enant ce vendredi 19 janvier sa dégustation de pré-primeurs du millésime 2023 au stade Matmut Atlantique (Bordeaux, Gironde), le réseau Enosens anticipe la semaine des primeurs (22-25 avril 2024). « Ce n’est pas dégustation de primeurs où l’on met en avant une propriété F1, on présente une cinquantaine de propriétés donnant une idée de la variabilité de ce qu’il y a ce millésime » explique Pascal Hénot, le directeur du centre œnologique de Coutras. Au-delà de la diversité des vins produits en 2023, Enosens met en avant la diversification du vignoble girondin face à la crise de déconsommation structurelle des vins rouges. « Les vins de Bordeaux se cherchent, toutes les pistes sont explorées » résume Pascal Hénot.
Des vins qui, à divers degrés, ne sont pas dans le canon bordelais traditionnel. Parmi ces iconoclastes, les vins blancs de noirs se distinguent. « Ce concept n’est pas nouveau dans le monde du vin, mais il n’est pas habituel à Bordeaux » note Pascal Hénot, qui en a suivi la production pour la première fois à Bordeaux en 2022 avec un domaine qui a été surpris par le succès commercial de cette offre (lui permettant d’ajouter une couleur aux rouges et rosés produits habituellement). Produisant plus de volume en 2023, ce domaine est resté sur la production d’un vin blanc à partir de raisins rouges à 100 % merlot. Au-delà de l’adaptation de l’itinéraire œnologique pour éviter toute coloration des jus, le vinificateur doit accentuer la présence en bouche du vin obtenu par l’élevage sur lies ou l’apport de boisé pointe Pascal Hénot.


La production de vin sans sulfites ajoutés est une autre tendance gagnant en force. Mais, « c’est plus facile à dire qu’à faire » prévient l’œnologue, pointant une « production extrêmement technique, sinon ce ne sera pas un vin nature, mais un vin dénaturé. Le sans sulfites demande beaucoup de technologies. Et ça reste une niche, pour une clientèle déjà existante. » Autre nouveauté, l’émergence croissante de cuvées monocépages dans les AOC bordelaises. Enosens présentait des vins 100 % malbec, cabernet franc, petit verdot, carménère… « Un exercice de style intéressant, plus dans le complément de gamme » note Pascal Hénot, y voyant une diversification « facile à faire, mais il faut viser juste pour la maturité et l’extraction comme on ne peut pas se rattraper sur l’assemblage ».
Tendance marquant l’actualité de ce Dry January 2023, la production de vins totalement désalcoolisés, à 0,0°.alc ne pouvait pas être absente de cette dégustation. Enosens suit des vins sans alcool obtenus par une distillation sous vide à 40°C. « C’est une production répondant purement à la demande. Ce n’est pas notre savoir-faire, il faut apprendre » rapporte Pascal Hénot, rappelant que « quand il n’y a plus d’alcool, il faut recréer un équilibre, trouver un style avec de l’acidité, du sucre, des arômes, du boisé… » N’en disant pas plus sur ses secrets de fabrication, l’œnologue y voit la principale difficulté du sans alcool : recréer les équilibres, sans pouvoir retrouver totalement le goût du vin originel. Pour compléter ces vins tranquilles innovants pour Bordeaux, il manquait à Enosens des vins orange (encore en vinification) et de cépages résistants (au mildiou et à l’oïdium).