ans la plupart des bassins viticoles, les surfaces certifiées en bio se développent. Le marché du vin bio en vrac maintient un niveau de prix mieux valorisé que celui des vins conventionnels. L’évolution du marché apparaît toutefois difficile à estimer dans la perspective d’arrivée future de surfaces encore en conversion, et des orientations de la distribution.
En Occitanie, Nicolas Richarme, président de l'interprofession SudVinBio, annonce un volume de vins bios 2021 (AOP et IGP confondues) légèrement inférieur (-10 %) à celui de l’an passé. « Le volume atteindrait 1,1 million d'hectolitres (Mhl) en Occitanie, comparable à celui de 2019 », situe le président de SudVinBio, « même si ces chiffres ne peuvent être affinés, car basés sur un estimatif par enquête auprès d’un panel de producteurs ». D’autant que les vins bios ne sont pas nécessairement vendus et contractualisés en bios.
Au niveau des marchés, le négoce apparaît plutôt attentiste. Nicolas Richarme situe un marché « frileux » où le manque de visibilité se conjugue à « une situation commerciale de reprise ». « Le marché des IGP bio se fait habituellement avant Noël, ce n’est pas le cas cette année. Comme attendu, le marché se caractérise par une forte tension sur les blancs, le chardonnay en particulier », indique-t-il. Les vins de pays d’Oc chardonnay se négocient ainsi dans une fourchette de 220 à 230 €/hl selon le président de SudVinBio et le courtier spécialisé Gilles Louvet, contre 190 €/hl l’an dernier.
« Moins touchés, le cours des sauvignon suit cependant la même tendance. Le marché s’est emballé sur les blancs, alors qu’il n’y a pas de dynamique du côté des rosés. Cela reste très calme pour les rouges, d’autant qu’il y a des stocks dans les caves », ajoute Gille Louvet. Il constate de gros retards sur les achats de la part des metteurs en marché, avec des opérateurs importants du bio qui ne sont pas encore passés aux achats, à l’exception de renouvellements de contrats.
Le CIVL (conseil interprofessionnel des vins du Languedoc) indique que les volumes bios enregistrés par contrats représentent 4 % des volumes de vrac AOP du bassin.
En vallée du Rhône, Serge Vial, président du syndicat régional des courtiers en vins & spiritueux, estime à 180 000 hl la production 2021 de côtes du Rhône dans les trois couleurs, « une belle progression grâce aux surfaces certifiées qui arrivent, alors que ce chiffre se situait à 145 000 hl pour le millésime 2020 ».
Le marché se traite ensuite sur la base de contractualisations qualitatives récurrentes, autour de 190 €/hl en côtes du Rhône rouge. L’interprofession indique que sur les premiers mois de campagne, 22 000hl de côtes du Rhône 2021 ont été contractualisés, en hausse de 10 % par rapport à la même période l’an dernier.
En Provence, le marché bio se caractérisait jusqu’à cette année « par une demande supérieure à l’offre », avise Pierre-Jean Bertri, président du syndicat des courtiers de Provence. « Nous arrivons cette année à un aboutissement du travail mené par les caves coopératives sur ce sujet, si bien que les volumes disponibles augmentent. 20 % du vignoble des coteaux varois est en bio et cette tendance s’observe également en côtes de Provence », poursuit le courtier. L’interprofession avance le chiffre de 17 % des surfaces de côtes de Provence en bio.
Les cours de ces rosés d’AOP bios oscillent entre 350 et 370 €/hl, « à condition que la qualité soit au rendez-vous, c’est un critère essentiel », prévient Pierre-Jean Bertri.
Le syndicat Vignerons bio de Nouvelle-Aquitaine situe aux environs de 180 000 hl le volume de vins bios produits, toutes couleurs confondues, en Bordeaux et Bordeaux supérieur. La couleur rouge domine largement la production bio dans les appellations bordelaises.
Pour tout le bassin Bergerac-Duras, AOP et IGP confondus, ce sont près de 115 000 hl qui sont engagés en bio, plus de 25 % des volumes totaux produits.
Les prix sont suivis auprès du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB). « Depuis deux ans, le cours du Bordeaux rouge bio est stabilisé à 2 000 €/tonneau (222 €/hl). Il y a cependant beaucoup de conversions enregistrées en bordelais depuis quelques années, la crainte est donc réelle d’aboutir à une offre supérieure à la demande du marché », note Anne Hubert, chargée de mission expérimentations et économie pour les Vignerons bio de Nouvelle-Aquitaine.
Les chiffres à disposition du syndicat indiquent pour l’instant une demande en augmentation chaque année. « Nous remarquons également une évolution au niveau du négoce, qui ne se positionnait pas franchement jusque-là . L’évolution de l’offre à la hausse permet de les rassurer quant à la disponibilité des volumes, et leur permettre ainsi de proposer ces produits », poursuit Anne Hubert.
Les dégâts liés au gel et au mildiou tempèrent toutefois la disponibilité des volumes de Bordeaux en 2022, « car les volumes apportés par les surfaces nouvellement certifiées compensent à peine les pertes dues aux aléas de l’année », valide Anne Hubert.
En val de Loire, le mouvement de conversion des surfaces viticoles en bio tend à inquiéter Christine Thouron, présidente du syndicat régional des courtiers en vins et spiritueux. « Face à un marché mondial qui ne peut absorber que 20 % de la production bio, il est important d’avoir une stratégie de marché cohérente lorsqu’on s’engage dans cette démarche, avec des surcoûts de production qui ne seront pas absorbés par le prix de vente si les cours ne suivent pas », estime-t-elle. De nouveaux volumes sont en train d’arriver « alors qu’il y a du stock au sein d’appellations comme Cabernet d’Anjou ou Saumur-Champigny ». Elle constate en revanche une belle dynamique du côté de Chinon.
Nicolas Richarme avertit toutefois que ce marché des vins bios est structurellement alimenté par des particuliers, « le gros des volumes est donc conditionné et mis en marché en bouteilles par les producteurs ».