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30 g/hl max de gomme arabique irrite vignerons et œnologues
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Stabilisation
30 g/hl max de gomme arabique irrite vignerons et œnologues

Depuis le début de l'année, l’utilisation de la gomme arabique est limitée à 30 g/hl dans les vins. Une nouvelle contrainte, instaurée sans délai, qui agace et irrite bien des œnologues et vignerons.
Par Michèle Trévoux Le 04 février 2025
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30 g/hl max de gomme arabique irrite vignerons et œnologues
Julien Rivière, vigneron sur 30 ha à Saint-Martin-de-Sescas ajoutait entre 45 et 60 g/hl de différentes gommes pour stabiliser la couleur de ses rouges et arrondir les tanins. Avec la limitation à 30 g/hl, il ne sais pas encore comment il va faire. - crédit photo : DR
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’est la mauvaise surprise de ce début d’année. Le 29 décembre 2024, en pleine trêve des confiseurs, l’Europe plafonne à 30 g/hl la dose de gomme arabique que l’on peut ajouter aux vins. « J’ai été très surpris de découvrir cette réglementation début janvier car aucune information n’avait filtré auparavant. Or cette décision remet en cause nos pratiques. Avec les produits liquides dosés à 24 % de gomme que nous utilisons, nous sommes souvent à 25 cl/hl sur les vins rouges, soit 60 g/hl de gomme. Cette nouvelle règle nous limite donc à 13 cl/hl. Et on apprend ça au dernier moment, alors que les vins sont déjà prêts pour la mise et que la gomme arabique est le dernier recours pour les peaufiner », peste Valentin Ledys, technicien au Laboratoire d’Analyses du Groupe AEB.

"On ne stabilise pas la couleur avec 30 g/hl"

Matthieu Rey, Å“nologue conseil au laboratoire d’Å“nologie Gauthier à Sauveterre de Guyenne, est tout aussi agacé. « Cette décision a été prise sans aucune concertation avec les professionnels. Le texte européen a repris la recommandation de l’OIV, qui est basée sur des études vieilles d’une dizaine d’années. Or avec le réchauffement climatique, les vins rouges sont plus riches en tanins et polyphénols. Certains cépages comme le petit verdot ou certaines pratiques Å“nologiques comme la thermo accentuent la concentration en matière colorante. On obtient des vins avec des IPT entre 80 et 100 dont on ne stabilise pas la couleur avec 30 g/hl. Et dans bien d’autres cas, il faudra choisir entre stabilisation de la matière colorante, faculté des gommes verek, et enrobage des tanins, que l’on obtient avec les gommes Seyal. Or le marché réclame des vins plus ronds et plus souples. Cette limitation va à contre-sens de cette tendance », déplore-t-il.

Pas de produit de remplacement aussi efficace et bon marché

Chez les vignerons bordelais, la nouvelle passe tout aussi mal. Xavier Lumeau gère avec son père et sa sÅ“ur une propriété familiale de 150 ha de vigne à Sauveterre de Guyenne. Il produit 90 % de rouge, le reste en blanc. « J’élabore des vins concentrés et tanniques. J’utilise la gomme arabique quasiment systématiquement pour stabiliser la couleur de mes rouges. Sur notre 100% petit verdot, il nous en faut 40 g/hl. Le problème, c’est que nous n’avons pas de produit de remplacement aussi efficace et bon marché », s’inquiète-t-il.

Pour Julien Rivière, vigneron sur 30 ha à Saint-Martin-de-Sescas, se gratte la tête. « Je ne produis que des rouges, à base de merlot et cabernet sauvignon. J’extrais énormément pour avoir des vins riches et concentrés. Du coup, j’ajoutais entre 45 à 60 g/hl de différentes gommes, jusqu’ici, pour stabiliser la couleur et arrondir les tanins alors même que je pratique la micro-oxygénation avant malo pour arrondir les tanins. Je ne sais pas comment je vais faire pour stabiliser mes vins ».

Vigilance avec les embouteilleurs à façon

En Languedoc, Nicolas Dutour, Å“nologue conseil au Laboratoire Dubernet, est moins inquiet. « Il nous est arrivé d’ajouter jusqu’à 40 g/hl mais jamais au-delà. Le plus souvent, on se situe entre 10 et 30 g/hl. Il faut d’ailleurs éviter le surdosage qui peut provoquer une remontée tannique. Il va falloir être vigilant avec les embouteilleurs à façon, car ce sont eux qui ajoutent la gomme ».

