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"Si l’on mise sur l’ouverture de bouteilles de Bordeaux le dimanche midi pour belle-maman, on est tous morts"
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Parole de négociant
"Si l’on mise sur l’ouverture de bouteilles de Bordeaux le dimanche midi pour belle-maman, on est tous morts"

La résolution des défauts commerciaux du vin de Bordeaux, ce sont encore les négociants qui en parlent le mieux : le point avec le directeur de la maison A. de Luze.
Par Alexandre Abellan Le 31 mai 2024
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Un enjeu pour la filière est de « ne pas produire ce que l’on aime, mais ce qui est apprécié par les consommateurs » souligne Xavier Migeot, ce 29 mai à Vinexpo Asia. - crédit photo : Alexandre Abellan
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ans le commerce, il faut connaître à fond les forces et les faiblesses de ses produits pour réussir à bien les vendre. Quitte à tirer des constats désagréables, mais nécessaires pour se repositionner et regagner des marchés : « la marque Bordeaux est très forte internationalement, mais elle a le défaut d’être monolithique, alors que les instants de consommation sont pluriels » pose Xavier Migeot, le directeur général de la maison A. de Luze (propriété de la famille Castéja). Le négociant en veut pour exemple la tendance du no-low, qui se définit par l’absence de profil type dans ses consommateurs : il n’y a pas un acheteur exclusif, mais évolutif selon les jours, les humeurs, les envies…

Face au « monolithe puissant » du vin de Bordeaux, « je suis convaincu qu’il faut apporter des aspérités » en diversifiant les produits et donc les instants de consommation martèle Xavier Migeot. Car « si l’on mise tous sur l’ouverture de bouteilles de Bordeaux le dimanche midi pour belle-maman, on est tous morts. Il faut répondre aux attentes du consommateur » développe le négociant d’origine bourguignonne, l’illustrant par l’abandon de la mention « élevé en barriques » sur les étiquettes, cette précision n’étant pas vendeuse. Au contraire même, l’étude du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB) sur le profil des vins bordelais indique que les consommateurs n’aiment pas entendre de vins boisés, même si ce sont des profils qu’ils apprécient au final…

Se donner la capacité de se diversifier

Répétant que « Bordeaux est un monolithe puissant », Xavier Migeot souligne que c’est aux opérateurs girondins de le doter de points d’accroche pour dégager de nouvelles approches de consommation. Alors que les relations entre viticulture et négoce sont tendues, « nous sommes tous dans le même bateau. Il faut adapter l’offre du vignoble et du négoce. On ne peut pas produire un seul type de Bordeaux » désamorce le négociant, indiquant que sur un même domaine il faudra avoir des vins rouges classiques, des vins rouges plus légers à boire frais (y compris avec les travaux actuels sur les clairets), des vins de cépages, des rosés répondant aux attentes, des vins blancs, des crémants… Et alors qu’« il y a des AOP à vil prix pour tout le monde (personne ne gagne sa vie avec, dans le négoce et la viticulture) pourquoi pas arrêter de tout mettre en AOP Bordeaux pour redonner de la profondeur de gamme » avec des IGP Pays de l’Atlantique et/ou des vins de France (donnant plus de latitudes sur la sucrosité, les cépages…). « Il faut se donner la capacité de se diversifier. Demain on ne proposera pas le Bordeaux, mais les Bordeaux » pointe ce fan de la dernière campagne de communication du CIVB, qui « permet casser les codes et se rapprocher du consommateur ».

