rtillerie de Champagne. Après l’opposition aux Vignes Semi Larges (VSL) et la tribune dans le Monde pour l’interdiction des herbicides (signée par 125 vignerons), voici venue l’initiative "Ça décoiffe !" pour rejeter en bloc « l'obligation du muselet et de la coiffe » en appellation Champagne. Soutenue par trois organisations pour le moins trublionnes dans le vignoble champenois (l'Association des Champagnes Biologiques, les Vignerons Indépendants de Champagne et la Confédération Paysanne), cette opposition veut rejeter la reprise au cahier des charges du vin AOC Champagne de l’article 57 du règlement européen délégué 2019/33, que Bruxelles a abrogé par surprise l’été 2023, ouvrant la possibilité de se passer de coiffes pour les bouteilles de Champagne
Réuni ce 11 septembre, le comité national des appellations d’origine viticoles a validé l’obligation d’une coiffe dans le packaging (« le bouchon des bouteilles est maintenu par une attache, couvert, le cas échéant, d’une plaquette et revêtu d’une feuille recouvrant la totalité du bouchon et, en tout ou en partie, le col de la bouteille ») à la demande de l’interprofession champenoise, qui souhaite maintenir un élément de packaging identitaire (et l’a déjà défendu devant la fronde naissante de 17 vignerons ce printemps). Reposant désormais sur un questionnaire en ligne, un compte Instagram et une page Facebook, le collectif "Ça décoiffe !" veut inonder l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO) de courriers dans le cadre de la Procédure Nationale d’Opposition (en cours jusqu’au 26 novembre prochain).


S’opposant à cette obligation, le collectif "Ça décoiffe !" défend la possibilité de se libérer d’un suremballage coûteux écologiquement et dispensable commercialement : « depuis l’assouplissement permis par l’Union Européenne, plusieurs producteurs champenois avaient fait le choix de s’en affranchir. Bandelettes de papier, ficelles, agrafes, etc… Ont dès lors trouvé leur place sur les bouteilles champenoises ces derniers mois ! Une petite révolution dans le monde des bulles champenoises, rencontrant qui plus est, un franc succès auprès des amateurs du monde entier ! » Reprochant à son Organisme de Défense et de Gestion (ODG) de ne pas avoir entendu ses demandes de modernisation de l’habillage du Champagne.
Porte fermée mais pouvant se rouvrir
Interrogé en septembre sur la modification de cahier des charges acté, Maxime Toubart, le président du Syndicat Général des Vignerons de Champagne (SGV), expliquait que « l’objectif est d’obliger à avoir une coiffe, pour ne pas avoir de choses qui ne correspondent pas aux codes du Champagne », en s’appuyant sur des études de marché affirmant que « la coiffe est un marqueur de l’appellation champagne. Il serait dangereux de risquer de le changer. » Soulignant qu’il n’existe pas que des coiffes en aluminium, mais que l’on en trouve aussi en papier, le vigneron champenois explique que cette obligation permet de cranter l’emballage des champagnes pour éviter de laisser la porte ouverte à toutes les expérimentations potentiellement dommageables. « On préfère arrêter et se mettre autour de la table pour voir et discuter » indiquait Maxime Toubart, ne gravant pas pour autant dans le marbre l’obligation de coiffe : « le but n’est pas de fermer la porte à tout, mais de trouver un compromis entre marketing, communication, environnement... Peut-être que dans quelques années la perception des marchés aura évolué. Rien n’est immuable. »


Pas de quoi satisfaire le collectif "Ça décoiffe !", qui lance avec prudence ce qui ressemble à une lourde accusation : « la question d’un possible conflit d’intérêt. Le Syndicat Général des Vignerons de la Champagne est également un important vendeur de coiffes pour les petits vignerons. Cette activité représente une part non-négligeable de ses recettes. » Avec cette grille de lecture, le communiqué collectif estime que « la décision d’imposer le port de la coiffe, prise de manière discrétionnaire et sur la base d’arguments discutables sur la notoriété de l’appellation, témoigne d’un véritable déni de démocratie dans la gestion de plus en plus "hors-sol" de l'AOC Champagne. Mais cette fois-ci les Champenois ont décidé de ne pas se laisser faire et d’agir ». Contacté, le SGV ne souhaite pas commenter. Un proche de l'ODG soulignant que les personnes réunies dans le collectif sont des habitués de la contestation, mais pas des lieux de débat qui sont ouverts pour l'avenir de l'appellation.
« Il y a 20 000 vignerons en Champagne, il est normal que l’on ne soit pas d’accord sur tout » concluait, philosophe, Maxime Toubart.