encontré sur le stand des vins de Provence à l’occasion du salon Prowein (19-21 mars à Düsseldorf), le président du Conseil interprofessionnel des vins de Provence (CIVP), Éric Pastorino sait combien l’arrivée d’opérateurs de renom a pu soulever des inquiétudes en Provence. Il renouvèle sa vision positive de l’investissement de ces opérateurs, sans pour autant vouloir « champagniser » la Provence. « Je veux aller vers la création d’un modèle provençal qui nous soit propre, où tout le monde trouve sa place et son compte dans la premiumisation de nos appellations », défend-il. Il souligne même l’intérêt de ces acquisitions par des groupes français, alors que l’appétit d’investisseurs étrangers pour le vignoble provençal est aiguisé.
« Aucun opérateur local n’avait les ressources et capacités d’investissement suffisantes pour reprendre des structures comme Minuty, Esclans ou Sainte-Marguerite. Je préfère donc que ce soient des groupes français qui aient mené ces acquisitions, avec une profonde compréhension du travail de nos appellations, doublé d’un attachement au terroir et l’identité des AOC. Le groupe LVMH suit d’ailleurs en Provence la même stratégie de continuité que celle qu’ils suivent de longue date en Champagne ou Cognac », insiste le président du CIVP. Il voit dans ces grandes maisons une exceptionnelle locomotive pour tirer l’image de marque des vins de Provence et le développement de marchés à l’export. « Elles peuvent également offrir une exposition pour poursuivre le développement de nos vins blancs, qui peuvent être un levier de diversification de gamme pour nos vignerons indépendants », poursuit Éric Pastorino.


Précisant que le prix d’un hectare de vignes AOC Côtes de Provence oscille de 65 à 100 000€ en zone littorale, celui qui est aussi président du syndicat de l'AOC côtes de Provence rappelle la priorité de l’enjeu foncier dans l’accès aux jeunes et assurer la transmission familiale. « Lorsqu’il s’agit de vignobles bénéficiant de situations exceptionnelles avec bâtisse et un peu d’isolement, les prix peuvent devenir fous, ne permettant que des investisseurs aux moyens illimités. La transmission familiale et l’accès aux jeunes doivent être facilités, sans quoi notre viticulture va se financiariser. C’est le revers de la médaille de la premiumisation, sur lequel nous devons être soutenus », ajoute-t-il.
Côté marchés, le président du CIVP reconnaît un retard dans les transactions par rapport à la campagne précédente, « mais la dynamique reste favorable ». Comme dans la plupart des bassins, « les problèmes d’approvisionnement en verre et les effets de l’inflation sur la consommation ont un impact sur l’activité des marchés », détaille-t-il. Dans l'activité des trois appellations rattachées à l'interprofession provençale, l’appellation des coteaux varois en Provence apparaît un peu plus en retard sur les mises en marché et les stocks, et devra probablement intégrer une part de ses volumes dans les mesures conjoncturelles de distillation à venir.
Le président provençal se dit en outre très inquiet vis-à-vis de la ressource en eau, dont les réserves sont déjà alarmantes en ce début de printemps. « L’accès à l’irrigation paraît indispensable mais ne réglera pas les choses tout seul. Tous les leviers agronomiques devront être explorés pour la préservation de la matière organique et l’eau de nos sols. Nous avons déjà engagé ce travail par l’embauche d’un agronome dédié pour l’appellation côtes de Provence », confirme Éric Pastorino.