Air Force Douane

t là, c’est le drame, racinien. « Ce changement est grand, ma surprise est extrême » peut soupirer de fatigue la filière vin, ajoutant dans une chamade d’affolement « dois-je croire, grands dieux ! ce que je viens d'ouïr ? » (Bérénice, 1670). Une seule chose est sure, ce jeudi 13 mars l’exportation des vins et spiritueux vient de rentrer dans le nouveau désordre mondial avec l’annonce tonitruante du président américain Donald Trump : une taxe punitive surréaliste de 200 % sur les bouteilles françaises en particulier et européennes en général. Brutale, cette menace ne sera levée par la Maison Blanche que si Bruxelles retire les taxes prévues sur les whiskies et autres produits américains, elles-mêmes appliquées en rétorsion aux droits douaniers de Washington sur l’acier et l’aluminium européens. Et voici les vignobles français empêtrés dans un embrouillamini de coups de menton et de pression… Qui menacent concrètement de leur fermer le premier marché mondial de consommation de vins, alors que toute la filière est déjà prise à la gorge par les crises (du changement climatique à l'inflation, en passant par la déconsommation, la transition écologique...). Un air de déjà vu moins que d'Air Farce One après les taxes Airbus/Boeing.

De quoi profondément agacer dans la filière des vins et eaux-de-vie, qui se sent toujours plus abandonnée par l’exécutif et la diplomatie, de Paris comme de Bruxelles. Malgré les alertes répétées de toute la filière pour ne pas être entraînée dans un conflit commercial lui étant extérieur, la machine infernale des mesures de rétorsion reste sur ses rails, qu’il s’agisse des menaces venues de Washington ou de Pékin. Malgré la mobilisation des exportateurs, l’enquête antidumping chinoise ciblant les cognacs se poursuit et coûte des millions d’euros à ses opérateurs. Si les gouvernements successifs ont prêté une oreille attentive et émue aux demandes des viticulteurs et négociants charentais, il n’y a toujours pas eu d’actions concrètes pour mettre un terme à l’engrenage qui met en péril des milliers d’emploi. Exportation te l’avait bien dit...

Ne pouvant qu'être renforcée sur sa lancée, la filière vin va maintenir la pression, mais il faut désormais que la France et l'Europe s'engagent avec de vraies actions pour espérer obtenir des résolutions. Rentrer fermement dans le bras de faire pour maintenir l'accès aux marchés dans la nouvelle donne géopolitique malgré les multiples incertitudes. Car « l'on doit hasarder le possible, toutes les fois que l'on se sent en état de profiter même du manquement du succès » analyse le cardinal de Retz dans ses Mémoires.