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Le flux migratoire des cépages, "sujet sensible" pour les vins AOC
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Pillage de cépages ?
Le flux migratoire des cépages, "sujet sensible" pour les vins AOC

Si les vins AOC sont ouverts aux nouveaux cépages et au déplacement vers le Nord de leur répartition géographique, le débat est loin d’être fermé sur l’enracinement patrimonial, et exclusif, de certains d’entre eux.
Par Alexandre Abellan Le 04 décembre 2023
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Le flux migratoire des cépages,
Très protectrice de ses cépages, l’Alsace a mis le feu aux poudres avec ses demandes de tester des cépages emblématiques d’autres vignobles. Alimentant une crainte de détournement de notoriété pour les uns, ou ouvrant des perspectives de nouveaux cépages secondaires pour les autres. - crédit photo : Adobe Stock (CPD-Lab)
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n cette période de changement climatique, de transition agroécologique et de bouleversement des consommations, les réflexions philosophiques ne manquent pas pour les vins d’appellation. S’étant penché ce jeudi 30 novembre sur la question de la place des vins désalcoolisés dans l’univers AOC, le comité national des appellations d'origine relatives aux vins d’appellation de l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO) a préféré reporter à février ses discussions de fond sur l’expérimentation des Variétés d’Intérêt à Fin d’Adaptation (VIFA), et sur la possibilité d’implanter dans de nouveaux terroirs AOC des cépages attachés historiquement à un vignoble d’appellation (la question des cépages emblématiques). « Nous avons traité uniquement du dossier des VIFA en Côtes de Provence, le plus mûr, avec 4 nouveaux cépages » rapporte Christian Paly, le président du comité national des vins AOP.

Ne voulant pas bâcler les débats, le vigneron de Tavel (Gard) est clair : « la migration des cépages emblématiques est un dossier important. Le débat s’annonce long et riche. Disons-le clairement, c’est un sujet sensible : des régions voient d’un mauvais œil que des cépages emblématiques puissent migrer dans d’autres régions comme VIFA. » Si lors de la naissance du concept VIFA en 2018 un pacte de non-agression entre AOC était évoqué (avec l’impossibilité de tester des cépages emblématiques d’autres appellations), la formalisation de cet accord n’est pas aussi clair (l’INAO n’ayant pas de doctrine en la matière). Il faut désormais fixer un cadre réunissant les AOC indique Christian Paly.

Il n’y a pas de sujet de cépages emblématiques

Pouvant être considéré comme le père des VIFA, en tant que président des travaux les ayant mis en place, Philippe Brisebarre a un avis tranché sur la question : « pour moi, il n’y a pas de sujet de cépages emblématiques. Il existe des vins AOC emblématiques, pas des cépages emblématiques. » N’ayant pas assisté à la réunion du 30 novembre du comité national des vins AOP, le président du conseil permanent de l’INAO relève que les modalités expérimentales des VIFA limitent les risques de réappropriation de cépages emblématiques. Les domaines testant l’un de ces cépages d’intérêt devant le limiter à 5 % de leur encépagement et 10 % de leur assemblage pour pouvoir revendiquer l’AOC testant ce VIFA (qui ne peut être étiqueté). « Les limites de pourcentage et d’étiquetage font qu’il n’y a pas de problème » estime Philippe Brisebarre.

Pour le vigneron de Vouvray (Indre-et-Loire), « il y a des régions qui se sont appropriées certains cépages, sans que ce soit négatif. Il y a relation intime, mais le cépage ne leur appartient pas. » Et de citer l’exemple des essais comme Vifa du cépage portugais touriga nacional à Bordeaux : « les vignerons portugais disent bravo, c’est une forme de reconnaissance et de validation de leur cépage ». Mais la demande bordelaise de VIFA en 2020 s’était heurté à un refus : pas de test possible du petit manseng en AOC Bordeaux, à la satisfaction des vignerons du piémont pyrénéen s’étant mobilisés à l’époque pour protéger un cépage emblématique du Sud-Ouest.

Refus de petit manseng et de blanc-seing

Pour Philippe Brisebarre, le blocage du petit manseng à Bordeaux n’était pas politique mais technique : « ses baies ne pourrissent pas, alors que les liquoreux de Bordeaux ont cette identité. Ce n’est pas le même cas si l’Alsace le demande pour ses vendanges tardives. » Pourtant protectrice de ses cépages faisant sa typicité, l’Alsace demande justement à tester le petit manseng, ainsi que le chenin (emblématique du Val de Loire), le malbec (Cahors), la syrah (vallée du Rhône)… Et même le vermentino, cépage blanc qui a la cote, mais ne peut plus être étiqueté ainsi, pour respecter la réglementation européenne protégeant l'existence d'une appellation italienne. Déjà complexes, ces questions patrimoniales se doublent de réflexions agronomiques et d'adaptations climatiques rappelle Philippe Brisebarre : « planter du chenin dans le Jura n’est pas un sujet politique. Mais attention techniquement, ce cépage débourre plus tôt, il faut prendre des précautions pour les gels de printemps. »

Il n’y pas que l’AOC pour tester

« Le sujet n’est pas si simple » confirme Éric Chardourne, le président de l’Interprofession des Vins de Bergerac et de Duras (IVBD), qui siège au comité national des vins AOP et note que l’« on peut penser que c’est une bonne idée de remonter les cépages, d’en mettre des plus tardifs ou précoces pour répondre au besoin de s’adapter, mais les conséquences sont multifactorielles. » Comme pour les vins désalcoolisés, « il faut essayer pour voir. Il faut prendre temps. Et on a tout pour expérimenter dans le vignoble, il n’y pas que l’AOC pour tester. On peut imaginer d’autres créneaux (comme l’IGP). Tout le monde convient que la viticulture de demain ne sera pas celle d’hier. La question de la propriété du cépage paraît dépassée. » Mais pas encore tranchée.

 

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Tous les commentaires (1)
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Albert Le 06 décembre 2023 à 19:07:52
Que les productions sous statut AOP pensent à faire évoluer leur encépagement, je le conçois et l'accepte. Mais il me semblerait parfaitement inacceptable de continuer à se revendiquer de l'ancienne AOC (reconnue AOP) dès lors que l'évolution de l'encépagement autorisé écarte de facto les vins "modernes" du profil ante. La filière ne pourra pas s'avancer sur un fil : avec l'AOP, elle a surtout acquis la protection juridique de l'UE mais il lui sera impossible de maintenir ce lien fragile avec le statut de l'AOC dont un décret fixait les conditions de production. Il faudra nécessairement qu'un débat de fond soit engagé au sein des Instances de l'INAO : quel sens y aurait-il à faire croire au consommateur qu'en 2027 - par exemple - un vin AOP de dénomination X pourrait continuer à être proposé en tant qu'AOC X alors que plusieurs nouveaux cépages auraient été introduits dans le CDC AOP ? ..
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