es trompettes de la renommée du château Gloria sont mal embouchées pour la quatrième chambre correctionnelle du Tribunal Judiciaire de Bordeaux, qui condamne ce 28 février les acteurs de la marque "Bordeaux de Gloria". Ecopent de 100 000 € chacun les domaines Henri Martin (englobant le château Gloria, en appellation Saint-Julien) et le négoce Sovex Grands Châteaux (premier acheteur des domaines Henri Martin) pour la commercialisation des 230 000 cols du vin de négoce (représentant un chiffre d’affaires de 892 000 € pour le négoce, avec une redevance de 177 000 € pour la propriété).
Suivant les réquisitions du ministère public, la juridiction choisit des « peines d'amende d'avertissement » pour sanctionner « les pratiques commerciales déloyales » définies à l'article L.121-1 du Code de la Consommation, car « l'étiquetage [du "Bordeaux de Gloria"] reprenait les mêmes codes graphiques que l’étiquetage du vin "Château Gloria" (même police de caractères, mention "sélection domaines Martin", deux trompes de chasse entrecroisées et même toit d’un château orné de fleurs de lys » et que « la contre-étiquette de la bouteille de vin "Bordeaux de Gloria" indiquait notamment: "Bordeaux de Gloria est le fruit d’une sélection de vins de Bordeaux effectuée par l’équipe du célèbre Château Gloria (...)" et "mis en bouteille à la propriété" ». Un ensemble d’éléments qui est « susceptible de tromper le consommateur normalement informé pensant acquérir ou consommer un vin provenant du domaine vinicole "Château Gloria" » alors qu’il s’agit d’un vin de négoce produit par la cave coopérative de Rauzan (Entre-deux-Mers).
« Sovex Grands Châteaux, Domaine Martin et Jean Triaud [le cogérant du domaine] en mettant en œuvre de façon conjointe l'élaboration puis la commercialisation de vins dont ils savaient qu'ils ne provenaient nullement du domaine château Gloria en les présentant d'une façon où l'acquéreur pouvait croire qu'ils provenaient de vins issus des cépages de la propriété de château Gloria, ont délibérément trompé le consommateur normalement informé » conclut la juridiction. Qui écarte tous les arguments de la défense. Comme le fait que la vente du "Bordeaux de Gloria" soit limitée à la vente assistée en Cafés, Hôtels et Restaurants (CHR), car les « restaurateurs ou cafetiers ont également pu être trompés ». À la lecture du jugement, un élément semble avoir pesé contre les prévenus : l’avertissement par l’administration d’un risque de tromperie alors que la marque domaniale n’était qu’à l’état de projet.


« Le fait que la société Domaines Martin ait interrogé la Direction Régionale de la Consommation (DIRECCTE) le 18 août 2017 ne peut être exonératoire dans la mesure où, de façon claire, l'administration consultée répondait par un courrier du 2 septembre 2017 que l'utilisation du nom du domaine vinicole "Gloria" en complément du nom de l'AOC "Bordeaux" dans la marque "Bordeaux de Gloria" apparaissait "susceptible d'induire le consommateur en erreur" » rapporte le tribunal judiciaire, notant qu’alors que la propriété répondait dans une lettre du 17 novembre 2017 « avoir pris note des principales dispositions légales », elle avait « déposé le 14 novembre 2017, soit 3 jours avant l’envoi de ce courrier par lequel elle affirmait sa volonté de respecter les dispositions légales, un contrat de licence de marque avec la société Sovex portant sur l’exploitation par cette dernière de sa marque "Bordeaux de Gloria" déposée le 15 mai 2017. Dès lors, les prévenus étaient parfaitement avertis que l'utilisation du nom de Bordeaux de Gloria allait induire en erreur le consommateur normalement avisé, et c'est en parfaite connaissance de cause qu'ils ont agi. »
Avec ces peines conséquentes, la quatrième chambre correctionnelle renoue avec les condamnations de marques domaniales ayant marqué les années 2019 et 2020 (avec des condamnations de 200 000 € pour le Bordeaux de Maucaillou, de 60 et 80 000 € pour le château et le négoce à l’origine du Bordeaux de Citran, de 30 000 € pour les opérateurs du Bordeaux de Larrivet Haut-Brion).