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"Certains veulent purement et seulement interdire le vin : il faut résister"
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Franck Leroy
"Certains veulent purement et seulement interdire le vin : il faut résister"

De la pression hygiéniste aux provocations de Trump en passant par l’écotaxation des poids lourds, le point sur les enjeux de la filière vin avec Franck Leroy, le président de la région Grand-Est (vignobles d’Alsace, de Champagne et de Lorraine) qui vient de prendre la présidence de l'Assemblée des Régions Européennes Viticoles (AREV) et reste particulièrement impliqué pour la filière vin (ayant été 20 ans le maire d’Epernay).
Par Alexandre Abellan Le 24 mars 2025
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'Comme dans tous les domaines, des positions excessives sont nuisibles et c’est dans le dialogue que l’on trouver la voie de la raison' plaide Franck Leroy. - crédit photo : Région Grand-Est
L

a région Grand-Est vient tout juste d’adhérer à l’AREV et en prend déjà la présidence. Est-ce le signe d’un intérêt fort pour viticulture et enjeux européens ?

Franck Leroy : D’abord, c’est une élection sans adversaire. Je veux dire par là qu’il y a un espèce de roulement qui est organisé au sein de l’AREV et que l’on partage tous le même combat, à savoir la volonté de protéger ce patrimoine culturel, économique et identitaire qui caractérise les régions viticoles. L’AREV, c’est 41 régions unies, c’est 45 % du vignoble mondial, c’est 75 % des exportations mondiales de vin avec des pays comme l’Italie, l’Espagne, la France, le Portugal, l’Allemagne, l’Ukraine, la Hongrie et bien d’autres qui partagent depuis des siècles cette tradition viticole.

Aujourd’hui, nous évoluons dans un monde compliqué. Dans l’actualité récente ce sont les menaces de taxations (aux États-Unis), la menace environnementale (le changement climatique bouleverse la vie de certains vignobles) et des évolutions sociétales importantes (le consommateur a d’autres exigences). Avec certains qui veulent purement et seulement interdire le vin : il faut résister et on est plus fort quand on résiste ensemble.

 

Le plus chaud bouillant de ces dossiers concerne les menaces de taxes américaines de 200 % brandies par le président Donald Trump. L’exposition récurrente de la filière des vins et spiritueux français aux conflits commerciaux est-elle due à des erreurs stratégiques et diplomatiques de la Commission Européenne ?

Peut-être que la viticulture est ciblée par erreur de la Commission européenne, mais je crois surtout que c’est un symbole de l’Europe. Quelque part, ses vins, sa gastronomie et son art de vivre sont l’une de ses grandes fiertés. Il y a beaucoup de provocation derrière tout ça et tout ne se fera pas. Depuis l’accession de la présidence Trump, les déclarations fracassantes se sont multipliées et ne se sont pas toutes réalisées. Il ne faut pas s’arrêter au pied de la lettre, mais il faut prendre cette menace comme étant une menace réelle pour être en pression auprès des commissaires européens afin que le vin ne soit pas pris pour cible. Dans une phase où tout le monde montre ses muscles, il faut se mettre autour de la table et trouver une issue à cette période de tensions commerciales.

 

L’exemple de l’enquête antidumping chinoise sur les cognacs et armagnacs montre que des dossiers importants pour une région peuvent s’enliser diplomatiquement et pénaliser économiquement…

C’est pour ça qu’il faut prendre au sérieux ces menaces, appeler au dialogue et au retour à la raison. Tous les économistes disent unanimement que partir dans une guerre de taxations à outrance pénaliserait tout le monde. Nous vivons dans un monde qui s’est construit sur le multilatéralisme et des échanges économiques globalement régulés. Donner un coup de pied dans ce système c’est prendre d’énormes risques.

 

En termes de régulations, la Commission Européenne travaille actuellement un paquet réglementaire pour avril devant permettre la gestion du potentiel production.

On se félicite du travail engagé et des relations établies avec le nouveau commissaire européen à l’Agriculture, Christophe Hansen. La viticulture reste un grand secteur économique à l’échelle de l’Europe, il ne faut pas l’oublier. Réduire l’économie viticole à une menace sur la santé c’est complémente absurde et très excessif. Il faut évidemment prôner une consommation responsable partout. On l’a toujours fait. Qui sont les principales victimes d’une consommation excessive d’alcool ? Les marques elles-mêmes, qui souffrent des débordements qui peuvent être observées ça et là. évidemment, il faut de l’éducation par des campagnes de modération. Comme dans tous les domaines, des positions excessives sont nuisibles et c’est dans le dialogue que l’on trouver la voie de la raison.

 

On voit des menaces européennes récurrentes ciblées le principe de consommation raisonnée de vin, avec l’idée d’absence de niveau de consommation d’alcool sans risque (le no-safe level de l’OMS).

