amien Fumey est le premier à « pitcher » devant l’assemblée réunie par les clusters Vinseo et Digital 113 au Mas numérique ce 30 avril. « L’intelligence artificielle nous aide à créer un microclimat optimum pour la vigne » explique le responsable du pôle R&D de Sun’Agri.
Depuis 15 ans, l’entreprise a collecté des milliards de données pour développer des modèles qui ne soient pas seulement « énergétiques et basés sur le « tracking solaire »» mais véritablement « agronomiques » et permettent de piloter finement l’apport d’ombre ou l’effacement de ses panneaux solaires en fonction des besoins de croissance de la vigne et de la météo.
« A l’approche d’une gelée, les persiennes se mettent automatiquement à plat en fin de nuit pour augmenter l’effet de serre et maintenir un écart de +2°C dans les bourgeons des vignes protégées » illustre Damien Fumey. La même opération protège la vigne des gros coups de chauds. « Avec un écart allant jusqu’à -10°C de moins au niveau de la canopée et -30°C au niveau de la surface du sol » continue-t-il.
Damien Fumey cède la parole à Romain Girardot, ingénieur de recherches à l’Institut agro de Montpellier et nouveau responsable du Mas numérique. Il détaille les résultats du projet Celectiv mené en partenariat avec l’IFV pour cartographier finement les rendements à l’échelle intraparcellaire. « En équipant à bas coût des machines à vendanger et des bennes utilisées sur le domaine du chapitre de boîtiers de tracking GNSS, et en géolocalisent les quais de réception, nous avons réussi grâce à des algorithmes à rattacher les informations fournies par les tickets de pesées à des blocs de rangs » décrit Romain Girardot.
La cartographie obtenue permet de caractériser le millésime, de comparer les itinéraires techniques et d’ajuster les décisions agronomiques lors la campagne suivante. Le domaine du chapitre va par exemple s’en servir pour moduler sa fertilisation et évaluer l’impact sur le rendement de ses pratiques agroécologiques.


Vient le tour de Pascal Neveu, directeur de l’unité « Mathématiques, informatique et statistique pour l'environnement et l'agronomie » du centre de recherche Inra Occitanie-Montpellier. Convaincu par le potentiel de l’intelligence artificielle, le chercheur regrette qu’aujourd’hui 90% des données générées par la filière vin ne soit pas structurées et exploitables, « comme les données issues des bulletins de santé du végétal ». Au final, moins d’1% des données sont analysées, alors que les acteurs de la filière ont besoin de bénéficier de nouvelles avancées pour faire face à des défis comme l’adaptation au changement climatique, ou la réduction des intrants.
Ingénieur à l’IFV, Cédric Moisy illustre un peu plus les possibilités offertes par l’IA en présentant le projet sur les maladies du bois « Scan Me If You Can », conduit en partenariat avec l’interprofession des vins de Bourgogne, et le Comité Champagne. « Après avoir réussi en laboratoire à visualiser la composition interne des ceps de vigne, nous souhaitons désormais proposer un outil portable directement utilisable par les viticulteurs dans leurs parcelles sans détruire les souches ». Avec cet outil, ils pourront repérer un cep présentant un fort pourcentage d’amadou sans symptômes extérieurs et prendre rapidement la décision de cureter.
Les chercheurs définissent actuellement les conditions de prise de vue nécessaires à l’obtention de données fiables. En parallèle, ils développent un logiciel d’analyse d’images dont les résultats seront validés par comparaison avec des données acquises sur les mêmes plantes par tomographie 3D.
Toujours sur le thème des maladies, Jean-Pierre Da Costa prend le relai en visio depuis Bordeaux Sciences Agro pour détailler le projet « Prospect FD ». « Nous développons actuellement avec plusieurs partenaires un outil d’aide à la décision pour la prospection de la flavescence dorée » indique l’enseignant-chercheur.
Après avoir arpenté la vigne avec des techniciens du GDON des Bordeaux et du BNIC pour repérer les pieds touchés par la flavescence dorée et apprendre à reconnaître les « facteurs confondants », tels que l’enroulement, ou la chlorose ferrique, Jean-Pierre Da Costa a travaillé sur des images prises par une caméra embarquée sur un quad. « Après avoir acquis des centaines de données sur plusieurs cépages, nous avons généré des algorithmes d’intelligence artificielle capables de reconnaître la flavescence dorée et de les géolocaliser sur une application géographique ».
A terme, l’objectif est de poser des capteurs embarqués sur les machines à vendanger et de photographier l’ensemble des pieds pour produire des cartes et guider les équipes de prospecteurs vers les parcelles les plus à risque.
Sur un ton un peu plus léger, Laetitia Montaron de l’école d’ingénieurs de Purpan conclue la série de pitchs en faisant découvrir à l’assemblée la plateforme d’apprentissage de la taille de la vigne en réalité virtuelle « ReviVRe » développée avec l’association La mélée et les entreprises WiDid et Mimbus, en partenariat avec Felco et le lycée viticole Avis viticampus. « La plateforme propose huit modes de conduite : guyot simple, double, cordon de royat, gobelet… avec des spécificités propres aux différents vignobles français. Elle permet à l’apprenant de se former n’importe quand, n’importe où, sans accident ! » lance-t-elle.
Le logiciel est capable de regénérer une multitude de ceps et de simuler la pousse de la vigne après chaque geste de taille. Pour qu’ils s’en fassent une meilleure, Laetitia Montaron a invité les participants à le tester en se plaçant devant son PC et en se saisissant d’un casque et d’une manette.