vec sa nouvelle cuvée Denarius, 500 € HT, « je voulais faire quelque chose d’accessible » lance, pince-sans-rire, Loïc Pasquet, le vigneron bordelais créateur de Liber Pater, « le vin le plus cher du monde », à 30 000 € la bouteille. Ne visant pas les prix du domaine de La Romanée Conti, ces tarifs dépassent ceux des premiers crus classés en 1855. « Liber Pater c’est extrêmement cher et rare. Denarius permettra de remettre des vignes franches de pied sur la table des restaurants français. Ça reste un prix d’exception pour déguster le vin d’avant le phylloxéra » explique Loïc Pasquet. Promettant un retour aux sources du vignoble bordelais*. Et plus particulièrement du milieu du XIXème siècle. Pour ne pas dire de 1855.
Sans en avoir les volumes, ni la force commerciale, « je vais chercher les crus classés sur leur terrain. Avec le même prix, mais avec ce qu’ils devraient faire » indique Loïc Pasquet, coutumier des piques contre les grands crus classés du Médoc. Reprenant des méthodes culturales ancestrales (conduite en joualles et en échalas, travail du sol au mulet, traitements bio, très hautes densités de plantation avec 20 000 pieds/hectares…) et des cépages anciens (autochtones, mais plus inscrits dans les cahiers des charges), le domaine Liber Pater affirme proposer le goût historique des vins de Bordeaux. Une approche qui se veut militante, hors appellation et en vin de France.
Mettant actuellement en marché ses 1 200 premiers cols du millésime 2018 de Denarius (pour une production de 6 000 cols), Loïc Pasquet revendique une idéologie vigneronne plus bourguignonne que bordelaise. S’il récuse le terme de second vin, le vigneron défend celui de deuxième climat pour Denarius, issu de parcelles voisines de Liber Pater. « Bordeaux a des climats, avec des expressions de lieu différentes. Le problème de Bordeaux est de créer des goûts, de décliner une fiche technique. Ça ne fonctionne plus, les gens ne veulent pas de produits stéréotypés » juge le vigneron des Graves, qui souligne le potentiel viticole de la Gironde : grâce à ses vignerons, « Bordeaux est aujourd’hui imbattable au niveau du rapport qualité/prix, mais a perdu la bataille du cœur ».
Considérant que Bordeaux fait « du vin comme de la soupe », avec les cépages et les barriques comme ingrédients, Loïc Pasquet promeut une philosophie bourguignonne des climats, mais avec un fort accent sur les cépages qui l'on ne retrouve cependant pas en côtes de nuits. Soulignant l’unité de terroir en Bourgogne, le professeur retraité Jacky Rigaux explique que le pinot noir suffit aux climats bourguignons. Si la cuvée Denarius incorpore d’anciens cépages (tarnais, castets et saint-Macaire), elle reste à dominante de cabernet-sauvignon (sous le nom local de petite vidure).


Alors que son étiquette affiche la mention « domaine » (voir encadré pour l'évolution depuis la publication originale), réservée aux vins avec indication géographique (AOP et IGP), Loïc Pasquet conserve son flegme pince-sans-rire : « ça fera un nouveau procès, c'est de la publicité gratuite ». De fausses facturations dans un dossier de subventions auprès de FranceAgriMer ont précédemment conduit Loïc Pasquet et Liber Pater devant les tribunaux (cliquer ici pour en savoir plus).
* : Avec quelques concessions techniques, comme le recours à des bouchons synthétiques (de marque Ardeaseal).
Suite à une mise au point de la Répression des Fraudes, Loïc Pasquet indique mettre à jour son étiquette et retirer le terme "domaine" initialement présent pour que sa nouvelle cuvée soit en conformité avec la réglementation.