ancée en 2018 sous l’impulsion des interprofessions du Languedoc-Roussillon (CIVL, CIVR, InterOc), la plantation, à titre expérimental, des variétés Bouquet s’accélère. En 2024, 12 nouvelles parcelles représentant un total de 8 ha intègrent ce programme portant à 33 ha la surface totale plantée avec ces variétés dans les quatre départements du bassin viticole. Et pour 2025, la demande ne faiblit pas, bien au contraire. Si les opérations de greffage menées par le centre IFV de Lisle-sur-Tarn se déroulent bien, 22 ha supplémentaires seront plantés par quinze nouveaux vignerons.
« Cette montée en puissance résulte de la conjonction de deux paramètres : une demande croissante des vignerons qui souhaitent tester ces variétés et une disponibilité accrue en plants, même si elle reste encore insuffisante. Nous ne pouvons satisfaire toutes les demandes, certains candidats sont sur liste d’attente », souligne Marie Corbel, directrice technique au CIVL, en charge du pilotage de cette expérimentation.
Les vignobles Foncalieu font partie des candidats à la plantation pour 2025 : « Nous avons déjà planté 75 ha de cépages résistants (Resdur et variétés allemandes et italiennes) , mais il est vrai qu’à la dégustation, ce sont les variétés Bouquet qui semblent le plus intéressantes. Nous avons demandé à planter 3 variétés en 2025 : le 3179, descendant du grenache et deux variétés à petit degré : le G9 en blanc et le G14 en rouge. Pour avoir des volumes suffisants, nous prévoyons d’avoir 2 ha de chaque variété, réparties chez plusieurs viticulteurs. Commercialement, ces variétés résistantes sont difficiles à vendre, car inconnues des consommateurs. Le marché n’est pas prêt, mais je suis sûr que c’est une question de temps », indique Gabriel Ruetsch, le responsable du service agronomie des Vignobles Foncalieu.
A ce jour, sept variétés Bouquet sont expérimentées dans le bassin viticole : trois sont plus ciblées pour des vins à faible degré, deux dont le dernier croissement a été fait avec le grenache, une avec le chasan et une avec le fer servadou. La variété la plus plantée (9 ha) est le 3176, un descendant du grenache, mais les deux variétés blanches à petit degré ont également eu du succès (5 ha chacune), tout comme le 3179, un autre descendant du grenache. Toutes ces variétés sont actuellement en classement temporaire, un statut qui limite les possibilités de plantation à 1 ha par variété et par exploitation et 20 ha à l’échelle du bassin viticole. Les vins issus de ces plantations expérimentales ne peuvent être commercialisés qu’en vin de France. Enfin l’ensemble des parcelles expérimentales font l’objet d’un suivi annuel dans le cadre du dispositif Oscar-Oc.
Jérôme Pépin, producteur-négociant à Bagard dans le Gard, est un des pionniers qui, dès 2018, se sont engagés dans le dispositif expérimental. « J’ai choisi deux variétés à petits degrés : le G14 en rouge, le G9 en blanc. Ce sont des variétés très vigoureuses, surtout le blanc. Il faut bien les palisser. La résistance à l’oïdium est totale, pour le mildiou, on voit les attaques mais elles sont rapidement contrées par la plante. Par contre, elles sont sensibles au black rot, mais avec deux traitements, on contient la maladie. D’un point de vue œnologique, le blanc est très aromatique, avec beaucoup d’acidité et peu d’alcool (10 à 11%vol.). Il me semble intéressant pour l’élaboration de vins effervescents. Le rouge est plus difficile à maîtriser : ce sont les macérations courtes qui semblent convenir le mieux, pour obtenir des vins fruités, légers en alcool et sans amertume Je le vends à la tireuse au caveau. C’est un produit qui marche très bien ».
A la demande des professionnels, l’Inrae a accepté d’intégrer à partir de 2025, 6 autres variétés Bouquet en classement temporaire, offrant ainsi la possibilité aux vignerons de les planter à titre expérimental. Trois de ces variétés ont pour dernier parent le cabernet sauvignon, trois autres les marselan, la dernière est une variété blanche qui descend de l’aranel. Les premières plantations auront lieu en 2025. Jean-Claude Mas des domaines Paul Mas à Montagnac, par exemple, va tester le cabernet-sauvignon. Fabien Gross, également vigneron à Montagnac, a, lui, choisi le marselan.
Suite à un accord conclu en février 2023 entre l’Inrae/IFV et les interprofessions d’Occitanie, il est prévu que 9 des 13 variétés expérimentées, soient inscrites au catalogue et au classement définitif, autorisant ainsi leur plantation sans restriction sur le territoire national. Ce classement définitif interviendra progressivement à partir de 2025. « Nous sommes satisfaits de voir qu’année après année, les dégustations des vins issus de tous ces essais confirment le bon niveau qualitatif de ces variétés qui restent dans la typicité des cépages de nos appellations. La diversité des parcelles et des vignerons engagés dans ce programme conforte ces bons résultats. Ce projet est désormais sur les rails et nous nous préparons au déploiement de ces variétés en anticipant la production des plants », se réjouit Jean-Benoît Cavalier, président de la commission technique du CIVL.