remier vignoble mondial en surface et constamment présente dans le duo de tête, en volume, des pays exportateurs de vins, l’Espagne fait figure de mastodonte de la scène viticole internationale. Si le pays exporte près de la moitié de ses volumes de vins, la richesse de sa production (97 AOP, 150 cépages cultivés) complique l’accès à son marché domestique pour les vins étrangers. « La consommation de bière est prédominante, mais concernant les vins, l’Espagne reste un marché très atomisé avec 17 communautés autonomes aux pouvoirs d’achat très variables, sans compter l’impact du tourisme, 71,6 millions de visiteurs en 2022 , la 2ème destination derrière la France », décrit Sarah Bejaoui, responsable des produits transformés et boissons chez Business France Espagne.
En raison de cet afflux touristique, les zones de tendances de consommation du vin s’articulent autour de Barcelone, Madrid, l’Andalousie, le pays Basque, la côte méditerranéenne ou les îles. C’est la force de l’offre de Champagne qui différencie la France dans l’importation de vins étrangers en Espagne. C’est l’Italie qui domine les volumes, mais la valorisation des vins champenois maintient de très loin le leadership français, en valeur, des importations de vins. « Les consommateurs se tournent prioritairement vers les vins espagnols. Ce sont plutôt les vins français haut de gamme qui vont être importés, au 1er rang desquels on trouve les vins de Champagne, suivis en moindre quantité par Bordeaux, la Provence ou la Bourgogne, en valeur. Il peut y avoir quelques effets de mode comme avec le Jura, mais cela reste confidentiel », éclaire Sarah Bejaoui.
La conseillère Business France rappelle que le prix reste un critère prépondérant dans la culture espagnole de consommation. Qualitative, large et diversifiée, l’offre domestique de vins pourvoit en très grande partie aux attentes des consommateurs locaux. « Même si les espagnols disposent d’une offre conséquente de vins effervescents avec le Cava, le côté prestigieux des champagne continue de faire la différence, en particulier auprès des touristes », glisse Sarah Bejaoui. Elle confirme donc que pour un opérateur français, avoir une référence de Champagne dans le catalogue de ses propositions est une clé d’entrée presque incontournable pour aborder le marché espagnol. « La recherche de champagnes vignerons se développe néanmoins, même si les grandes marques de maisons très connues restent largement plébiscitées », situe la responsable boissons de Business France Espagne.
Comme partout en Europe, la consommation de vin continue de diminuer dans la péninsule. Les vins bios ne sont pas particulièrement recherchés par les consommateurs, « alors qu’on voit plus d’attrait pour les vins sans gluten, une tendance propre à l’ensemble des produits alimentaires, mais aussi les vins nature ou en biodynamie », ajoute Sarah Bejaoui. Le vin rosé peine à se développer et l’attrait pour la désalcoolisation apparaît encore cantonné au secteurs des bières et gins, sans réelle demande pour le vin.
La régionalisation marquée du pays se retrouve également à l’échelle commerciale, où importateurs et grossistes du secteur CHR (cafés-hôtels-restaurants) assurent globalement des couvertures à l’échelle des communautés autonomes. « Plusieurs distributeurs sont nécessaires pour couvrir l’ensemble du territoire. L’approche est plus complexe en grande distribution, où les vins nationaux sont privilégiés dans les rayons », poursuit la représentante de Business France. Si elle souligne la fidélité des opérateurs une fois que le business a été enclenché, Sarah Bejaoui n’oublie pas de rappeler quelques particularités culturelles espagnoles. « Le respect du rendez-vous n’est pas aussi marqué que dans d’autres pays. Mieux vaut contacter les opérateurs en étant déjà sur place et organiser une rencontre dans l’instant que planifier des rendez-vous longtemps à l’avance, sans assurance que ceux-ci soient honorés le jour venu », décrit-elle. De la même manière, la prospection écrite et l’échange de mails ne sont pas très efficaces. Mieux vaut assurer une présence de prospection et procéder à des échanges plus spontanés.
Depuis l’épisode Covid, la vente en ligne des vins s’est considérablement développée, mais la consommation générale de boissons alcoolisées reste intimement liée à la composante de socialisation très implantée dans la culture du pays. La distribution des vins et alcools dans le réseau CHR reste donc un maillon majeur du marché espagnol.
Côté spiritueux, le marché est très largement dominé par les whiskies de différentes provenances (Royaume-Uni, Etats-Unis et Pays-Bas), les liqueurs et le gin. Le Cognac reste ainsi réservé à une certaine catégorie de consommateurs très connaisseurs.