ne baisse de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires par mois : c’est le coût concret pour la France depuis trois mois de la procédure chinoise antidumping visant les eaux-de-vie de raisin en réplique des tensions entre Pékin et Bruxelles sur les voitures électriques. Avec une baisse de 50 % des expéditions, qui pourrait encore s’accentuer avec le coup d’arrêt sur le duty-free, le Fédération des Exportateurs de Vins & Spiritueux (FEVS), le Bureau National Interprofessionnel du Cognac (BNIC) et le Bureau National Interprofessionnel de l’Armagnac (BNIA) en appellent aux actions et plus aux paroles gouvernementales dans un communiqué commun. Il est principalement demandé au premier ministre, François Bayrou, de tenir l’engagement du président de la République, Emmanuel Macron.
Ce dernier annonçait, aux côtés de son homologue chinois, Xi Jinping, lors du sommet du G20 le 19 novembre 2024 à Rio que le premier ministre (alors Michel Barnier) se rendrait en Chine durant le premier trimestre 2025 pour faire avancer les négociations. Un engagement répété par Emmanuel Macron le 6 janvier, lors de la Conférence des ambassadrices et ambassadeurs à l’Élysée. Mais le temps passe, et rien ne se concrétise. Ministre délégué chargé du Commerce extérieur, Laurent Saint-Martin indiquait tout au plus lors de l’inauguration du salon Wine Paris ce 10 février être « dans la préparation d’un déplacement ministériel que j’espère incarné le plus haut possible en Chine pour avoir ce niveau de discussion et surtout pouvoir résoudre ces différents ». Un déplacement encore flou, que la FEVS, le BNIC et le BNIA comptent faire préciser lors de la visite du premier ministre sur le salon de l’Agriculture ce lundi 24 février.
Inaugurant ce 22 février le salon de l'Agriculture, Emmanuel Macron a vu son planning modifié après l'attentat de Mulhouse, concentrant ses échanges avec les vins spiritueux aux côtés d'autres filières.« Nous attendons avec impatience que soit confirmée la visite du premier ministre en Chine pour tenter de résoudre le problème » rapporte à Vitisphere Jean-Pierre Cointreau, le président de Maison des Vins et Spiritueux qui a porté les demandes de la filière au président de la République, qui « nous a dit qu’effectivement il allait insister auprès du premier ministre ».


« Le déplacement en Chine du premier ministre doit se tenir dans les plus brefs délais pour discuter avec son homologue chinois. C’est urgent, on ne peut pas se contenter d’écoute et de paroles, il nous faut du concret » martèle Florent Morillon, le président du BNIC, pour qui « tant que le premier ministre ne se déplace pas en Chine, il n’y aura pas de solution possible. Je ne dis pas que tout sera résolu, mais ce serait au moins une chance d’y parvenir. » Et de changer la donne, alors que le dossier est en train de s’enliser, depuis l’annonce à noël d’une prolongation de six mois de l'enquête antidumping chinoise sur les exportations européennes d’eaux-de-vie de vin, après l’obligation de cautionnement des 30,6 à 39 % de la valeur des brandies importés d’octobre à novembre 2024 (mesure coercitive transformée en lettre de garantie).
La tension monte
Pour que la visite du premier ministre ait un impact, « il faut arriver avec des propositions en dehors des véhicules électriques. Il faut que chacun vienne avec quelque chose, comme dans chaque discussion » prévient Florent Morillon, qui ne cache pas sa crainte : « nous n’avons pas l’impression qu’il y ait quelque chose dans la corbeille de la mariée. » Une imprévision apparente qui inquiète à Cognac, où la tension monte, avec les risques de réduction des rendements (même si une individualisation compte optimiser la rentabilité) et de diminution d’achat des eaux-de-vie par le négoce (avec un effet domino sur les fournisseurs et embouteilleurs). Pour débloquer la situation, « on l’a dit on l’a redit, on veut que l’engagement du président soit respecté. Qu’au moins il y ait le déplacement du premier ministre pour mettre les chances de notre côté » conclut Florent Morillon.