as épargné par les incertitudes et difficultés frappant la filière vin, mais constant dans ses ambitions. Le groupe Boisset veut continuer de gagner des parts de marché martèle à ses équipes commerciales Jean-François Curie, le directeur général du négociant américano-bourguignon (40 % d’activité en Californie et 60 % en France, dont la moitié en Bourgogne) à l’occasion du salon ProWein (16-18 mars à Düsseldorf). Le groupe y étant présent moins pour prospecter de nouveaux clients que pour consolider l’existant, « on lance de nouveaux produits pour être plus fort chez les partenaires existants et y étendre nos positions. La seule façon de se développer, c’est d’être présent chez les gros » résume Jean-François Curie. Très dynamique sur les vins effervescents (représentant 10 % de son activité française), Boisset mise sur les vins tranquilles pour son développement.
Rapportant une progression conséquente de son activité dédiée aux vins du Rhône (25 % de son activité française), le négoce estime qu’il y a encore des marges de progression avec son négoce dédié (Gabriel Meffre, basé à Gigondas dans le Vaucluse) et des marques en consolidation (Chasse du Pape, née à Châteauneuf-du-Pape et en développement sur les Côtes-du-Rhône Villages). Constatant qu’il n’y a « pas tant de grands opérateurs majeurs et internationaux capables de prendre des parts de marché sur des produits de masse valorisés (il ne s’agit pas de premiers prix) », Jean-François Curie l’affirme : « on croit beaucoup à la région, elle est en progression régulière. Nous sommes industriellement prêts à y développer des marques. » Autre segment de vins tranquilles concentrant les attentions de Boisset : les vins rosés de Provence. Y développant la marque Villa Moncigale (lancée en 2024). « Même si la catégorie est saturée, il y a des places à prendre sur les rosés de Provence » estime le directeur de Boisset qui croit dans les marques génériques.


Ayant un réseau commercial implanté à l’international grâce aux vins de Bourgogne, le groupe mise sur les synergies pour mettre en avant une offre accessible de vins du Rhône et de Provence pour les consommateurs. Il faut dire qu’en regard les vins de Bourgogne sont sortis depuis longtemps de la distribution de masse (même si Boisset enregistre du dynamisme à Chablis et continue d’appuyer le Beaujolais malgré des valorisations compliqués). Dans un marché du vin marqué par la décroissance, Boisset estime qu’il y a des occasions à ne pas laisser filer, mais à saisir et faire fructifier. « On souffre comme tout le monde, nous sommes dans un cycle qui fait mal et qui nous préocuppe à court terme*. Mais sur le long terme, il serait fou de se replier quand on voit tellement d’opportunités pour les vins de gagner des parts de marché » indique Jean-François Curie.
Idem pour les vins effervescents, qui misent sur la diversification répondant à toutes les cibles de consommation. Boisset vient ainsi d’acquérir fin 2024 les vins de marque Grand Courtâge. Une étiquette créée par l’entrepreneure californienne Tawnya Falkner pour mobiliser l’image intemporelle de la France (Paris, la Riviera…) avec des effervescents ciblant les consommatrices avec un format pratique (la moitié des volumes est commercialisée en demi et quart de bouteilles). Soit une marque lifestyle ayant l’intérêt de ne pas être ancrée sur un terroir pointe Jean-François Curie.
Cuvée psychédélique
A l’opposé du spectre, la marque Louis Bouillot fête les 50 ans de l’appellation crémant de Bourgogne avec une édition limitée psychédélique. Baptisée "flashback 1975", cette cuvée en étui limitée à 9 000 cols et vieillie 7 ans sur lattes marque une volonté de montée en gamme (elle sera commercialisée 15 € en avril sur le secteur traditionnel). Une sortie des sentiers battus qui suscite l’intérêt des acheteurs note Pierre Jury, le directeur de l’activité effervescente de Boisset, qui rappelle que la tradition des bulles est ancienne en Bourgogne et doit logiquement passer par la reconnaissance de climats à l’avenir. Ayant déjà une gamme de "terroirs", la marque Louis Bouillot veut valoriser les crémants, ce qui est une nécessité pour assurer l’approvisionnement de la matière première, en concurrence avec les vins tranquilles pointe Pierre Jury.
* : Pointant que la commercialisation des vins reste cyclique et qu’il a la chance d’avoir un portefeuille diversifié (des vins du Sud de France aux grands crus de Bourgogne), Jean-François Curie relativise les incertitudes actuelles, notamment la réalité des menaces de taxes à 200 % « une provocation de plus ». Le directeur regrette surtout le chaos qui en découle : « le marché nord-américain n’avait pas besoin de ce chaos. Cela créé des incertitudes sur les commandes, avec des retards, annulations… »