Cuvée programmatique
Mettant en application ses conseils, la maison A. de Luze vient de commercialiser ce printemps 6 000 bouteilles d’un bordeaux rouge bio plus rond et frais dans son style organoleptique, et encore plus modernisé dans son packaging : une étiquette dans le style d’un tarot (par l’illustratrice Alice Bottiglieri) avec un nom cryptique (88-89, en référence à l’adresse historique du négociant sur les quais de Bacalan), une bouteille réemployée (via EcoInPack en Charente), un bouchon marqué à chaud (et pas à l’encre), l’absence de capsule… Et d’autres tirages sont prévus, y compris en blanc pour continuer de décloisonner et d’actionner les leviers de différenciation avec cette cuvée programmatique. De quoi donner du travail au négoce, représenté par de besogneuses fourmi sur l’étiquette. Réfutant l’idée de cigales négociantes faisant leur beurre sur les fourmis vigneronnes, Xavier Migeot fait état d’un négoce au travail : « je suis confiant, ça va finir par fonctionner. Mais le timing est court pour les vignerons qui sont dans le dur immédiatement ».

Se définissant comme un opérateur conséquent, mais modeste, la maison A. de Luze réalise un chiffre d'affaires de 45 millions € (dont 40 % pour les grands crus).

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Tous les commentaires (6)
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Viticulteur libre Le 06 juin 2024 à 17:35:10
Quelle bonne surprise, une maison de négoce de prestige se remet en question et veut élargir sa gamme. Le consommateur a besoin de nouveautés au niveau de la vinification et des cépages . On est séduit par des vins fruités légers, élégants, tout le contraire des vins élaborés à Bordeaux. On s étonne de la mévente. Le viticulteur qui veut bien nover en matière de vinification ou de cépages se fait immédiatement taper sur les doigts. Répression des fraudes, douanes, France Agrimer, ODG, etc? sans parler du sacro saint Civb. La consommation repartira si on offre aux consommateurs du nouveau. Analysez l essor du Prosseco 900 millions de bouteilles. Il faut sortir de nos contraintes d encépagement et laisser libre le viticulteur. Pensez au Verdejo, Alvarino, Godello interdit en France et autorisé en Europe. D après une étude le goût du consommateur évolue et change tous les 20 ans ( durée de vie d une vigne)
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VignerondeRions Le 03 juin 2024 à 19:58:28
Je partage à 100% le besoin de coller à la demande, Bordeaux vends des vins dans le monde depuis des siècles, bien avant qu'on invente l'AOC. Or l'AOC si elle précise des délimitation géographique, parcellaires, voir intra parcellaire, ainsi que le savoir faire de la région concerné, n'a jamais eu pour but de scléroser toute évolution contrairement à ce que l'on nous raconte éternellement. Il faut convaincre des gens qui se vivent comme nos concurrents direct au sein de l'organisme, à savoir les représentants des autres régions viticoles. C'est la logique perdant/perdant, on va pas autoriser Paul à faire un truc nouveau, ou différent, parce qu'on n'y crois pas et que si jamais ça marche, cela pourrait nous piquer des clients ou lui faire prendre de l'avance (véridique et entendu de mes oreilles). Donc on ne fait rien comme ça personne n'est avantagé (pour preuve, il y a des années l'utilisation des copeaux, n'a jamais été décidé, elle s'est imposée faute de choix, par défaut.) Aujourd'hui, Bordeaux doit proposer d'autres types de vin, et pour le faire rapidement il faut que l'appellation regionale quitte l'AOC pour l'IGP. Il n'y a pas de honte à cela, d'autres que moi le pense aussi, et feu le président Renou l'avait imaginé. Au delà de l'offre produit, c'est aussi une nouvelle segmentation de prix qui peut s'ouvrir, et tout le monde serait gagnant dans cette histoire. Le surnom de Bordeaux c'est la belle endormie, alors avant de réveiller tout le monde, c'est pas gagné. On nous suggère de faire du vin de France, du pays de l'Atlantique, sauf que desolé, mais ça ne parle pas aux clients comme Bordeaux et surtout c'est complètement délocalisable. J'aime bien la théorie de Darwin, c'est pas les plus gros qui vont survivre mais ceux qui sauront s'adapter, et Bordeaux est la plus grosse AOC, et pour le moment elle n'a pas de réelle volonté d'adaptation.
