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Crise du vin ? Pas au Chili ! Une récolte 2025 rare qui dope les prix, et les ambitions, après les arrachages
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"A contre-courant"
Crise du vin ? Pas au Chili ! Une récolte 2025 rare qui dope les prix, et les ambitions, après les arrachages

En pleines vendanges, une filière vitivinicole chilienne combative et optimiste ce millésime. Englobant plus de 1 000 hectares de vignes dans 7 vallées viticoles, le groupe vinicole chilien Survalles se positionne parmi les tout premiers exportateurs du Chili : le point avec son directeur technique, Benoît Fitte, originaire d’Armagnac.
Par Sharon Nagel Le 02 avril 2025
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Crise du vin ? Pas au Chili ! Une récolte 2025 rare qui dope les prix, et les ambitions, après les arrachages
Expatrié au Chili depuis 25 ans, Benoît Fitte porte un autre regard sur le contexte vitivinicole mondial actuel, estimant que la filière vit une crise du pouvoir d’achat et non une crise de la consommation - crédit photo : Benoît Fitte
C
omment se présentent les vendanges chez Survalles cette année ?

Benoît Fitte : Cette année, les vendanges ont commencé début février avec une quinzaine de jours d’avance en raison des événements climatiques. En hiver, on a eu 400 mm de précipitations contre 800 mm l’année précédente, mais la quantité était suffisante pour commencer une période végétative avec des réserves en eau très complètes et des sols un peu plus frais. Tout le cycle était en retard jusqu’en décembre lorsqu’on a eu des températures très élevées, et même jusqu'à la mi-mars on avait des maximales au-delà de 30°C, ce qui est totalement anormal à cette période. Forcément cela entraîne une précocité, mais cela impacte aussi les rendements, avec des poids de grappes beaucoup plus faibles que les estimations initiales.

 

Que dire des volumes cette année ?

Nous sommes en train de terminer les blancs avec 25 % de moins comparé à nos estimations. Le même constat vaut depuis Santiago jusqu'à l’Itata, c'est-à-dire sur 450 km de latitude. Et la tendance est la même sur les rouges. Il faut dire aussi que le Chili a connu beaucoup d'arrachages. Au moins 20 000 hectares ont été arrachés, et en réalité je pense que nous sommes beaucoup plus proches des 30 000 ha. De plus, beaucoup de vignes n'ont pas été bien travaillées. En 2024, le Chili a récolté 930 millions de litres, à comparer avec 2023 qui dépassait les 1200 millions de litres. Après la petite récolte de 2024, si on fait 800 millions de litres cette année, ce sera vraiment un bon chiffre. On s'attend à une récolte la plus basse des 15 dernières années, ce qui aura obligatoirement des conséquences. La qualité cette année sera exceptionnelle. Les pinots noirs sont déjà fermentés ainsi que tous les sauvignons blancs et une grande partie des chardonnays sont en fermentation. Il y a des belles acidités naturelles et de la concentration.

 

Quelles seront les conséquences sur la commercialisation ?

En termes de marché, nous sommes face à un gros problème. Nous exportons les trois-quarts de notre production. En 2024, les exportations chiliennes étaient proches de 800 millions de litres, soit 500 millions de litres en bouteille et environ 300 millions de litres en vrac. En bouteille, nous serons certainement autour des mêmes volumes cette année. Moins de vin avec la même demande fera inévitablement augmenter les prix et une partie de la demande va donc changer de pays d’origine. Mais ceux qui proposent des vins d’origine Chili seront obligés d’acheter nos vins. Jusqu'à l'an dernier, les prix étaient vraiment très bas : un cabernet-sauvignon classique se vendait autour des 50 centimes d'euros le litre fob. Même si le prix monte à 75 cents, les acheteurs vont rester. Nos stocks à la fin de l'année 2025 seront extrêmement bas, car aux 800 millions de litres d’exportations, il faut ajouter le marché national. Fin 2024, les stocks avoisinaient 13 millions d’hectolitres, et on risque de terminer l'année 2025 avec des stocks proches de 10 Mhl, ce qui est historiquement bas. Nous assisterons à un très beau changement au Chili sur le deuxième semestre, avec à mon sens une forte augmentation du prix des vins. Le Chili est vraiment à contre-courant de ce qui se passe ailleurs. On sait très bien qu'en Europe on nage dans le vin. Au Chili, on sent déjà qu’on manquera de certaines variétés, à commencer par les blancs. Je pense que les pinots noirs seront également très difficiles à trouver cette année. Il va nous manquer du vin de toute façon.

