ygiène en cave, fermentescibilité du milieu, état sanitaire de la vendange… Nombreux sont les points à surveiller pour se protéger des Brettanomyces et autres germes d’altération. Mais pour Marie-Laure Nesme, ingénieure œnologue au laboratoire Les Vins Georges Dubœuf, à Romanèche-Thorins (Saône-et-Loire), « l’important, c’est surtout de détecter les Bretts à temps pour empêcher leur prolifération ».
Pour ce faire, elle utilise Vinobrett, un produit de la gamme Veriflow de BioMérieux, qui détecte ces levures dès 10 cellules par ml. « Nous l’utilisons en vinification et en élevage. C’est assez rapide et simple, même si cela nécessite une certaine rigueur au niveau des prélèvements, explique-t-elle. Il faut mettre des gants, nettoyer le dégustateur avec de l’alcool et récolter l’échantillon dans un tube stérile. Il faut savoir aussi utiliser une micropipette car on manipule de petits volumes de l’ordre de quelques microlitres. »
Après prélèvement et centrifugation, Marie-Laure Nesme transfère l’échantillon dans une machine PCR – un thermocycleur – où l’ADN des Bretts est amplifié s’il est présent. Puis elle dépose l’échantillon dans une sorte de cassette qui rappelle les tests de grossesse ou les autotests Covid.
Trois minutes plus tard, une première ligne rose apparait attestant que le test s’est bien déroulé et une seconde, si le vin renferme des Brett. A l’instar d’un test Covid, le résultat est semi-quantitatif. La couleur de la seconde ligne est d’autant plus intense que l’échantillon est plus contaminé. En la comparant à celles d’une carte, on estime si l’échantillon contient 50, 100, 500 ou plus de 1 000 cellules/mL, seuil critique. Pour quantifier plus précisément les résultats, un lecteur optique est disponible en option.
« On a identifié deux itinéraires techniques à risque : la vinification en foudre et les macérations longues de 15 à 20 jours pour lesquelles nous faisons des contrôles en fin de fermentation alcoolique ou en fin de malo, détaille Marie-Laure Nesme. Avoir le résultat le jour même nous a permis de prendre des décisions rapidement et de sauver des cuves. Dès que nous avons un doute sur un résultat, nous couplons toujours avec une boîte de Petri pour être sûrs de ne pas passer à côté d’une contamination car nous avons déjà eu des faux négatifs en vinification. »
Sarah Moreau, gérante des laboratoires Moreau Œnologie, à Meursault (Côte-d'Or), emploie ce test sur les moûts ou les vins, mais aussi pour contrôler les fûts après traitement à la vapeur. « On prélève un petit bout de bois de 3 mm que l’on met dans une solution puis qu’on analyse. Aléatoirement et une fois par mois, on compare nos résultats d'analyses PCR avec ceux d’une boîte de Petri. Vinobrett fonctionne bien, c’est très pratique. Mais il faut être rigoureux lors des prélèvements », observe-t-elle.
Marie-Laure Nesme et Sarah Moreau comptent parmi les toutes premières utilisatrices de ce test, jusqu’ici peu diffusé en France. Mais les choses devraient changer car Dujardin-Salleron a pris la distribution exclusive des produits BioMérieux cet automne avec la ferme intention de les diffuser plus largement.
Pour David Smart, responsable du développement commercial chez BioMérieux : « Vinobrett permet de déterminer l’apparition d’une contamination et de prendre des décisions rapidement. Actuellement, lorsqu’on passe par un laboratoire, il faut plusieurs jours pour obtenir le résultat d’une analyse PCR et une dizaine de jours pour une boîte de Petri. Quant à la cytométrie de flux, elle ne permet pas de détecter les Bretts dès 10 cellules/ml. »
Vinobrett peut être utilisé sur les vins en fermentation, les moûts, les lies, les eaux de rinçage... L’appareil détecte également les cellules viables mais non cultivables qui présentent un risque et qui ne sont pas détectées dans une boîte de Petri. « Et nous avons développé un kit qui détecte uniquement les cellules vivantes pour faire des contrôles après un traitement », ajoute David Smart.
Niveau coût, il faut compter environ 6 000 € pour un thermocycleur. À cela s'ajoutent l’achat d’une centrifugeuse, les tubes de réactifs, les cassettes permettant de réaliser l’analyse (30 € par test environ) et le matériel de prélèvement (micropipettes, consommables…) pour un coût total inférieur à 10 000 €.
Tout récemment, BioMérieux a élargi sa gamme Vériflow avec Bottlesafe bactéries et Bottlesafe levures, également fondés sur la technologie PCR, pour un dernier contrôle microbiologique juste après la filtration et avant la mise. Dans les deux cas, la réponse est donnée en moins de quatre heures et à un seuil de détection de l’ordre de 10 UFC/ml.
Le laboratoire Excell propose désormais la PCR-digitale, une technique plus sensible permettant de déceler les Bretts jusqu’à 1 cellule dans 10 ml, là où la qPCR possède une limite de quantification de 100 cellules dans 10 ml. « Le but est de chercher plus finement les populations et de mieux diagnostiquer les zones sensibles de la cave, eaux stagnantes, vannes et dégustateurs », explique Vincent Renouf, directeur du laboratoire. L’analyse sera proposée à un coût 10 % moins cher que la qPCR.