rop osé le "Rosé Garcia" ? Ce vendredi 4 avril, la 31ème chambre du tribunal judiciaire de Paris (dédiée à la consommation, au travail et à la santé publique) entre en voie de condamnation pour publicité illicite d’une boisson alcoolique, selon l’article L 3323-4 du Code de la santé publique. Prononçant 97 500 € d'amendes, la juridiction sanctionne à 10 000 € l’acteur José Garcia (pour ses vidéos faisant la promotion de la marque Rosé Garcia l’été 2021), à 20 000 € la société Et Alors (propriétaire du site du restaurant les Niçois à l’origine du projet, dont 150 € avec sursis pour non-affichage de l'interdiction de vente d'alcool à des mineurs) et à 20 000 € d’amende avec sursis pour son directeur général (Luc Sananes), ainsi qu'à 5 000 € avec sursis le site de vente de vin en ligne Vinalia (pour la reprise des vidéos incriminées sur la page d’achat) et à 10 000 € le site Neo.tv (pour la diffusion de vidéos sur les réseaux sociaux).
« Un verdict sévère » indique, non sans satisfaction, un communiqué de l’association Addictions France, qui, après une tentative infructueuse de conciliation en 2023, a porté plainte pour attaquer des « infractions caractérisées » et défendre l’application de la loi Évin, en substitution revendiquée de l’administration*. Rapportant que « le tribunal met un terme à la comédie », l’association épingle « les vidéos où l’on pouvait notamment voir l’acteur distribuer des verres de vin et s’installer dans un vélo triporteur indiquant que ce trajet à bicyclette lui permettrait de “débourrer d’ici aux prochaines étapes” [qui] n’ont pas été défendues, leur illégalité étant probablement trop flagrante ».


Satisfaite de cette condamnation, Addictions France note cependant avoir été déboutée « concernant l’illicéité du conditionnement - c’est-à-dire sur l'appellation "Rosé Garcia” mais aussi pour la présence de la tête de l’acteur sur le packaging ». S’appuyant sur le verdict oral rendu par le tribunal, l’association rapporte « que s’il n’est pas interdit pour un acteur de produire une boisson alcoolique, il n’est en revanche pas admissible qu’il s’appuie sur sa notoriété pour la promouvoir ». Indiquant se réserver la possibilité de faire appel selon l’analyse du jugement écrit, l’association hygiéniste note que « le point relatif au conditionnement semble en apparente contradiction avec la position de la Cour de cassation sur le sujet ». L'association faisant référence au jugement de la première chambre civile du 5 juillet 2017 estimant, dans le cas de cannettes de bières Carlsberg représentant des footballeurs, que le packaging fait partie des supports publicitaires soumis à la loi Évin.
Passer à autre chose
Co-fondateur du restaurant parisien Les Niçois (Paris XI), Luc Sananes, espère qu’il en a fini avec ce dossier judiciaire. S’il juge lourdes les condamnations pour les vidéos, il est soulagé que la marque lancée ne soit pas interdite. « On a le droit de continuer à faire ce projet sympathique. On est contents » indique le restaurateur. Qui indique qu’« on n’a pas fait ça pour générer du stress : c’était tout l’inverse à la base » pointe-t-il, rapportant que tout le projet est né lors du confinement de 2021, comme un remède convivial à la longue crise covid. Sans agenda commercial indique Luc Sananes, les 10 000 bouteilles du lancement étant vendues 8,9 € sur le site, avec des frais de port de 7 € faisant perdre 20 000 € à la société la première année. Si les ventes de bouteilles de 75 cl ralentissent avec la crise viticole (passant sous les 70 000 bouteilles en 2024), l le format 25 cl marche bien dans les TGV (150 000 cols l’an passé).
Même soulagement par le résultat du procès pour le vigneron à l’origine de ce rosé : Jean-René de Fleurieu, du château de Montfrin (120 ha de vignes en bio dans le Gard). « C’est un débouché très important. On en fait une question de prestige. Et c’est important pour notre économie alors qu’une somme de chose font que les bilans se dégradent à la fin de l’année (des conditions de production de plus en plus dures aux droits de douanes aux États-Unis) » indique le vigneron gardois, qui martèle avoir accepté cette collaboration sur le coup de cœur avec l’acteur : « José Garcia est un personnage éminemment sympathique, qui a mis une grande part ludique au cœur de son existence, et dont la notoriété s’est construite sans jamais critiquer personne. Il met un peu d’humour dans l’univers du vin qui en manque beaucoup. »
Précédentes condamnations
Interpellant la filière vin, cette remise en question de l’implication d’une personnalité dans la promotion d’une production qu’il signe peut concerner d’autres stars, notamment dans le monde des rosés. En la matière, « Addictions France constate de plus en plus de collaborations pour la “co-création” de bouteilles en édition limitée entre un artiste et une marque d’alcool. Le but : nous faire oublier qu’il s’agit de publicité et contourner la loi » indique l’association, pointant que « la loi Evin a précisément été promulguée pour éviter, entre autres, l’égérisation des marques qui entraîne ces conséquences ». Ce qui avait conduit Addictions France à d’autres attaques : la chanteuse Lady Gaga et les champagnes Dom Pérignon, l’influence Anna RVR et les vins Gérard Bertrand… Et désormais José Garcia avec ses farces et ses mariachis.
* : Défendant que « les interdits protègent : respectons-les ! », Addictions France explique récemment que « la France fut avec la loi Evin adoptée en 1991 un pays précurseur en matière de santé publique » et qu’en « ce qui concerne la publicité en faveur de l’alcool, Addictions France assure le contrôle du respect de la loi Evin. Si le code de la santé prévoit aussi la compétence de la de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) en la matière, très peu de contrôles sont exercés par cette dernière, compte tenu des très nombreuses missions qu’elle doit piloter au regard des effectifs dont elle dispose. »