comme les taxes anglaises selon le degré alcoolique), Bordeaux Families profite actuellement du faible nombre d’acteurs présents aujourd’hui en France (les unités de désalcoolisation se trouvant en Allemagne, Belgique, Espagne…). Alors que Vivadour et Moderato investissent dans un Chai Sobre (dans le Gers), en Gironde « nous sommes arrivés bien à propos pour répondre au besoin » note Philippe Cazaux, qui relève qu’« en 2021, le pari que l’on a relevé paraissait fou » avec son investissement à 2,5 millions d’euros (dont 15 % de subventions). Entre la prochaine autorisation européenne de la désalcoolisation dans le cahier des charges bio et la demande de descendre à 6°.alc en IGP Atlantique pour s’ouvrir à d’autres moments de consommation, l’unité devrait voir s’ouvrir rapidement de nouvelles pistes de développements souligne le directeur de Bordeaux Families.
Dry January
Faisant l’actualité viticole, le vin désalcoolisé doit encore transformer l’essai en passant des fortes croissances aux parts de marché conséquentes. Avec un outil dimensionné pour traiter 30 000 hl, la désalcoolisation pourrait représenter 15 à 20 % de la production de l’union coopérative (220 000 hl). De quoi poursuivre sa diversification, le succès des crémants de Bordeaux lui permettant de réduire la crise qui touche fortement le vignoble des bordeaux rouges. Où le vin sans alcool est actuellement un sujet épidermique avec le mois de sobriété Dry January… Un sujet pris avec pragmatisme par Philippe Cazaux : « nous sommes producteurs de vin et ça ne nous fait pas plaisir, mais qu’on apprécie ou pas, ça ne changera pas les choses. Autant mettre à profit ce moment en proposant d’autres produits à base de vin. Le Dry January met sous les projecteurs les vins sans alcool, en tant producteur de no-low c’est une bonne chose. Cela fait partie des effort du vin pour aller vers d’autres moments de consommation. Sinon, on laisse la place à d’autres boissons. »