e projetant sur l’avenir des vins de Bordeaux, le forum technique de l’interprofession girondine s’ouvre ce jeudi 18 janvier par une mise en garde : « nous n’avons pas de boule de cristal pour connaître avec certitude la recette d’un marché des vins florissant en 2035. En revanche, avec une approche pluridisciplinaire, nous pouvons dessiner des tendances et des objectifs pour les atteindre » pose vigneron François-Thomas Bon, le président de la commission technique du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB). Parmi ces boussoles se trouve l’étude des profils produits que mène l’interprofession depuis 2021.
Se focalisant sur les vins rouges de Bordeaux d’entré de gamme, commercialisés entre 3 et 8 €TTC, l’étude a utilisé 20 vins de référence sur 143 proposés (sur les millésimes 2018 et 2019) pour les faires déguster par 240 consommateurs et 122 professionnels (selon le protocole de l’analyse sensorielle). Il en ressort que les profils sont particulièrement divers : boisés, complexes, fruités/floraux… Mais aussi que les points faibles ne passent pas inaperçus, avec certains vins parfois jugés évolués, oxydés, fatigués, dilués, aqueux, poussiéreux, phénolés, poussiéreux, peu intenses, amers, alcooleux, au boisé vert/planche… Si la sucrosité et le boisé vanillé sont globalement recherchés par les consommateurs, ces derniers rejettent le boisé vert, l’amertume, ou l’intensité tannique trop importante résume Brieuc de Larrard, spécialiste des études sensorielles pour l’institut d’études Eurosyn.


Concrètement, « on ne va pas conclure aujourd’hui [l’étude] comme on continue à travailler le sujet » pointe Laurent Charlier, responsable recherche au CIVB. Indiquant que les 20 vins choisis présentaient parfois des aspérités pour tester la sensibilité des consommateurs (défauts légers de caractères végétaux par exemple), le technicien retient que si le travail n’a pas encore permis de définir de pratiques reliés directement à un profil recherché par les consommateurs (vins équilibrés sans amertume, avec des tanins ronds et souples), il souligne l’importance de la qualité du raisin... Et le risque du moindre défaut : « on enfonce peut-être des portes ouvertes, mais on voit bien que les consommateurs perçoivent les défauts ». Ce que confirme Brieuc de Larrard : « les défauts sont bien perçus par les consommateurs. Dès que le vin est trop intense, avec des tanins ou de l’agressivité/acidité, le vin est rejeté. ». Sachant que les jeunes dégustateurs (18 à 45 ans) sont plus sévères que leurs aînés, « le recrutement de jeunes consommateurs passera par la présentation de vins sans défaut et correspondant au mieux à leurs attentes » souligne le cahier technique du CIVB sur cette étude.
Attentes passant par de la sucrosité, de la rondeur, un degré alcoolique inférieur 14°.alc… Et une forme d’empathie avec les attentes du consommateurs. Alors que l'étude pointe que des vins jugés trop légers par les professionnels sont plébiscités pour leur buvabilité par les néophytes, Laurent Charlier note que « ce qui plaît au consommateur, ce n’est pas forcément ce qui plaît toujours aux praticiens. Ce ne sont pas forcément les vins que l’on préfère qu’il faut élaborer pour les consommateurs. Il faut réfléchir la date de récolte en lien avec le degré, l’extraction maîtrisée/modérée avec la sélection des tanins et le boisé au service du produit. »
Sachant qu’une « évidence » reste que « la qualité vin passe d’abord par sa composante raisin » pointe le professeur Philippe Dariet, directeur de l’Institut des Sciences de la Vigne et du Vin (ISVV). Des conseils qui peuvent en partie s’étendre aux vins blancs. Directeur des achats pour Sovex Grandschateaux, Olivier Leblans, confirme qu’un degré d’alcool à 11-12,5 aura plus de succès pour un vin blanc que 13°.alc. Le négociant pointe que si l’obtention de vins aromatiques est généralisé à Bordeaux, la gestion de l’oxygène doit être plus rigoureuse pour les vins balncs.