n 2023, le vignoble girondin d’appellation s’étend sur 103 210 hectares d’après les dernières prévisions établies par le service économique du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB). Soit une baisse de 4 % par rapport à 2022 (107 748 ha). Marqué, ce repli des surfaces se concentre sur les appellations rouges et rosées, chutant à 90 741 ha (-5 %). La chute frappe plus particulièrement l’AOC Bordeaux rouge, où le vignoble revendiqué tombe à 28 335 ha. Soit -12 % par rapport aux 32 113 ha de 2022 et -22 % par rapport aux 36 259 ha de 2017. Multiples, les causes de ce repli sont à la fois conjoncturelles face au difficile millésime 2023 (la pression mildiou a pu faire tomber à zéro les rendements de certaines parcelles et donc faire sortir temporairement des superficies) et structurelles face aux difficultés économiques (arrachage anticipé pour réduire les frais d'exploitation non rémunérateurs, fermages se retrouvant sans exploitant, mise en friche pure et simple… il y aurait actuellement 2 000 ha de vignes abandonnées en Gironde).
Si l’on parle dans le vignoble d’évitement de l’AOC Bordeaux rouge par la production en vin de France de blancs de noirs ou de passage en IGP Atlantique, les tendances 2023 restent limitées en valeur absolue (respectivement +51 % pour les VSIG blancs à 1 405 ha et +14 % pour l’IGP Atlantique rouge et rosé à 557 ha). Partant de zéro, la nouvelle AOC Entre-deux-Mers rouge revendiquerait 277 ha pour 9 000 hectolitres de vin. L’AOC régionale Bordeaux rouge tomberait en dessous du million d’hectolitres, avec 940 000 hl produits. Soit -26 % par rapport à 2022, la pression sanitaire (mildiou, tordeuses…) ayant fortement amputé le potentiel de production pourtant prometteur à la sortie des grappes (notamment sur merlot).


Avec un niveau de production historiquement bas (malgré les gels de 2017 et 2021, l’AOC Bordeaux rouge était restée au-dessus du million hl), les espoirs de rééquilibrage entre offre et demande sont vifs dans la filière girondine, qui souhaite en finir avec la spirale d’attentisme des acheteurs et de cours du vrac indignes. Au niveau de l’ensemble des AOC de Gironde, les 3,8 millions hl qui seraient produits en 2023 approchent du niveau actuel de commercialisation bordelais. « Théoriquement, il y a équilibre » et « au moins, on ne devrait pas augmenter les stocks » confiait récemment Allan Sichel, le président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB), qui regrettait « des transactions à des prix très bas dans ce volume commercialisé [de 3,6 à 3,7 millions hl] : il y a de la marge de manœuvre pour susciter de l’appétit pour les vins de Bordeaux et convaincre les consommateurs pour créer de la tension. » Un objectif poursuivi par la nouvelle campagne de communication interprofessionnelle, qui a marqué l’édition 2024 du salon Wine Paris & Vinexpo Paris.
Déjà amorcé, le redimensionnement spontané du vignoble bordelais devrait s’accentuer avec la mise en œuvre de l’arrachage sanitaire de 8 000 ha cet hiver (l’administration envoie des courriers d'Autorisation de Commencement des Travaux avant de pouvoir préciser l’obtention des 6 000 €/ha de prime à l’arrachage). Avec la discussion entre Paris et Bruxelles des possibilités d’un arrachage temporaire pouvant représenter 100 000 ha au niveau national, le visage du vignoble bordelais devrait encore évoluer à l’avenir (notamment dans les vignobles de l’Entre-deux-Mers et des Côtes, les plus demandeurs d’arrachage sanitaire en 2023).