n peut parler de continuité des services de l’état d’urgence face à la crise de la filière vin. Affaire courante ou pas depuis la démission du gouvernement sortant (actée ce 16 juillet), « l’activité agricole ne peut pas être mis en pause. On ne peut pas éteindre les machines et le ministre [Marc Fesneau] a été sur le pont comme en temps normal » indique-t-on au ministère de l’Agriculture, à l’occasion d’un bilan sur les dernières actions menées pour la viticulture française avant l’annonce du nouveau gouvernement. En termes de stratégie collective, « la filière vin a une logique de plan de filière et d’une approche structurelle, ce qui n’est pas forcément le cas dans toutes les filières. L’outil d’arrachage correspond à ce travail structurel et nous pouvons le saluer » pointe-t-on rue de Varenne.
Actée ce jeudi 19 septembre par la France (sous réserve de validation européenne) après des annonces datant du 31 janvier (en pleine crise agricole), la demande d’arrachage définitif à 4 000 €/ha pour 30 000 ha* marque l’aboutissement de longues négociations entre Paris et Bruxelles sur les dispositifs définitifs et temporaires initialement inséparables : « nous avons commencé les discussions en février avec la Commission européenne, qui a été saisie officiellement par une note en juillet, une fois le principe bien labouré en informel » explique le ministère. Alors que les discussions semblaient tourner en rond, « le ministre est intervenu pour que ça débouche. La Commission ayant lancée un Groupe à Haut Niveau, et pouvant avoir la velléité d’en tirer les conclusions pour voir ensuite ce qui sera fait dans chaque Etat Membre, le ministre a porté l’urgence du besoin et la volonté de la filière d’aller vite. Par rapport à d’autres Etats Membres, on a été plutôt moteur dans la gestion des difficultés du secteur viticole. » D’où la scission en deux des mécanismes d’arrachage : « ce ne sont pas les mêmes implications entre l’arrachage définitif et l’arrachage temporaire, on crante par la notification l’arrachage définitif. » Et l’arrachage temporaire doit désormais être discuté par le Groupe à Haut Niveau des politiques vitivinicoles.
Il restera au prochain gouvernement d’appliquer l’intégralité de la promesse faite par le ministre Marc Fesneau : investir 150 millions € dans l’arrachage des vignes excédentaires. La notification pour l’arrachage temporaire indique 120 millions € : « cela correspond à ce qui est imaginé [comme besoin]. S’il y a plus d’engouement que prévu, l’annonce du gouvernement au début d’année a vocation à être tenue » esquisse le ministère. Mais avec un nouveau gouvernement, il reviendra au nouveau locataire du ministère de l’Agriculture de le concrétiser. De nombreux autres dossiers attendent le prochain ministre, ou la prochaine ministre d’après les dernières rumeurs. A commencer par la révision de la loi Egalim, dans laquelle la filière vin souhaite pouvoir s’inscrire. Si une mission parlementaire travaillait le sujet, la dissolution a remis les compteurs à zéro : il faut un parlement en session et un gouvernement qui ne soit pas d’affaires courantes pour avancer sur une loi dédiée.
Idem pour la gestion des vignes en friche : « pour ce dossier sur la flavescence dorée, il faut un article de loi pour avancer. Nous avons travaillé dessus » précise le ministère. Concernant l’évolution de l’aide à la transmission du foncier viticole, il s’agit de fiscalité et donc « il faut un projet de loi de Finances (PLF 2025). Sur le sujet du TODE, cela doit relever du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) » entend-on rue de Varenne. Sur le soutien concret demandé contre les menaces de taxes chinoises antidumpings ciblant l’Armagnac et le Cognac, la périphrase montre son talent diplomatique : « la France a pris acte de l’ouverture de cette enquête et les autorités françaises sont confiantes sur la procédure. C’est avant tout un sujet européen que nous suivons finement en restant dans l’accompagnement des filières. » La viande porcine et les produits laitiers étant également dans le viseur chinois, à cause de taxes européennes sur les voitures électriques venues de Chine.


Après un millésime 2024 de nouveau éprouvant pour les rendements viticoles, la question de la moyenne olympique pour l’assurance multirisque climatique se pose encore plus crûment que l’an passé. Pour le ministère, le travail est en cours : « nous avons porté la demande dès la réforme de la Politique Agricole Commune (PAC). Le Parlement avait porté un amendement pour sortir le dispositif assurantiel de la moyenne olympique, qui n’a pas été repris par opposition de la Commission et d’un certain nombre d’Etats Membres. Le ministre porte régulièrement le sujet à Bruxelles : c’est une disposition issue des accords du GATT de 1992, quand l’impact du changement climatique n’était pas tout à fait celui d’aujourd’hui. Le sujet est porté, avec conviction et constance, par la France. Nous espérons que ça portera ses fruits. Cela nécessiterait une modification du Conseil et du Parlement à apporter dans son plan stratégique. »
Et sur le sujet brûlant de la simplification administrative depuis les manifestations de l’hiver, « le ministre a déjà annoncé des premiers résultats entre avril et juin, les chantiers continuent par exemple sur l’identifiant unique, "ne le déclarez qu’une fois"… Cela demande pas mal de travail et de développement qui font que le fruit de certaines simplifications ne se verront dans les mois à venir. » Une perspective qui ne peut que donner envie à la filière vin sous pression administrative.