i l’on disait jusqu’ici qu’en France on consomme moins, mais mieux, ce premier semestre 2022 il semble que les Français consomment moins, mais… moins. De janvier à juin dernier, les chiffres ne sont pas bons du tout en grande distribution. Les ventes de vins tranquilles ont baissé de 7 % en volume et 5,6 % en valeur par rapport au premier semestre 2021 d’après les dernières statistiques des panels Nielsen. Le coup d’arrêt touche particulièrement les vins rouges (respectivement -10,3 % en volume et -9,2 % en valeur), mais aussi les vins blancs (-7,8 et -6,1 %) et les vins rosés (-2 % et +0,9 %).
D’après les analyses des panels Nielsen, le recul est encore plus important sur les vins prémiums, comme l’indique le graphique ci-dessous pour les vins AOP et bio (ayant des indices de prix respectivement supérieurs de 46 et 56 % par rapport à la valorisation moyenne de l’ensemble des vins vendus en GD). Les panels enregistrent ainsi une forte baisse des vins d’appellation (-8,8 % en volume et -7,2 % en valeur) par rapport aux vins de pays (-4,9 et -1,8 % pour les IGP) et aux vins de table (-3,8 % et -1,1 % pour les vins de France). Pour les vins bio, les baisses sont plus marquées (-10,9 % en volume et -9,3 % en valeur) que pour les étiquettes conventionnelles (-6,8 et -5,4 %). Ces baisses se ressentent également dans la catégorie des vins effervescents. Exemple avec les champagnes : -8,9 % en volume et -9,3 % en valeur sur ce premier semestre. Ce qui témoigne d’un prix moyen en baisse.


Dans le contexte actuel de tension sur le pouvoir d’achat, liée à l’invasion russe de l’Ukraine, « les vins tranquilles qui ne sont pas prioritaires dans les dépenses des Français, et dont le prix moyen est nettement supérieur au reste des Produits de Grande Consommation – Frais Libre-Service (PGC-FLS), devraient être pénalisés. Ce qui explique également la baisse de consommation plus importante sur les vins plus premium » analyse Jean Glussot, le directeur client service distribution de Nielsen, ajoutant que « dans le contexte inflationniste que nous connaissons, de nombreux foyers français se retrouvent désormais dans une situation financière plus précaire (+6 millions de foyers ont déclaré avoir connu une baisse de leur pouvoir d'achat depuis la fin 2021) ».
L’expert pointe également que les statistiques de ce premier 2022 pâtissent d’un historique défavorable, étant comparées aux données des années 2020 et 2021, période durant laquelle la consommation en GD était portée par les fermetures administratives de la restauration (crise covid oblige). Jean Glussot ajoute que la baisse de la demande est accentuée par une baisse de l’offre (-5,5 % d’offre dans le rayon vin en un an). Ce qui peut s’expliquer par la petite récolte 2021 (marquée par le gel historique du printemps et les fortes pressions sanitaires, notamment mildiou) qui cause des ruptures de stocks (notamment sur des vins blancs), ainsi que les tensions en approvisionnement de fournitures (bouteilles, capsules, cartons et étiquettes...) qui retardent les conditionnement et donc les livraisons.


À ces tendances conjoncturelles s’ajoute la réduction structurelle de la consommation de vins. « On assiste bien à une perte de vitesse globale de tous les types de vins (même si certains résistent mieux que d’autres). La concurrence des bières n’y est pas pour rien ! » analyse Éric Marzec, le directeur de clientèle pour les liquides des panels IRI. Soulignant que « l’inflation est venue casser la dynamique de valorisation que l’on voyait précédemment. Les consommateurs ne montent plus en gamme et ne valorisent plus leurs achats… »
Donnant des chiffres légèrement différents à la filière vin, IRI précise que la grande distribution a vendu 4 millions d’hectolitres de vins tranquilles pour 1,9 milliard d’euros sur ce premier semestre, avec des baisses de 8 % en volume et 7 % en valeur par rapport à 2021 (avec un prix moyen de 4,76 €/l, stable). Pour les vins effervescents, 72 millions de cols ont été commercialisés pour 545 millions €, soit -1 % en volume et 64 % en valeur (avec un prix moyen de 7,56 €/col, 3 %).
L'évolution des ventes de vin en GD dépend fortement de l'année de référence prise en comparaison : le premier semestre 2022 est comparé aux six premiers mois 2021 en haut, et au premier semestre 2020 en bas. Source : Nielsen.