Je pense que certains des médecins qui prennent des positions très dures sur l’alcool ne refusent pas un verre de vin lors de dîners privés. Il faut éviter les positions outrancières et définitives. On ne peut pas faire de nos sociétés des sociétés d’interdit. D’abord parce que ce n’est dans le tempérament de personne d’être docile et de tout accepter. La règle doit rester la liberté, ce qui passe par la connaissance et la responsabilité des individus.

 

Concernant les préconisations du Groupe à Haut-Niveau sur les politiques vitivinicoles qui alimentent le projet réglementaire de la Commission ce printemps, il y a le retour de l’arrachage définitif : est-ce un outil que vous soutenez alors que vous êtes élu et ancré dans des vignobles (Alsace, Champagne et Lorraine) ayant moins de difficultés que d’autres (Bordeaux, Languedoc, vallée du Rhône…) ?

D’abord, c’est la responsabilité des régions et des interprofessions de faire face à des situations très contrastées du Nord au Sud de l’Europe, de l’Est à l’Ouest. Il y a malheureusement des vignobles dans lesquels la question de l’arrachage est aujourd’hui d’actualité. Et ce sont les professionnels qui le réclament. Donc on n’est pas là pour avoir une position uniforme. L’Europe, c’est la diversité. La vigne se porte plutôt pas mal dans certaines zones comme les vignobles du Nord du pays (je pense à l’Alsace, à la Champagne et d’autres), mais il y a aussi des difficultés et il faut de la vigilance (la consommation globale de vin diminue et les résultats 2024 ne sont pas très bons sans être catastophiques). La solution chez l’un ne sera pas forcément la solution chez l’autre. Idem pour les situations climatiques, on parle de la nécessité d’irriguer chez certains pour combattre la sécheresse extrême, alors que chez nous l’année dernière nous avons été plutôt victimes d’une surabondance d’eau. Il faut laisser à chaque filière le soin de trouver et d’apporter des solutions avec les régions en appui qui doivent jouer un rôle d’appui politique.

 

Un appui est justement demandé par le vignoble pour soutenir les moyens de production, notamment les phytos, avec des enjeux sur le cuivre, les Zones de Non-Traitement (ZNT) ou les Nouvelles Techniques Génomiques (NGT).

Oui, parce qu’il y a d’un côté la nécessité de limiter les intrants (nos vignobles progressent depuis des années) et de l’autre le consommateur le réclame (il faut y être attentif comme il s’agit des débouchés). Certaines régions se sont engagées plus vite que d’autres. Et il y a l’apparition de menaces nouvelles avec le changement climatique. À nous d’accompagner ces évolutions et ces trasnitions par la recherche et innovation. C’est une nécessité politique d’assurer l’accomapgneent : aux niveaux de la région, du national et de l’Europe.

 

Au niveau régional, vous êtes un élu de terrain mobilisé pour le vignoble qui s’inquiète de la mise en place d’une éco-taxation sur les camions dans le Grand-Est qui pénaliserait les acteurs économiques, dont les expéditions de vins alsaciens et champenois.

Il y a deux sujets. D’une part l’écotaxation telle qu’elle est vécue en Alsace et l’écoredevance sur l’Ouest de la région. Ce sont deux autorités différentes qui mènent leurs dossiers partant d’un même constat : l’état de nos routes se dégrade de manière accélérée par manque d’investissement. L’État n’a plus les moyens et nous proposons à notre échelle de prendre le relais en ayant l’autorisation de lever une redevance. Notre région a la spécificité d’avoir des frontières avec la Suisse, l’Allemagne, le Luxembourg et la Belgique : quatre pays qui pratiquent l’écoredevance. Sur certains axes, comme la RN4, nous supportons un trafic international de poids lourds qui représente 60 à 85 % du trafic. C’est bien un trafic de transit. Je ne vous cache pas que le tonnage des camions est responsable de la dégradation des routes et ouvrages d’art. L’idée est de taxer dans le but d’améliorer l’état des routes.

Si l’on ne fait rien, dans 5 à 10 ans on sera obligé de fermer certains ouvrages d’art qui menacent de s’effondrer aujourd’hui. On bloquera les routes et on se dire que l’on n’a pas agi. Ou alors on prend notre responsabilité et on lève une écoredevance qui sera intégralement affectée aux routes. Quand on parle en ces termes-là au monde économique, les entreprises voient le problème autrement. Il y a un vrai sujet d’amélioration de la mobilité sur nos territoires et la réponse que nous apportons ne fait certes pas plaisir à entendre dans son moyen de taxation des poids lourds, mais c’est aujourd’hui le seul moyen de sortir d’une situation qui va nous amener à fermer des portions entières de route nationale si l’on ne fait rien.

Ce n’est pas un impôt, mais une contribution à la modernisation des routes. Nous sommes en train de mener une étude d’impact et si des secteurs économiques sont pénalisés et perdent de la compétitivité, nous serons là pour les aider à investir et à passer sur des camions à faibles émissions. Des aides à l’investissement seront mises en place.

 

Quel est le calendrier de ces écotaxes ?

On s’oriente vers une mise en place de l’écoredevance en 2027.

 

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