Nous sommes si fort dans les mêmes intérêts, qu'il n'est pas possible que cela ne fasse une liaison toute naturelle » écrivait madame de Sévigné en 1689. De quoi résumer l'esprit collectif d'un comité de liaisons fructueuses entre interprofessions du vin et représentants de la grande distribution ? Échangeant depuis la fin 2023, le Comité National des Interprofessions de Vins à Appellation d'Origine et à Indication Géographique (CNIV), la Fédération du commerce et de la distribution (FCD) et la Fédération du commerce coopératif et associé (FCA) actent la création d’un comité de liaison. Validée ce jeudi 16 mai 2024, « en présence de représentants d’enseignes » précise un communiqué diffusé ce mercredi 12 juin. Après une série de manifestations vigneronnes dans les linéaires de la Grande Distribution (GD) dénonçant de trop bas prix ce début d’année 2024 (à Bordeaux et dans le Languedoc), CNIV, FCD et FCA veulent « poser les bases d’une coordination entre eux » avec la volonté « d’assurer des rencontres régulières et la conduite de travaux collaboratifs qui seraient jugés nécessaires » sur un rythme trimestriel.
Représentant la moitié des volumes de vins commercialisés en France, la GD assume ainsi une unité de destin avec la filière vin. La feuille de route du comité de liaison passe de la mutualisation de « données économiques pertinentes permettant […] des échanges sur les tendances des marchés » à « un examen critique de l’évolution des marchés concurrents et les stratégies des autres pays producteurs », sans oublier des « expériences de mise en avant innovantes du vin auprès des consommateurs afin d’identifier des leviers de redynamisation des ventes ».


N’évoquant qu’« un lieu d’échange sur les dossiers susceptibles de concerner l’ensemble des parties prenantes », le comité de liaison ne précise pas les pistes de travail pour la rémunération ou la contractualisation des vins. « L’objectif du comité de liaison est d’avoir un lieu d’échange pour décider des sujets qui peuvent donner lieu à une collaboration » indique le CNIV à Vitisphere. Alors que la dissolution de l’Assemblée Nationale ce dimanche 9 juin et la tenue d’élections législatives anticipée ces 30 juin et 7 juillet suspendent les travaux sur une possible loi Egalim 4 adaptée à la filière vin, « les travaux sont engagés et se poursuivront » ajoute le CNIV, pour qui « la dissolution n’aura pas d’impact – la création de ce comité de liaison relève d’une décision des professionnels pour travailler ensemble ».
En parallèle de ce cadre national, des initiatives locales cherchent à nouer un dialogue entre opérateurs du vin et grande distribution après les manifestations de colère de l'hiver, notamment dans le Midi avec l’interprofession des Pays d’Oc, représentée par son vice-président Jacques Gravegeal ou des caves coopératives languedociennes, avec la figure biterroise Martial Bories. À Bordeaux, depuis la réunion du 8 avril entre filière et GD, le sujet est porté nationalement : « par soucis d'efficacité nous fédérons nos réflexions au sein du CNIV, portant, pour l'heure, la voix des deux régions engagées à ce jour : Bordeaux et Côtes du Rhône » expliquait ce 29 avril Allan Sichel, le président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB), qui annonçait « travailler sur un accord de filière qui pourrait définir un cadre de fonctionnement adapté » afin d’« aboutir à un dispositif conforme à l'esprit de la loi Egalim et adapté aux spécificités de notre filière ».