’abattant dans la nuit de lundi 17 à mardi 18 juin, la grêle a touché des pans du cru des bons bois en Charente-Maritime sur une bande de 1 à 3 km de large depuis les communes littorales de Mortagne-sur-Gironde et d’Épargnes jusqu’au Sud de Saintes (Tesson, Gémozac…) d’après les premiers retours collectés par Anthony Brun, le président de l’Union Générale des Viticulteurs de Cognac (UGVC). Jusque-là épargné par le gel et contrôlant la pression mildiou, le vignoble charentais a « l’impression de vivre les premiers coups de semonce » alors que « les prévisions des jours à venir ne sont pas rassurantes », avec l’annonce d’orages « le risque n’est pas du tout terminé. C’est déjà trop et on espère qu’il n’y aura pas plus. »
Maire de la commune d’Épargnes, le vigneron Frédéric Duret, au domaine Côtes de l'Estuaire (20 hectares) constate des dégâts conséquents sur ses parcelles de Mortagne-sur-Gironde : 40 à 50 % sur feuilles, branches et grappes (mais peu d’impact sur les bois de taille). « S’il n’y a que ça, on pourra gérer avec les quotas faibles. Mais il ne faut pas de deuxième épisode comme ça » soupire-t-il, alors qu’il assure la protection de son vignoble (qui tient jusqu’ici face au mildiou) et s’interroge sur l’impact des fortes pluies sur la fleur (en cours sur ugni blanc). À Virollet, on entend également dans un domaine qu’il ne reste plus grand-chose de certaines parcelles de sauvignon blanc, complétement passées au hachoir et aux sols détrempées.


Sébastien Volette, vigneron à Gémozac dont 30 ha d’ugni blanc en bons bois sur 40 sont touchés par la grêle. « Il y a des secteurs au moins à 50 % de dégâts. Les feuilles sont bien hachées des deux côtés et par terre. Par endroits ce n’est pas joli, il ne reste plus que du bois. J’attends de voir les impacts sur grappes. La floraison était quasi finie » pointe le vigneron, qui sulfate ce qui reste après 30 mm de pluie. Ayant une assurance climatique contre la grêle, le vigneron se montre philosophe : « on va pouvoir partir plus tôt en vacances. C’est malheureux à dire, mais que peut-on y faire ? » Quant au risque d’orages le reste de la semaine, « il se passera ce qu’il se passera. L’été va être long. On ne peut rien y faire. »
« C’est un gros orage qui est tombé sur ugni blanc, colombard, merlot… Les feuilles sont hachées, les grappes coupées, il y a des impacts sur bois… » confirme Bastien Petit, qui exploite 23,5 hectares de vignes touchées à 75 % sur la commune de Gémozac et dont les 12 ha de pépinières ont été plutôt épargnées (ayant été plantées il y a quelques jours). « On croise les doigts pour que ça continue comme ça. Les prochains jours ont l’air un peu moins risqués » ajoute le pépiniériste.


Devant faire le tour des dégâts de grêle, l’UGVC indique par son président qu’« il va falloir quelques jours pour connaître l’effet des 40 mm d’eau tombés en un quart d’heure sur la pression maladie et la floraison dans parcelles. Ça ne fera pas de bien au final, et l’impact n’ira que croissant [alors qu’il demeure] une vive inquiétude avec les conditions météo qui sont annoncées pour les jours à avenir » résume Anthony Brun, qui note que ces orages « tombent au plus mauvais moment avec leur pluviométrie intense et le vent » pouvant ajouter de la coulure aux dégâts. Dans l’immédiat, la seule certitude est que le millésime 2024 n’aura pas la générosité record de l’historique vendange 2023. « Sans aléas, on sera dans la catégorie des rendements historiquement bas » note le viticulteur de Saint-Bonnet-sur-Gironde, rapportant que le vignoble passe désormais d’un excès à l’autre. Après les sécheresses répétées, on rapporte désormais des dégâts d’excès d’eau sur certaines parcelles (avec des asphyxies racinaires, des secteurs ayant reçu 2 000 mm de pluie en un an). « On a l’impression que tout est dans l’excès » conclut Anthony Brun.
Les sols sont détrempés, avec 30 mm mesurés sur ces parcelles. Photo : Sébastien Vollette.