 

Si la récolte 2025 se confirme autour de 8 Mhl, peut-on penser qu’il s’agit de la nouvelle norme, vu les arrachages ?

Le Chili est un pays libéral donc les choses se décident en fonction de l'offre et de la demande. Si le prix du raisin augmente, les Chiliens vont replanter des vignes. Donc on pourrait revenir à des niveaux autour de 10 Mhl ou 12 Mhl. Je suis persuadé qu'on va replanter les vignes. Je n'en ai pas encore parlé avec les pépiniéristes, mais je suis sûr qu'on est en train de commander des plantes pour 2026.

 

La filière chilienne craint-elle d’être touchée par des droits de douane aux USA, à l’instar des Européens ?

Nous sommes inquiets mais pas pour les mêmes raisons. Nous pensons que cela va plutôt nous ouvrir des opportunités aux États-Unis parce que forcément cela nous offrirait un avantage incroyable sur les vins européens. En même temps, si ces droits sont imposés, cela pourrait générer du protectionnisme de la part des Européens et l’Europe représente un gros marché pour nous. Pour en avoir parlé récemment avec les représentants de Wines of Chile, on espère qu'il n'y ait pas ces augmentations de droits de douane et qu'on réussisse à travailler autant avec les Américains qu'avec les Européens et forcément l'Asie. Pour le moment, nous avons une très bonne relation avec les États-Unis, donc on ne voit pas pourquoi ils augmenteraient nos droits de douane. Surtout qu'il y a beaucoup d'investissements américains sur le sol chilien, en priorité dans les minerais.

 

Quelle est la dynamique à l’exportation des vins chiliens actuellement ?

La dynamique à l’export est intéressante. On se rend bien compte que ce n’est pas une crise de consommation mais plutôt une crise économique. On ne pense pas que les consommateurs n'aiment plus le vin sinon qu'ils orientent leur argent sur d'autres produits ou qu’ils se restreignent sur certains produits dont le vin. Nous en sommes vraiment persuadés. Nous avons remarqué à l’exportation que nos hauts de gamme sont beaucoup plus difficiles à vendre, et qu’il y a une forte concentration sur les entrées de gamme. On voit bien que notre prix moyen à l'exportation est en baisse. C'est donc une crise du pouvoir d'achat. On pensait que c'était les jeunes générations qui ne buvaient pas de vin, mais elles n'en ont jamais bu de toute façon. Il n'y a pas de changement de consommation. Avec la crise, la guerre en Ukraine et depuis la pandémie, on voit bien de gros changements, on voit bien que l'inflation a appauvri les gens.

 

Quelles tendances prévoyez-vous pour 2025 ?

En termes de commercialisation, nous prévoyons une quasi-stabilisation. Il n’y aura pas de surprise cette année. Au mieux, on devrait faire 10 % de plus que l'an dernier, mais ce sera plutôt autour de 5 %. Tous les producteurs du Chili sont sur une pente ascendante depuis quelques mois. Chez Survalles, à côté de nos vins traditionnels depuis le haut de gamme jusqu’à l’entrée de gamme, nous innovons avec des vins désalcoolisés et des cocktails. Ce sont des tendances mondiales. Nous développons aussi notre marque iconique "Toro de Piedras" qui est la marque de vin premium la plus vendue au Chili. Nous nous focalisons sur la vente en bouteilles car cette année le prix des raisins a doublé par rapport à l’an dernier. Inévitablement, le prix des rouges est en train d’exploser et rouges et blancs seront positionnés au double du prix de l’an dernier. On ne sera donc pas compétitif sur le vrac par rapport à l’Europe ou à l’Australie. 2025 est une petite récolte très qualitative. Mieux vaut passer une année tranquille.

 

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Tous les commentaires (1)
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Grami Le 03 avril 2025 à 06:56:35
Eh oui ! L'équilibre offre demande est une règle fondamentale en économie, faudrait l'expliquer à quelques uns de nos dirigeants qui eux pratiquent la politique de l'autruche. Et plus on attend plus cela empire ! Voir l'article sur l'état de la coopération.....
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