our les exportateurs de vins et spiritueux, le sujet est entendu : tout nouvel accord de libre-échange entre l’Union Européenne et un partenaire international est bon à prendre, surtout en pleine montée des tensions géopolitiques avec la Chine et les États-Unis. Serpent de mer depuis sa signature en 2019 et la réouverture des débats par Bruxelles sur le développement durable, l’accord de libre-échange entre les 27 membres de l’Union Européenne et les 5 pays du Mercosur (Argentine, Bolivie, Brésil, Paraguay et Uruguay) revient dans l’actualité avec de nouvelles négociations en septembre et octobre à Brasilia (le Brésil centralisant les négociations pour le Mercosur) et les échos de finalisation politique lors du G20 se tenant à Rio de Janeiro ces 18-19 novembre (sachant qu’avant toute signature des mois de délai seront nécessaires pour valider l’accord au niveau européen). Cette relance diplomatique a de quoi intéresser les exportateurs du vin, mais aussi braquer d’autres filières agricoles, comme l’élevage (pour les viandes bovines, porcines et la volaille).
Se voulant rassurante, la Commission Européenne défend un accord « équilibré » pour l’ensemble de l’agriculture : « il y a des gains pour certains secteurs pour lesquels les marchés sont fermés, les produits laitiers et les vins » et pour les « secteurs plus fragiles au vu de la compétitivité du Mercosur, des volumes absorbables ont été négociés (comme l’augmentation concédée de 50 % des volumes de viande de bœuf importés à 300 000 tonnes, représentant 1,6 % de la production européenne) » sachant que la Commission martèle que les conditions de production seront conformes aux exigences européennes.


Pour les vins, Bruxelles défend un accord purement bénéfique, pas de risque de concurrence des vins argentins sur le marché communautaire, mais du potentiel de conquête des marchés sud-américains. « On présente toujours le vin comme un secteur gagnant » indique-t-on à la Commission, avec 36 indications géographiques protégées*, un potentiel de développement du marché en supprimant les droits élevés (de l’ordre de 27 % selon la Commission). « On parle d’un démantèlement d’un droit qui est prohibitif pour le secteur du vin, il y a de toute évidence un marché qui peut se développer » entend-on à Bruxelles. Alors que des barrières non tarifaires sont imposées dans ces marchés (étiquetage, fiscalité, analyses œnologiques…), Bruxelles répond que « les procédures administratives seraient substantiellement simplifiés », notamment sur les analyses œnologiques.
Si des opérateurs appellent à plus de protection des indications géographiques, la Commission réplique que l’on peut toujours vouloir mieux, toujours vouloir plus, mais que ces avancées sont déjà mieux que rien. Et ce volet n’est pas réouvert à la négociation, les discussion rouvertes par l’Union Européenne ne concernant que la déforestation et les engagements portant sur le développement durable. L’agriculture n’est pas sur la table des négociations. Mais elle reste dans mobilisée dans son opposition. Que la Commission ne semble pas comprendre.


Pour filer une métaphore galante, les pays du Mercosur « voudraient sortir avec nous, mais si la fiancée se fait trop attendre, ils ont d’autres opportunités. La Chine les courtise (le président Xi Jinping va rester après le G20 à Brasilia pour une visite d’Etat » prévient-on à Bruxelles, citant l’exemple de l’accord de libre-échange entre l’UE et le Canada : « il y a une différence entre ce qui est dit dans les rues et ce qui se passe. Le CETA na pas causé la fin de l’industrie bovine en Europe ».
* : Il s’agit de 30 vins AOP (Alsace, Anjou, Beaujolais, Bordeaux, Bourgogne, Cahors, Chablis, Champagne, Châteauneuf-du-Pape, Côtes de Provence, Côtes du Rhône, Côtes du Roussillon, Fronton, Graves, Irouléguy, Languedoc, Madiran, Margaux, Médoc, Pauillac, Pessac-Léognan, Pomerol, Pommard, Romanée-Conti, Saint-Emilion, Saint-Estèphe, Saint-Julien, Sauternes, Touraine et Val de Loire), 1 vin IGP (Pays d'Oc) et 5 spiritueux AOP (Armagnac, Calvados, Cognac, rhum de Guadeloupe et rhum de la Martinique).