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Grand entretien avec Aurelio Montes,"père du vin chilien"
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Grand entretien avec Aurelio Montes,"père du vin chilien"

Souvent surnommé « le père du vin chilien », Aurelio Montes a montré la voie à une nouvelle génération de producteurs orientés vers la qualité. Au moment où sa présidence de Vinos de Chile se termine, il nous a accordé un grand entretien pour retracer l’aventure de Montes Wines, et ses aspirations pour la filière vitivinicole chilienne.
Par Sharon Nagel Le 30 juin 2023
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Grand entretien avec Aurelio Montes,
V

ous avez lancé Montes Wines à la fin des années 80. Comment est né ce projet ?

Aurelio Montes : Montes a débuté tout petit. Mes trois associés et moi-même le voyaient plus comme un « projet de retraite » pour l’avenir. Mais au bout de deux ans, nous avions déjà atteint notre objectif pour les cinq premières années, qui était de commercialiser 30 000 caisses. L’activité s’est développée sans relâche et nous sommes désormais la quatrième entreprise du pays, et la première pour les exportations de vins positionnés au-dessus de 40 dollars la caisse. Le prix moyen des exportations chiliennes s’établit à $30 la caisse, à comparer à $80 pour nos vins. Pour moi, ce succès est dû aux compétences très complémentaires des fondateurs, dans quatre domaines distincts. Puis, mes vingt ans d’expérience d’acheteur chez Viña Undurraga et Viña San Pedro m’ont appris où aller chercher les meilleurs raisins et terroirs. A l’heure actuelle, nous possédons 1 000 hectares de vignobles.

 

Après avoir implanté des vignes à Apalta, Marchigue, dans le nord du Chili et en Argentine, vous êtes parti en Patagonie en 2017. Pourquoi s’aventurer sur des terres aussi inhospitalières pour la vigne ?

En tant que passionné de voile, je navigue souvent dans les 5 000 îles que compte la Patagonie et c’est ainsi que j’ai découvert l’île de Mechuque. Elle se situe à la même latitude que la Nouvelle-Zélande mais en raison du Courant de Humboldt, il y fait très froid. Comme les rêves sont faits pour être réalisés, j’y ai implanté 2 hectares de vignes et j’ai planté 7 cépages : du sauvignon blanc, chardonnay, pinot noir, albariño, pinot grigio, riesling et gewurztraminer. Nous analysons le débourrement, la véraison, la maturation et d’autres aspects du cycle végétatif. Certes, il ne s’agit pas d’une terre particulièrement propice à la vigne, mais le climat s’améliore. Les précipitations annuelles s’élèvent à 3 000 mm, il n’y a pas de gelées et la température de l’eau dans le golfe est supérieure d’un degré à celle de Valparaiso. Les raisins mûrissent difficilement en raison des faibles températures donc nous nous focalisons beaucoup sur les pratiques culturales. 2023 est notre premier millésime donc nous disposons de plus de raisins pour réaliser des essais. Cette année, l’acidité est très élevée, donc vraisemblablement nous ne pourrons élaborer que des vins effervescents. La fermentation malolactique nous permet d’atténuer l’acidité. J’estime qu’il s’agit d’un petit laboratoire pour étudier le changement climatique. Certes, c’est un projet coûteux mais si nous arrivons à élaborer un bon produit, nous le développerons. Peut-être même que nous porterons la superficie du vignoble à 10-15 hectares.

 

Avez-vous d’autres projets en cours ?

Notre prochaine étape porte sur le Portugal avec la famille Roquete de la Quinta do Crasto. Nous voulons réunir nos savoir-faire acquis dans la vallée de Colchagua et dans le Douro pour lancer une ou deux cuvées. Nous en sommes au tout début du projet.

 

Vous avez choisi de lancer vos vins sur la Place de Bordeaux. Comment cela s’est-il passé ?

