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"La première fois, on s'est planté", vins désalcoolisés : attention aux contaminations !
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Conditionnement
"La première fois, on s'est planté", vins désalcoolisés : attention aux contaminations !

L’embouteillage des vins désalcoolisés nécessite de nombreuses précautions pour garantir leur stabilité microbiologique. Des vignerons l’apprennent à leurs dépens. Des œnologues développent un conseil spécifique.
Par Amélie Bimont Le 09 avril 2025
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Laurent David et sa bouteille Zéro by Edmus - crédit photo : Laurent David
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a mise en bouteille d’un vin désalcoolisé ne s’improvise pas. Laurent David l’a appris à ses dépens. « La première fois, on s’est planté », admet le propriétaire des 1,6 ha du château Edmus à Vignonet en Gironde. Pionnier du sans-alcool, ce producteur de Saint Emilion grand cru se lance fin 2022. Un an plus tard, après plusieurs essais pour mettre au point sa recette, un prestataire vient désalcooliser 10 hl de vin par osmose inverse. Après cela, ce vin est flash-pasteurisé, c’est-à-dire chauffé à 71°C pendant 20 à 30 secondes, pour le stériliser. Puis Laurent David y ajoute 14 g/L de MCR, l’homogénéise par pompage et le stocke dans un garde-vin inox toute la nuit. « Il faisait moins de 10°C dans le chai », indique-t-il.

Le lendemain, un prestataire vient tirer 1200 bouteilles de ce vin, sans y ajouter de conservateur ni le filtrer stérilement. « Une semaine plus tard, j’ouvre une bouteille : le vin était perlant, rapporte Laurent David. En fait, une bouteille sur quatre était repartie en fermentation. Dès que l’on enlève l’alcool, le vin n’est plus protégé. La contamination peut venir de la tireuse, du MCR ou d’ailleurs… Il faut être très rigoureux ».

Après cet échec, Laurent David confie la totalité du process, y compris la mise, à Bordeaux Families en mars 2024. Cette fois, le vin désalcoolisé est stabilisé avec Velcorin, le nom commercial du dicarbonate de diméthyle (DMDC). L’opération porte sur 3000 bouteilles qui seront vendues en moins de six mois. En septembre 2024, Laurent David réalise un second lot de 3000 bouteilles. « Quasiment tout est réservé, se réjouit-il. Cette année on va en refaire, la demande est très forte ».

Des protocoles spécifiques

Pour prévenir les déviations des vins désalcoolisé, des œnologues mettent en place des protocoles spécifiques. C’est le cas de Paul-André Saulnier, associé au laboratoire es20 œnologie basé à Béziers dans l’Hérault. En février 2024, une cave particulière le sollicite pour encadrer la mise en bouteille de 50 hl. « Le rosé de notre client a été désalcoolisé par distillation sous vide en Espagne. Il est revenu par citerne à 4°C. On l’a d’abord filtré avec un tangentiel puis on a ajouté les arômes et le MCR avant de conserver l’ensemble au froid dans une cuve détartrée et désinfectée à l’acide péracétique ».

Pas le moindre incident

En parallèle, la cave a nettoyé de fond en comble sa tireuse, la rinçant à l’eau froide puis à l’eau chaude, puis la stérilisant à l’acide péracétique avec une journée de trempage pour finir par la rincer à nouveau à l’eau froide et à l’eau chaude. « Il faut être beaucoup plus vigilant que lors d’une mise classique », précise Paul-André Saulnier. Le lendemain, juste en amont du tirage, il filtre sa boisson aromatisée à base de vin de façon stérile, à 0,45 micron. Il y ajoute du Velcorin, du sorbate de potassium, un second conservateur, et ajuste le SO2 libre à 40 mg/L. Ceintures et bretelles ! Ce protocole porte ses fruits. « Tout s’est vendu, sans le moindre incident. Nous accompagnons de nouveau notre client pour un second lot ».

Aux laboratoires Dubernet, l’œnologue conseil Nicolas Dutour établit des protocoles similaires. « La problématique n°1 réside dans les refermentations par Saccharomyces, pointe-t-il. Mais d’autres levures, bactéries ou champignons peuvent se développer, changer l’aromatique ou créer des voiles. On a eu un cas de développement d’arômes fumés à cause de bactéries qui produisaient des gaïacols. On rentre dans le monde de l’agro-alimentaire : il faut bannir les cuves ouvertes, contrôler les process de désinfection et effectuer des contrôles microbiologiques après les filtrations. Des bactéries peuvent s’implanter entre la désalcoolisation et le conditionnement ».

"Je déconseille la pasteurisation avant mise"

Une fois le vin désalcoolisé, Nicolas Dutour conseille de le filtrer puis de contrôler sa charge microbiologique. Puis il préconise une nouvelle filtration juste avant la mise et, soit l’ajout de DMCD au tirage, soit une pasteurisation après la mise en faisant passer les bouteilles dans un tunnel à cet effet. « Je déconseille la pasteurisation avant la mise car si la tireuse n’est pas stérile, elle peut contaminer le produit », prévient-il.

L’œnologue met également en garde contre les pratiques artisanales : « ce n’est pas parce qu’on est équipé pour chauffer et refroidir que l’on peut improviser un tunnel de pasteurisation… Il faut monter à 70°C pendant 20 à 30 secondes pour éliminer les micro-organismes. »

Et si les vins désalcoolisés sont la proie rêvée de nombreux microbes, « le risque pathogène reste faible. Les bactéries E. coli ou les salmonelles ne survivent au pH du vin qu’à condition d’avoir été acclimatées ».

« Un produit tout indiqué pour stabiliser les vins désalcoolisés »

Antoine Fleury, référent Velcorin, groupe Sofralab laboratoires explique « Le Velcorin -conservateur fabriqué par Lanxess dont nous sommes les seuls distributeurs en France-, est largement utilisé pour stabiliser les vins désalcoolisés car il est efficace contre un large spectre de levures, bactéries et champignons et, contrairement à la pasteurisation, il n’affecte pas le produit. Seul inconvénient : il n’est pas miscible à l’eau. Il faut une pompe doseuse spécifique pour l’injecter dans les boissons désalcoolisées juste après la palette de filtration après quoi le produit s’hydrolyse dans la boisson. Cette pompe est disponible à l’achat à partir de 70 000€ minimum. En parallèle, nous proposons un service de prestation avec installation de la pompe sur site pour sécuriser la mise ou de la location longue durée ».

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