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Crise de Bordeaux
La sucrosité des vins rouges fait débat

Face aux difficultés commerciales, le profil-produit des vins bordelais est remis en question. Avec l’idée pour certains metteurs en marché de s’orienter vers des teneurs conséquentes en sucres résiduels.
Par Alexandre Abellan Le 23 octobre 2019
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La sucrosité des vins rouges fait débat
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uand une matinée de conférences scientifico-économiques touche à sa conclusion, l’heure avancée du déjeuner fait rapidement ronronner d’impatience ses orateurs et auditeurs. Sauf si l’un des participants met les pieds dans le plat et relance les débats. Directeur commercial du négoce Barton & Guestier (groupe Castel), Philippe Marion a secoué la fin de la matinée sur le business model du Vin du cluster Inno’Vin (ce 21 octobre à Bordeaux Sciences Agro). « Les vins de Bordeaux ont le problème d’être trop austères à la dégustation. Aujourd’hui, quantité de vins de Bordeaux d’entrée de gamme ne trouvent pas preneurs. Il faudrait pouvoir leur donner plus de sucre pour qu’ils soient plus appétissants » lance le négociant bordelais.

« Je partage complétement [cet avis] » réagit immédiatement Eric Hénaux, le directeur général de l’union coopérative de Tutiac (4 000 hectares dans les appellations bordelaises), pour qui l’avenir du vignoble girondin passe par la conquête de nouveaux consommateurs dans le monde. « Quand vous faîtes une dégustation à l’aveugle auprès d’un panel de consommateurs américains, le profil qui sort le mieux à la dégustation c’est 9 grammes de sucre » souligne-t-il, estimant qu’« aujourd’hui, soit on fait de l’intégrisme et on continue à faire de l’AOC sans sucre et on a beaucoup de mal à répondre à la demande. Soit on déclasse en IGP ou vin de France pour récupérer de la capacité à s’adapter aux consommateurs […] élevés au Coca-Cola et aux boissons sucrées. »

L’édulcoration n’est pas dans la logique des AOC

Relancé, le débat sur l’adaptation des AOC ne peut pas être local et doit s’adapter à un cadre national, voire européen, souligne Bernard Farges, le président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux et de la Confédération Nationale des producteurs de vins et eaux-de-vie à AOC (CNAOC). « Oui, les consommateurs demandent des produits un peu différents. Oui, on pourrait monter à 5 grammes résiduels sans trop de difficultés à l’intérieur des règles collectives des AOC » pose le viticulteur girondin, mais « après, il y a la question de la stabilité des produits. Et de l’édulcoration, qui n’est pas encore dans la logique des AOC, sauf quand on s’appelle Champagne. »

Modes de consommation

Admettant qu’il faut travailler le sujet de la sucrosité des vins, Bernard Farges appelle à la réflexion sur d’autres pistes d’adaptation, nécessaires pour relancer la commercialisation des vins de Bordeaux : « c’est indéniable. Nos vins dégustés à table sont les meilleurs. Mais ils ne sont pas toujours funs quand ils sont dégustés seuls par rapport aux autres vins. Comme il y a de moins en moins de personnes qui consomment du vin à table, on a ce marché dont on se coupe et qu’il faut conquérir par une autre voie. »

Flexibilité et capacité à revenir en arrière

D’autant plus que la mode des sucres résiduels pourrait déjà être passée. « Attention à ne pas sacrifier AOC à tendances qui peuvent disparaître » souligne Alexandre Imbert, le directeur de l’Union Générale des Viticulteurs de l’AOC Cognac (UGVC). « Qui est en capacité aujourd’hui de savoir ce que le consommateur va effectivement demander comme vin de Bordeaux dans 10 à 15 ans, le temps nécessaire pour mettre en ordre de marché le vignoble ? » renchérit Gwénaëlle le Guillou, la directrice du Syndicat des Viticulteurs Bio de Nouvelle Aquitaine (SVBNA). Estimant qu’« il faut de la flexibilité et la capacité revenir en arrière sans trop de dégâts. Se dire tout à coup que l’on va être un grand vignoble de production de blancs et de rosés permettra juste de perdre notre ADN et si le vin rouge est demandé dans 15 ans… »

Dans la filière vin, « ceux en charge des consommateurs sont plus aptes à évoluer que les producteurs qui sont fermes dans leur conviction de produire de la même façon » résume le professeur en économie Jean-Marie Cardebat (Université de Bordeaux). Estimant pour sa part qu’il « faut plus de flexibilité pour occuper les segments séduisant de nouveaux consommateurs en accompagnant les tendances. Quitte à s’en désengager quand elles sont passées. »

Le débat sur l'évolution du profil des vins bordelais reste entier pour la prochaine conférence scientifico-économique.

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Tous les commentaires (1)
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marc Le 24 octobre 2019 à 09:58:39
Régulièrement en contact dans des formations avec des novices et des puristes, c'est un débat intéressant à mener pour la profession. Je présente régulièrement dans mes séances, un cabernet franc du Languedoc dont le viticulteur a défini le profil avec trois grammes de sucre résiduel. Bien entendu, même produit sur une zone classée en AOC Minervois La Livinière, il est revendiqué en vin de pays. Effectivement ce que reproche le consommateur aux Bordeaux en général est d'être trop austères à la dégustation mais l'on pourrait étendre cette position à d'autres appellations ou régions. Pourquoi autoriser des additifs pour masquer des défauts ou insuffisances et refuser, de manière naturelle, la présence de quelques grammes de sucre résiduel ? Il faut arrêter de se mentir et Bernard Farges fait de la langue de bois en affirmant que les Bordeaux dégustés sur table sont les meilleurs. Les causes sont bien connues, vous manquez d'ambition pour la typicité du produit et l'arrivée massive dans les chais de la thermovinification a encouragé ce nivellement par le bas. Certains chefs de cave affirment pouvoir vinifier une vendange altérée à 30 ou 50 %. À la dégustation c'est imbuvable et ces mêmes responsables de caves le reconnaissent ce devrait être pour la "Cuvée du Patron". Les AOC méritent autre chose, de redéfinir des typicités, et pourquoi pas, à condition que le consommateur en soit averti aller vers cette tendance du marché. Le consommateur lambda est plus nombreux que le puriste même si les choses évoluent...
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