n marché bio à deux vitesses. En 2021, la France a consommé 1,2 milliard d’euros de vins certifiés bio d’après les dernières statistiques de l’Agence Bio. Soit une augmentation de 9,4 % par rapport à 2019. Une performance certes à un chiffre (loin des +23 % de 2017 ou +24 % de 2012), mais bien meilleure que celle d’autres filières alimentaires (voir infographies ci-dessous). Pour la bio en général, « la conjoncture est compliquée » indique Dorian Fléchet, le chargé de l'observatoire national de l'agriculture biologique pour l’Agence Bio ce 10 juin lors d’une visioconférence de presse. « On conjugue un effet de lâchage de la consommation en face d’un contexte inflationniste. Et les entreprises du bio arrivées il y a quelques années ont du pain sur la planche parce qu’il faut revenir aux fondamentaux : montrer que la bio est pour tous, partout, et que le bio ne soit pas la mauvaise variable d’arbitrage au niveau du portefeuille » explique l’analyste.
Dans ce contexte commercial difficile, les vins s’en tirent globalement bien, grâce à une bonne dynamique des ventes directes, qui pèsent pour 45 % ventes des ventes suivies par l’Agence Bio en 2021. Misant la tendance du local, ce réseau de commercialisation à la propriété représente 560 millions € (+12 %). En Grandes et Moyennes Surfaces, la commercialisation s’élève à 245 millions € (+5 % pour 23 % des ventes). Dans le réseau des artisans (bouchers, boulangers, commerces de proximité…), les ventes de vins bio atteignent 284 millions € (+12 % pour 22 % des ventes de vins bio). Dans la distribution spécialisée, 118 millions € de vins bio ont été commercialisés (+2 % pour 10 % des ventes). Suivies par l’Agence Bio, les ventes de vin en restauration ne sont pas précisées dans ces statistiques pour la filière vin.
Si cette vision d’ensemble est positive, elle ne masque les difficultés actuelles du marché des vins bio. Alors que des lots de vin en vrac bio ne trouvent pas preneur, il semble que le marché volumique usuel des vins, la grande distribution, ne soit pas suffisamment preneuse. En témoigne le premier recul des ventes de vin bio en GMS récemment enregistré par les panels IRI. La différence de dynamisme entre un marché direct porteur (mais de niche pour des opérateurs implantés localement et historiquement) et une grande distribution atone (où certains espéraient se substituer en masse aux références conventionnelles avec le prix valorisé du bio) ne peut qu’inquiéter sur les futurs équilibres entre offre et demande ; alors qu’arrivent de nouvelles surfaces actuellement en conversion (69 600 hectares de vignes étaient en conversion en 2021, +21 % par rapport à 2020) et que le vignoble certifié n’a cessé de croître (90 300 ha en 2021, +13 % en un an).
Si l’ombre d’une crise de croissance plane sur la viticulture biologique, l’Agence Bio se montre résolument optimiste pour l’ensemble de son label. En termes de « météo bio, certes il y a eu un grain cette année, mais il y avait un nuage sur l’alimentaire en général, pas que sur le bio. Cela reste contrasté, avec des relais croissances » note en conférence de presse Laure Verdeau, la directrice de l’Agence Bio. Appelant à regarder la photo d’ensemble, la dirigeante du groupement d’intérêt public note les bons développements en restauration : notamment collective (avec l’objectif réglementaire de 20 % d’achats bio), mais aussi commerciale (« en espérant que ce ne soit pas que sur le vin, c’est souvent par là que le bio rentre dans la restauration »).


Malgré cette sérénité affichée, l’Agence bio milite pour des aides à la commercialisation. Notamment de la part des interprofessions. « Ce n’est pas entendable qu’une partie des Cotisations Volontaires Obligatoires (CVO) qui arrivent dans les interprofessions et sont issues bio ne soient pas dédiées plus qu’elles ne le sont aujourd’hui à la promotion du bio » déclare Loïc Guines, le président de l’Agence Bio. Pour le producteur de lait bio en Ille-et-Villaine, « il faut booster la consommation, on a des producteurs qui arrivent et il ne faut pas les laisser en carafe ».
Dans ce nouveau contexte de croissance réduite, « pour le bio, l’enjeu n’est pas de se dire que c’est foutu, que c’est la bérézina, mais de voir comment continuer de progresser, peut-être moins vite qu’auparavant » ajoute Loïc Guines, interpellant la presse : « vous journalistes avez encensé la bio, ce n’est pas parce que la consommation s’est affaiblie qu’il faut retourner sa veste. Il faut soutenir la consommation de produits bio, qui ont des bénéfices pour l’environnement et la santé. Plus d’AB dans un territoire, c’est moins de traitement l’eau, plus de biodiversité, plus d’emploi… »
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