orsqu’il rejoint le domaine familial de Bouisse-Matteri à Hyères en 2007, Thomas Merle découvre sur son vignoble de 60 hectares la présence de plusieurs cépages oubliés, parmi lesquels le Rosé du Var. « Même s’ils sont différents d’un point de vue ampélographique, les Anciens ne faisaient pas la différence entre le Grec rose, le Barbaroux et la Roussanne du Var, qui était d’ailleurs, jusque dans les années 60, le nom que l’on donnait au cépage Rosé du Var », explique ce jeune vigneron. Interpellé par la délicatesse des jus que donnent ces 5000 m2 de vieilles vignes datant des années 1960, il décide de lancer en 2013 une cuvée sobrement appelée « Rosé du Var » car issue à 100% de ce cépage autochtone éponyme. « C’est une cuvée légère et croquante, avec des arômes de melon, papaye et petites fleurs subtiles, qui plait souvent aux amateurs de vins blancs. Elle présente un degré d’alcool autour de 12,5°C, une acidité faible et se conserve bien dans le temps », indique Thomas Merle avant d’ajouter qu’il utilise aussi le Rosé du Var en assemblage dans d’autres rosés, « car il apporte beaucoup de finesse ».
Depuis 2016, des expérimentations sont en cours au Centre de Rosé, en partenariat avec le Syndicat des Côtes de Provence, pour identifier les qualités de ce cépage descendant du Gouais blanc. Après une batterie d’essais qui touchent à leur fin cette année (vinification en cave expérimentale, analyses Å“nologiques et sensorielles par un jury d'experts formés à la dégustation du vin rosé), il ressort que le Rosé du Var a toute sa place dans l'élaboration des rosés de Provence, de par son identité provençale et sa cohérence avec le marché actuel des rosés, à savoir des vins clairs, aromatiques et secs.
Peu sensible aux maladies, il présente une acidité totale modérée, une teneur en acide tartrique forte, ce qui explique son pH bas et le rend particulièrement intéressant dans un contexte de réchauffement climatique. Ce que confirme Thomas Merle : « Ce cépage fournit une production régulière de qualité, avec de gros raisins, en moyenne autour de 60-70 hl par hectare chaque année. Inclus dans le cahier des charges des Côtes de Provence jusqu’en 1986, il avait été abandonné car il produisait en quantité des vins peu alcooleux à faible acidité, ce qui avait conduit au retrait de son encépagement. Or, aujourd’hui, avec l’évolution des modes de conduite, on sait en maîtriser la vigueur ». À l’heure où la Provence réfléchit à diversifier son offre d'AOC rosés, tout en cherchant des cépages adaptés aux problématiques de réchauffement climatique, le Rosé du Var tombe à pic.
En 2021, un dossier sera donc déposé auprès de l’INAO pour obtenir sa réintégration en tant que cépage secondaire dans le cahier des charges des Côtes de Provence, mais sous un nouveau nom. « Rosé du Var » pouvant prêter à confusion avec l’indication géographique « Var », le CTPS (Comité Technique Permanent de la Sélection) a accepté la demande de modification du nom de Rosé du Var pour « Rousseli ». Ce sera également le nom de la cuvée du Domaine Bouisse-Matteri pour le millésime 2021.