Jeu des différences

Quand un oenologue français rencontre l'effervescence italienne

ean-François Coquard n’a rien à voir avec les pressoirs champenois. Sa lignée familiale est bourguignonne, la champagnisation fait partie de sa vie. Diplômé d’Å“nologie de l’école de Bourgogne en 1999, il se forge une expérience aux Hospices de Beaune puis il part dans l’Oltrepò Pavese, au domaine Mazzolino. Son premier vin effervescent est un blanc de blanc (premier pied de cuve de 2002). Il fera partie des premiers de l’Oltrepò à produire le Cruasé, marque collective née en 2010 (méthode traditionnelle rosé AOC du Consorzio Tutela Vini Oltrepò Pavese), avec des raisins de pinot noir du terroir, la référence nationale.

Cela fait 18 ans qu’il travaille en Italie quant il rejoint l’exploitation Prime Alture, toujours dans l’Oltrepò Pavese, où il guide à l’élaboration d’un vin effervescent, 100 % pinot noir, mais cette fois en blanc, un blanc de noir.

L'innovation en Italie ?

Ce qu’il retient de la différence entre l’effervescence entre la France et l’Italie est d’abord évidemment, la méthode d’élaboration. « En France, l’effervescence est presqu’exclusivement élaborée à partir de la méthode champenoise. Le Champagne est comme un maître absolu. En Italie, «il Metodo Classico» (la méthode traditionnelle) est très en vogue (Franciacorta, Trentodoc) mais c’est surtout la méthode charmat qui est employée, pour l’élaboration des asti, prosecco et un produit purement italien : le Lambrusco !». Cette différence de méthode d’élaboration pose les bases des atouts et des faiblesse de part et d’autre de la frontière. « La force de la France est son histoire, la puissance de la marque champagne, mais sa faiblesse est le faible développement de la méthode charmat. En Italie, c’est une catégorie qui se développe, entraînée par le Prosecco » indique Jean-François Coquard.

La seconde différence clé est, selon lui, l’envie d’innover, ce qui se traduit notamment par le choix des cépages. « En France, l’effervescence tourne autour du pinot noir et du chardonnay. En Italie, ces deux piliers existent aussi bien entendu, mais il y a beaucoup d’autres cépages autochtones, et une grande envie de les expérimenter. C’est la grande différence entre les deux pays. La France a l’histoire, et elle est très conservatrice. L’Italie a la technologie (elle est leader mondial des équipements Å“nologiques), l’inventivité et une richesse énorme de cépages autochtones. De plus, le rapport qualité/prix en Italie est très bon. L’Italie est dynamique, pétillante dans tous les sens du terme. Elle offre tant de choses à faire et à découvrir, pour un Å“nologue français ». L’Å“nologue français travaille également en France pour la société Coquard Vins, où il élabore un Crémant. Et il caresse une petite envie : « bienôt utiliser la méthode Charmat ! ».