RDV obtenus par 1 500 manifestants et 120 tracteurs. Reçus ce mardi 24 septembre à Matignon et ce mercredi 25 septembre à l’Élysée, les représentants de Cognac et de l’Armagnac demandent des actions fortes pour éloigner la menace chinoise de taxes dissuasives les visant (34,8 % de droits de douane en moyenne) dans le cadre de l’enquête antidumping ouverte ce 5 janvier 2024 sur les brandies européens (dont les importations chinoises sont composées à 97 % d’eaux-de-vie françaises) la Chine étant le deuxième marché de l’Armagnac et de Cognac). Cette enquête antidumping sur les brandies étant la réponse de Pékin aux procédures de Bruxelles ciblant les voitures électriques chinoises, « la France doit trouver un terrain d’entente pour, a minima, reporter les taxes puis les annuler. Sans quoi la mobilisation des viticulteurs pourrait reprendre et se durcir après les vendanges si la situation restait figée » annonce un communiqué de l’Union Générale des Viticulteurs pour l’AOC Cognac (UGVC), à l’origine de la manifestation du 17 septembre dernier (la première depuis le blocus de Cognac en septembre 1998).
Portant trois demandes, l’UGVC a d’abord dans le viseur le conseil des ministres européens initialement prévu le 25 septembre prochain pour étudier un acte d’exécution portant sur de nouvelles taxes sur les véhicules électriques chinois. « Il doit être repoussé au maximum » indique l’UGVC, le risque étant fort que dès l’annonce de nouvelles taxes sur ses voitures, la Chine active les droits de douane sur les brandies. « Il devait avoir une réunion de ce qu’on appelle un comité de comitologie le 25 septembre et qui a été décalée » sans qu’une nouvelle date soit fixée, indique à Vitisphere la Commission Européenne, précisant que « la comitologie est la possibilité de prendre des actes d’exécution par la Commission européenne dans le cadre de ses compétences et sous le regard des États membres ».


Pour être adopté, un tel acte demande le vote pour d’une majorité qualifiée (55 % des pays de l’Union Européenne représentant au moins 65 % de la population totale). En cas de majorité qualifiée contre, l’acte est rejeté. Mais « s’il n’y a pas de majorité qualifiée pour ou contre l'acte proposé, la Commission peut l’adopter ou présenter une nouvelle version modifiée » indique Bruxelles, précisant ne pas pouvoir en dire plus alors que le sujet suscite des positions divergentes parmi les 27 Etats membres de l’Union.
Demandant donc à ce comité de se tenir le plus tard possible (il peut se tenir jusqu’au 31 octobre prochain dans le cadre de l’enquête antidumping européenne sur les véhicules électriques chinois), les opérateurs charentais et gascons veulent gagner du temps. Ces délais permettraient au gouvernement français de se saisir du dossier (et de ne pas prendre de positions publiques exposant ses filières), de peser sur les orientations européennes (d’autres Etats membres se positionnent, comme l’Allemagne et l’Espagne) et de pouvoir négocier une sortie de crise sans conflit commercial entre Bruxelles et Pékin (de premières rencontres se sont tenues).


« Les discussions entamées la semaine dernière à Bruxelles en présence du ministre chinois du Commerce doivent être poursuivies jusqu’à la définition d’un terrain d’entente ne faisant pas courir à notre secteur le risque d’être sacrifié » martèle l’UGVC, précisant que si « un vote doit finalement intervenir au niveau européen, la position prise par la France doit pleinement tenir compte du risque avéré pour notre filière et notre région et ne pas frontalement nous exposer aux rétorsions annoncées ». Notant les trois demandes, les conseillers spécialisés dans l’Agriculture du premier ministre, Michel Barnier, et du président de la République, Emmanuel Macron, ont été alertés sur l’impact qu’auraient les taxes chinoises sur les filières et territoires d’Armagnac et de Cognac.
À noter que la demande portée par Cognac d’un rendement différencié pour le millésime 2025 n’a pas été discutée durant ces échange. La menace des taxes chinoises tombant une filière des eaux-de-vie charentaises déjà fragilisée par des commercialisations en chute à l’export à cause des surstocks et de l’inflation (en Chine déjà, mais aussi aux États-Unis où d’autre menaces géopolitiques existent).