’Avis n° 35 rend les conclusions préliminaires de l’organisme d’enquête qui a examiné s’il y avait du dumping et si oui, quelle pouvait en être l’ampleur et si les produits visés par l’enquête avaient causé un préjudice à la filière des brandies chinois. L’organisme « a déterminé à titre préliminaire qu’il y avait du dumping de la part des brandies originaires de l’UE, que le secteur national du brandy était menacé de dommages substantiels et qu’il existait un lien de causalité entre le dumping et la menace de dommages substantiels ».
Dix jours pour soumettre des commentairesRésultat : des droits préliminaires sont annoncés dans une fourchette allant de 30,6% à 39% sur la base des marges de dumping définies par le Ministère du commerce de la République populaire de Chine (MOFCOM). La moyenne de ces droits se situe à 34,8%, pourcentage qui passe à 39% pour les entreprises se trouvant dans l’incapacité de répondre à toutes les demandes de procédure et aux questionnaires détaillés fournis par les autorités chinoises. Précision importante : il s’agit d’une décision préliminaire qui ne présage en rien la décision finale dont la date n’a pas encore été précisée par la Chine mais qui pourrait intervenir en janvier ou en juillet 2025, selon les règles de la procédure chinoise, mais aussi à tout moment. Pour l’heure, ces droits n’entreront donc pas en application. Le MOFCOM précise que « toutes les parties intéressées peuvent soumettre des commentaires écrits à l’agence chargée de l’enquête dans un délai de dix jours à compter de la date de cette annonce », soit le 29 août 2024.


« Nous sommes très déçus par cette annonce », a reconnu l’organe qui représente les spiritueux au niveau européen spiritsEUROPE. « Les droits, s’ils étaient appliqués, constitueraient une barrière commerciale non justifiée et auraient un impact préjudiciable sur les exportations de spiritueux à base de vin et de marc depuis l’Union Européenne vers la Chine, qui représentent la majeure partie (90%) des exportations directes de spiritueux de l’UE vers la Chine en valeur. Cette décision est d’autant plus incompréhensible que notre filière a pleinement coopéré avec les autorités chinoises tout au long de la période de l’enquête initiée en janvier 2024 et a fait preuve d’une totale transparence dans ses pratiques. Le seul côté positif à ce stade, c’est que les droits provisoires ne seront pas appliqués pour le moment », a affirmé Ulrich Adam, directeur de spiritsEUROPE. Qualifiant le secteur des spiritueux de « victime collatérale d’un conflit commercial plus large », faisant allusion aux droits compensateurs provisoires imposés le 5 juillet dernier par l’UE sur les véhicules électriques chinois, celui-ci a exhorté la Commission Européenne à témoigner de son « soutien total à travers des négociations immédiates pour garantir que ces droits provisoires ne s’appliquent jamais ».
Un dossier politique qui doit trouver une issue politiqueCet appel fait écho à celui des filières françaises du cognac et de l’armagnac. Dans un communiqué conjoint avec la Fédération des Exportateurs de Vins et Spiritueux (FEVS), les professionnels affirment que « les deux prochains mois seront critiques dans la recherche d’une solution concertée permettant la reconsidération de cette décision ». En effet, la Commission Européenne doit confirmer les droits définitifs appliqués aux constructeurs chinois d’ici le 30 octobre. Pour les filières concernées, la décision préliminaire chinoise constitue « un coup de massue », sachant que la Chine représente 25% des exportations de cognac et le deuxième marché en valeur pour l’armagnac. « Nos pratiques sont tout à fait conformes avec le droit international et nous l’avons démontré tout au long de la procédure » a martelé Florent Morillon, le président du BNIC, tandis que le directeur du BNIA, Olivier Goujon déplorait que « tous, importateurs chinois, maisons d’armagnacs et amateurs chinois sont les sacrifiés ». Enfin, pour sa part, la division Cognac de Rémy Cointreau, dont le MOFCOM a évalué à 38,1% la marge de dumping réalisée sur les importations en Chine, annonce continuer à « évaluer l’ensemble des leviers et opportunités de croissance qui lui permettront d’atténuer les éventuels effets négatifs relatifs à la décision finale du MOFCOM ».