Olof Gill : Nous suivons de très près la situation des marchés agricoles, et publions très régulièrement nos analyses sur le sujet afin que tous les acteurs puissent avoir les mêmes éléments, en toute transparence. Les producteurs de vins européens font face actuellement à des difficultés importantes, à la suite d’une chute de la demande couplée à une forte production.
Dans ce contexte, la Commission a permis aux États membres d'activer des mesures de distillation de crise pour des régions spécifiques ou des types de vins rouges/rosés en réelle difficulté. Le déclin à long terme de la consommation de vin rouge s'est accéléré récemment en raison de l'érosion du pouvoir d'achat des consommateurs et a commencé à affecter les régions les plus fragiles, dont certaines sortaient tout juste de la période COVID-19 avec un niveau de stocks important. La distillation se poursuit, en particulier en France qui prévoit de distiller les 3/4 du total des vins distillés dans l'Union Européenne. Nous pensons que cette mesure apporte un peu de soutien aux producteurs et contribue à réguler le marché.
Pourquoi l'examen européen de la demande d'arrachage sanitaire des vignes bordelaises prend-il autant de temps ?
La Commission est en contact avec les autorités françaises à ce sujet. Nous ne pouvons pas faire d'autres commentaires sur le contenu de ces contacts, ni préjuger de leur calendrier ou de leur résultat. Nous savons que les attentes sont grandes et nous vous tiendrons bien sûr informés de l'évolution de la situation.
L'arrachage, lorsqu'il ne s'inscrit pas dans le cadre d'une restructuration ou d'une reconversion des vignobles, ne peut bénéficier d'une aide au titre des programmes viticoles nationaux du règlement OCM et de l'intervention sectorielle du règlement sur les plans stratégiques. Il s'agit de règlements du Conseil et du Parlement européen qui, pour être modifiés, doivent faire l'objet d'une codécision de ces deux institutions. Nous savons que les autorités françaises ont conçu un programme d'arrachage soutenu par des aides d'État, en cours d'autorisation par la Commission européenne.
La filière viticole française demande toujours la création d'un système de restructuration différée, avec un report de plantation de 3 à 5 ans et une compensation des pertes de récolte. Quel est l'avis de la Commission à ce sujet ?
Le règlement du Conseil et du Parlement européen prévoit clairement la possibilité pour les États membres de décider que lorsque la replantation a lieu sur la même parcelle ou sur une parcelle ayant fait l'objet d'un arrachage, les autorisations de plantation sont valables pendant six ans à compter de la date à laquelle elles ont été accordées. Toutefois, la limite de la compensation financière est fixée à une période limitée à trois ans. Bien que nous soyons au courant de cette discussion en France, la Commission n'a reçu aucune question de la part des autorités françaises sur la création d'un tel système.
Le rapport de la Commission sur l'impact de la nouvelle réglementation sur la réduction durable produits phytosanitaires (SUR) indique une baisse de 27 % de la production de vin, mais la minimise en affirmant que la vigne n'est pas une culture vitale. Partagez-vous ce relativisme ? Comment maintenir la productivité et la compétitivité des vignobles qui souffrent déjà des aléas climatiques ?
Les vignobles, s'ils ne produisent pas d'aliments de base, sont bien sûr essentiels à la vie de nombreuses zones rurales. L'objectif fixé par la proposition SUR n'est pas spécifique à une culture, mais un objectif global pour chaque État membre. Il appartient aux États membres de répartir la charge sur les différents secteurs, en fonction de leurs spécificités, de la rapidité de l'innovation et de la disponibilité des solutions de remplacement.
Ce texte est actuellement en discussion au Parlement européen et au Conseil. Lorsque le processus législatif sera terminé, nous aurons alors à analyser la version finale du règlement.
Pourquoi la Commission ne s'est-elle pas opposée à l'étiquetage des messages sanitaires sur les bouteilles de vin en Irlande ? Est-ce là l'orientation souhaitée par la Commission pour l'avenir ?
L'Irlande a introduit une mesure pour répondre à un problème de santé publique national. En Irlande, l'incidence des maladies du foie et des cancers dus à une consommation excessive d'alcool est extrêmement élevée.
Le libellé des avertissements sanitaires obligatoires notifiés par l'Irlande a été évalué dans le cadre de la procédure de notification spécifique prévue par le règlement concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires. La Commission a soigneusement évalué la nécessité et la proportionnalité des avertissements sanitaires proposés par rapport aux objectifs de santé publique poursuivis dans un contexte national clairement défini et en ce qui concerne leur impact sur le marché intérieur.
Les autorités irlandaises ont démontré que les mesures notifiées ont été prises sur la base de preuves scientifiques et pour des raisons de santé publique dans un contexte national. Les restrictions du marché intérieur que les mesures ont pu entraîner étaient proportionnées à la réalisation de l'objectif de santé publique dans le contexte particulier de l'Irlande.
Pour préparer sa proposition visant à introduire des avertissements sanitaires sur les étiquettes des boissons alcoolisées, la Commission européenne concentre ses efforts sur la collecte d’informations. Cela aidera la Commission à définir les possibles prochaines étapes.
Lancée en avril, l’«Étude sur l’efficacité des informations sanitaires sur les boissons alcoolisées» s’inscrit dans le cadre de la collecte de données en cours par la Commission.