Jacques Trannoy, Å“nologue conseil basé à Carcassonne et spécialisé dans la préparation des mises en bouteille le rejoint. « Il y a 15 ans, j’ai fait une série d’essais avec 15 gommes à trois doses différentes. Avec certaines d’entre elles quelle que soit la dose, les vins traités étaient moins bons que le témoin. Depuis, je travaille sur les collages pour ne plus avoir à utiliser de gomme. Je n’en utilise que sur les vins jeunes. Et je n’atteins quasiment jamais la limite »

Même discours pour Guillaune Valli, directeur du centre Å“nologique ICV de la Vallée du Rhône. « Nous utilisons la gomme arabique à faible dose, essentiellement pour gommer les sensations tanniques. Suite à l’obligation d’étiquetage des ingrédients, nos clients nous ont demandé de réfléchir à des alternatives. Nous avons obtenu de très bons résultats avec des autolysats de levures à libération rapide qu’on l’utilise à 10 g/hl, ce qui revient à 0,40 €/hl. On a également réfléchi à tous les leviers à mettre en Å“uvre pour tamponner la masse tannique : de la date de récolte au pilotage des macérations, en passant par l’utilisation de l’oxygène et des lies. Il y a des solutions pour limiter l’usage de la gomme arabique, mais elles nécessitent de l’anticipation ».

Une décision incomprise

Pourquoi plafonner à 30 g/hl l’ajout de gomme arabique dans les vins alors que ce produit est largement utilisé dans l’agroalimentaire et sans danger pour la santé ? C’est la question que de nombreux professionnels se posent. « Jusqu’alors, ce plafond était une recommandation de l’OIV (Organisation Internationale de la Vigne et du Vin commente Stéphane La Guerche, directeur général d’Oenoppia, l’association des producteurs de produits Å“nologiques. L’Europe s’est s’alignée sur cette recommandation comme elle le fait pour toutes les pratiques Å“nologiques. Dans sa résolution, l’OIV explique que cette limite vise à « préserver l’authenticité et l’identité des produits vitivinicoles ». En clair, c’est l’utilisation des gommes enrobantes qui est visée. « La gomme arabique n’est autorisée que pour la stabilisation de la couleur. Mais dans les faits, les gommes type seyal servent à arrondir les tanins, poursuit Stéphane La Guerche qui reconnaît que les experts n’ont sans doute pas perçu l’impact de l’instauration d’un plafond.

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Tous les commentaires (5)
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ALAIN Le 01 mars 2025 à 08:27:12
la stabilisation de la matière colorante ne peut être résumée uniquement à l'addition de gomme arabique. L'option d'un collage ciblé dans le cadre de la préparation à la mise en bouteille est un complément pertinent et efficace. Parallèlement ce collage peut permettre de lisser les "aspérités organoleptiques" liées aux tanins réactifs. Le duo collage - gomme arabique à la dose limite fixée, peut répondre aux objectifs recherchés
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RK Le 01 mars 2025 à 08:22:33
L'article recense uniquement les commentaires de vignerons old school produisant des vins pour la Grande Distribution. L'ajout massif de gomme arabique c'est ce que la GD recherche. Je ne connais aucun vigneron qualitatif valorisant ses vins en France ou à l'export utilisant plus de 30g/hl de gomme arabique.
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Arnaud Immélé Le 07 février 2025 à 11:52:55
Tout a fait d'accord : gomme arabique, pourquoi créer cette limite à 30g/hl ? En quoi 50 g/hl serait préjudiciable par rapport à 30g/hl ? Personne n'a rien demandé, ni le consommateur , ni les pros du vin . C'est l'art d'inventer des solutions à des problèmes qui n'existent pas ! Faudrait peut-être que l'oiv s'empare de vrais problèmes !
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Renaud Le 07 février 2025 à 08:34:00
Que l'on cela pertinent ou pas. Le sujet est l'opacité de la démarche. C'est un sujet non discuté par la filière bordelaise en tout cas. Je ne crois pas en choix délibéré de sa part mais peu visible dans un monde en révolution profonde. Je pense que c'est plutôt symptomatique de travaux en commission hors sol où les urgences terrains sont tout à fait abstraites. Pour commercer du vin dans le monde entier je vous confirme que le sujet gomme arabique n'existe pas. Mais attendons qq temps les théoriciens des commissions vont bien justifier leur travail?..
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Antoine SAMENAYRE Le 05 février 2025 à 10:22:54
Je suis particulièrement surpris par les témoignages choisis et les éléments de langage retenus, qui donnent l'impression qu'en Gironde, on ne produirait que des vins très riches et très tanniques, et que l'on ne saurait travailler sans de fortes doses de gomme. Cette vision est non seulement réductrice, mais aussi incorrecte. En Gironde, de nombreux vignerons, techniciens et œnologues adoptent des pratiques plus nuancées. Ils procèdent fréquemment à des collages pour affiner leurs vins, et ne recourent pas systématiquement à des doses élevées de gomme pour stabiliser des vins trop extraits. De plus, le déroulement de l'article donne l'impression qu'il y a une volonté, consciente ou non, de chercher à opposer les régions viticoles françaises, en sous-entendant que certaines ont des pratiques plus vertueuses que d'autres... C'est sûrement juste le fruit du hasard des témoignages choisis et une vue de l'esprit.
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