es vins nature ont-ils des attributs sensoriels différents des vins conventionnels ? Ces attributs affectent-ils la qualité perçue par les consommateurs et les professionnels ? C'est ce qu'ont vérifié des chercheurs, dont Jordi Ballester, de l'Institut universitaire de la vigne et du vin de Dijon, en demandant à 35 vignerons espagnols et français de regrouper selon leur ressemblance 12 vins rouges nature et 12 vins rouges conventionnels équivalents en termes de cépages (grenache, tempranillo, sumoll, trepat, graciano et mencia), de régions viticoles (Aragon, Castille-et-León, Catalogne, Navarre et Rioja, types d'élevage (cuve inox et barrique) et prix (10 à 20? la bouteille).
A l'aveugle, les dégustateurs n'ont pas toujours réussi à discriminer les deux types de vin. 55% des vins nature se sont retrouvés mélangés à des conventionnels. Alors qu'une précédente étude avait montré que les œnologues ont tendance à classer spontanément les vins dans la catégorie nature quand ils y trouvent des défauts, selon les chercheurs, ces résultats sont la preuve que « contrairement à certains discours binaires, les vins nature ne sont pas systématiquement imparfaits et qu'il est possible de vinifier des vins « propres » grâce à des méthodes naturelles ».
Après avoir demandé aux vignerons de donner des descripteurs pour expliquer les critères leur ayant permis de faire leur tri et de classer les vins selon cinq niveaux de qualité, de médiocre à exceptionnelle, les chercheurs ont remarqué que les 45% de vins nature que les dégustateurs avaient réussi à démasquer présentaient des odeurs associées à l'absence de dioxyde de soufre et au manque de contrôle microbien pendant les fermentations. Ces résultats sensoriels ont été corroborés par des analyses chimiques révélant des niveaux notablement plus élevés d'acidité volatile et de turbidité, ainsi que des valeurs plus faibles de SO2 libre et total, proches de 5 mg/l et 20 mg/l.
Les chercheurs ont noté que les Français avaient donné des notes moins mauvaises aux vins nature que les Espagnols. « Peut-être parce que le marché est plus développé dans l'Hexagone et qu'ils en ont plus l'habitude de ces vins » supposent-ils.