Nous avons effectivement lancé notre cuvée Muse, un hommage à toutes les femmes de ma vie, sur la Place de Bordeaux. Comme nous avons déjà un bon réseau de distribution ce n’était pas facile et nous avons dû lancer une nouvelle cuvée à partir d’un vignoble en fermage dans la vallée de Maipo. Cela fait dix ans que j’envisageais de commercialiser mes vins via la Place. Mes amis pensaient que nous n’en avions pas besoin, et il est certain que ce serait plus rentable de travailler avec nos distributeurs existants parce qu’il faut investir pour y commercialiser ses vins. Toujours est-il que les grands domaines chiliens y viennent. Nous avons fait une tournée et cinq négociants bordelais souhaitaient commercialiser nos vins, lancés en octobre dernier. Les 6 000 bouteilles se sont vendues en deux semaines, un succès que Mathieu Chadronnier a qualifié de rare. Les volumes étaient faibles au départ parce que nous ne savions pas comment cela allait se passer. Nous avons élaboré 12 000 bouteilles du millésime 2021 qui sera lancé en octobre 2023. J’estime que notre potentiel pourrait atteindre 60 000 cols et j’envisage d’y lancer ma cuvée argentine Kaiken Mai. Il ne fait aucun doute qu’une présence sur la Place apporte du prestige, on devient plus solide.

 

Vous étiez président de Vinos de Chile jusqu’à début juin. Quels ont été vos objectifs pendant vos deux mandats ?

Mes ambitions consistaient à mieux valoriser les vins chiliens et à développer les exportations. Je voulais que le Chili soit traité de manière équitable sur le marché international. Nous avons tant à montrer mais le marché ne rémunère nos produits qu’à un niveau très bas. Certes, beaucoup de caves jouent ce jeu et cela ne nous rend pas service. A Vinos de Chile nous avons ciblé nos investissements uniquement sur le haut de gamme. Pour faire évoluer l’image d’un pays, il faut compter une ou deux générations, mais il faut bien un point de départ. Par ailleurs, notre accord de libre-échange avec la Chine a été tellement fructueux que nous essayons de reproduire ce succès avec l’Inde. Il y a 20 ans, la Chine représentait zéro. Désormais, il s’agit de la destination numéro un chez Montes. L’Inde reste un marché plutôt vierge et pourrait bien devenir la Chine du futur si nous parvenons à établir un accord avec eux.

 

L’image du Chili est souvent associée à un cépage emblématique, le carmenère. Est-ce souhaitable selon vous ?

Pour une raison que j’ignore, les gens veulent toujours mettre une étiquette sur des pays viticoles, à l’instar du malbec argentin ou du tannat uruguayen. En Argentine, nous avons investi beaucoup d’efforts pour promouvoir le cabernet, mais les gens veulent du malbec. Au début, nous nous sommes trompés de terroir, de pratiques culturales, de techniques de vinification etc pour le carmenère au Chili. Nous avons désormais acquis beaucoup plus de connaissances et ce cépage marche bien. Toujours est-il que nous vendons huit fois plus de cabernet que de carmenère. Mais le cabernet stagne alors que le carmenère progresse. Personnellement, je privilégie la diversité.

 

Enfin, quelles sont vos plus grandes satisfactions professionnelles ?

La filière vitivinicole chilienne, dans sa grande majorité, reconnaît que nous avons montré la voie vers une meilleure qualité des vins. Nous avons fait venir un matériel végétal renouvelé et sans virus, par exemple, et avons créé notre propre pépinière. Nous avons planté des vignes en coteaux, et non pas en plaine, ce qui se faisait systématiquement à l’époque. Notre succès a encouragé d’autres à faire de même. Nous avons fait connaître de nouveaux vignobles, comme celui d’Apalta, où des maisons comme Casa Lapostolle se sont implantées. En tant qu’œnologue conseil, j’ai pu partager tout ce que j’ai appris chez Montes avec d’autres producteurs. Lorsque nous avons lancé Montes Wines, les entreprises avaient peur de s’affronter à la France dans les segments les plus qualitatifs. Je pense que Montes a beaucoup contribué à faire évoluer la qualité des vins chiliens.

 

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