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Renaud Le 02 juin 2024 à 09:12:50
Pensez que Bdx est monolithique est délirant. Pour le consommateur non averti passe encore mais venant d'un responsable d'une grande maison c'est décevant. Certes l'ouverture des cahiers des charges nous permettrait d'être encore plus efficace mais nous ne sommes pas complètement sclérosé. Certes qualibordeaux est complètement hors sol et nous limite mais dans cet article j'y vois plus une autopromotion pour se mettre en avant en dévalorisant les autres qu'une volonté progressiste. Il peut dire que le torchon brûle au sein de la filière?.. il a les allumettes à la main.
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bill et boule Le 01 juin 2024 à 09:45:42
les 4 maisons de négoce de la famille casteja, dont la petite maison de luze ici interviewee , ont effectivement un rôle important à jouer pour la filière viti bordeaux et ce, des cet été 2024. Notamment compte tenu de son poids économique mais aussi de son influence politique exceptionnelle (tant au civb à l umb et bien entendu à la tête du cgc 1855 ). Si M Casteja donne un signal fort et stoppe l hyper premiumisation , de toute manière deja bien ralentie par cette sortie en primeur du 2023 au résultat approximatif, la filière aura deja fait un grand pas. Michel Rolland a déjà manifeste il y a quelque jours sa volonté de tourner la page , renoncer aux vins speculatifs et revenir sur des produits distributifs. Cette prise de conscience est salutaire mais elle doit s inscrire très rapidement dans les faits donc... des ce mois de juin 2024 ! La plupart des petits châteaux sont en effet desormais en apnée sur le plan de leur trésorerie ... et il faut désormais que les négociants reviennent à l achat de leurs lots ( à commencer par les ultimes 18 19 et 20 d excellente facture) . Depuis debut avril, Civb et préfecture restent cois sur cette absence de synergie producteurs / négociants, préférant se focaliser sur les rapports compliqués avec à gd . C est vrai que il était plus facile jusqu a present de blâmer des multinationales parisiennes plutot que des voisins du bouscat ou de cauderan ... Venons en aux faits desormais ... et travaillons ensemble à la reconquête des linéaires et des cartes en restauration ! Vite.
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Albert Le 01 juin 2024 à 09:42:07
Après avoir relu cet entretien, je souscris à la vision de Xavier Migeot. L'offre monolithique n'a plus de sens et, que ça plaise ou pas, réorienter une partie de la production vers des gammes "plaisir - fruit" déclinables sur 3 couleurs pourrait être un objectif atteignable, en changeant de registre statutaire > IGP Atlantique, voire VDF. Bien sûr, ces glissements ne seraient pas sans amener de gros changements (déstabilisation du CIVB par exemple). Mais une telle ouverture de l'offre ferait sens, tant pour rester cohérent avec le cadre AOC qui n'est plus modulable à l'envi (!), que pour enfin tenter de s'affranchir de cette vision "datée" que ce serait déchoir de ne pas "boxer" en AOC (ndlr : je suis plus qu'étonné d'observer cet attachement forcené au passage en AOC .. quel sens ça peut avoir de nos jours d'être adoubé par le Comité National si vous êtes une micro-AOC à la production confidentielle, invisibilisée par votre inclusion dans une aire d'appellation plus large ?). Bon, attendons qu'un vent de modernité, de lucidité souffle enfin.
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Albert Le 31 mai 2024 à 20:45:03
Cet exposé finit de me convaincre que cette obligation d'adaptation au goût du consommateur ne pourra qu'amener à poser la question : " est-ce que le statut AOC/AOP fondé notamment sur un savoir faire collectif aura encore un sens alors qu'il faudra que la filière sache "bouger" rapidement les lignes de ce pseudo savoir-faire ? .. le statut AOC/AOP ne pourra pas cocher bien longtemps les cases du savoir-faire "opportuniste" !
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