es 25 membres du Groupement des producteurs-négociants du vignoble alsacien (GPNVA) qui participaient à la troisième dégustation du nouveau millésime avec 150 vins ont présenté un 2023, tout en fraîcheur et en fruit, « comme les consommateurs aiment en boire aujourd’hui », selon l’expression de Thomas Boeckel, président du GPNVA.
A la demande du groupement, chacun avait également sélectionné un gewurztraminer représentant largement les années 2000 et un plus ancien, de 1990. « Le GPNVA veut redorer le blason du gewurztraminer » explique Thomas Boeckel. « Nous en vendons par exemple beaucoup en Chine, en Angleterre et en Suisse. Mais il est difficile de trouver un dénominateur commun entre ces marchés » ajoute Jacques Cattin fils, vice-président du GPNVA. « C’est un cépage dont les gens se souviennent quand les accords sont réussis comme avec des gnocchis à l’estragon et à l’ail des ours, une caille farcie aux raisins, les fromages de chèvre ou à pâte persillée » rappelle pour sa part Tristan Ringenbach, sommelier au restaurant Valtrivin à Lapoutroie, chargé de commenter cette sélection de gewurztraminers.
« Le gewurztraminer correspond plutôt à la demande d’une clientèle vieillissante. Son avenir semble difficile, mais on ne peut pas simplement laisser tomber le sujet. Il faudra peut-être en réduire la surface » analyse Ludovic Hauller, producteur-négociant à Dambach-la-Ville, qui a cessé de produire du gewurztraminer macéré en raison « de l’absence de débouché ». A Barr, la maison Charles Wantz creuse cette piste. Son gewurztraminer égrappé et « infusé » une semaine est une vinification qui s’ajoute au gewurztraminer aromatique traditionnel à 13 g de sucre restant, sa version sec à 2 g et à un assemblage comportant 50 % de ce cépage.
« Le gewurztraminer est moins populaire. Il a besoin d’un coup de boost » juge Grégory Zancristoforo, l’œnologue d’une cave qui traite annuellement la production de 25 ha et qui a descendu de 20 à 15 % la part du gewurztraminer dans ses apports. Etienne-Arnaud Dopff, PDG de Dopff au Moulin à Riquewihr, se veut plus optimiste. « Le marché repart. Les stocks [de gewurztraminer] issus des bonnes récoltes 2016, 2017, 2018 sont quasiment résorbés. Nous avons pris le parti d’en faire un vin de gastronomie qui gagne à s’affiner en bouteille ».
Pour saisir l’importance du défi posé il faut rappeler que le gewurztraminer est le troisième cépage le plus planté sur les 15 620 ha du vignoble alsacien. A 3 153 ha, il talonne le pinot blanc et le riesling qui le précèdent de peu avec respectivement 3 356 et 3 302 ha. Le gewurztraminer pèse ainsi 20 % de la surface et reste la deuxième vente d’Alsace derrière le riesling. Son niveau élevé de stock a conduit il y a trois ans la profession à abaisser son rendement autorisé à 55 hl/ha, le plus bas niveau de l’appellation Alsace contrôlée.
En 2023, les ventes de gewurztraminer ont tutoyé les 120 000 hl pour 925 000 hl écoulés sur l’année.