elon que l’on voit le verre à moitié plein ou à moitié vide, on retiendra soit que la Corée du Sud a récemment connu l’un des plus forts développement de consommation de vin dans le monde (avec des importations passant de 43 à 77 millions de litres et de 259 à 550 millions de dollars entre 2019 et 2021), soit que ce marché vient de s’effondrer en 2022 et 2023 (tombant l’an passé à 56 millions L pour 510 millions $). La réalité est évidemment plus nuancée, comme le présente Jeannie Cho Lee, première master of wine d’Asie, lors d’une conférence sur le marché sud-coréen ce 29 mai à Vinexpo Asia (Hong Kong).
Pour les optimistes, l’experte relativise l’idée, pour ne pas dire le rêve, que la Corée du Sud serait un marché où le vin se démocratise à plein tube : le vin n’y pèse en réalité que pour 7 % de la consommation de boissons alcoolisées, toujours bien loin du leader, le soju, spiritueux à base de riz qui « est tellement bon marché qu’on peut en acheter au prix d’une bouteille d’eau premium en supermarché » rapporte Jeannie Cho Lee. Mais la master of wine explique aussi aux pessimistes que si l’on voit actuellement « une situation de surstock importante en Corée du Sud, à mesure que les importateurs vont apurer ce stock, on verra un marché plus stable. Il y a toujours beaucoup de marge de croissance : particulièrement dans le segment premium et auprès des femmes pour les vins blancs et effervescents. Les importateurs, les distributeurs, les cavistes et la restauration sont d’un prudent optimisme. »


Il faut dire que le marché des vins fins y reste en croissance. Et que « les grands gagnants sont les vins français, leaders en volume et valeur, tandis que les vins chiliens se développent sur les premiers prix » pointe la master of wine. Deux positionnements extrêmes qui sont en développement : « à un nouveau venu voulant s’attaquer au marché, je lui conseillerai de s’attaquer au vin vrac ou aux vins de luxe, ce sont les deux seuls secteurs qui performent actuellement » indique Ted Ko, le fondateur du distributeur de vin Town Wine (basé à Hong Kong).
« Les consommateurs vont soit vers le moins cher, soit vers le plus cher » abonde Wayne Choi, le vice-président pour l’alimentation et les vins de la chaîne de grands magasins Shinsegae, dont 13 cavistes sur le haut de gamme, lui permettant d’affirmer que si « après la crise covid le marché coréen s’est refroidi, mais il reste toujours le plus attractif au monde pour les vins fins ». Pour le milieu de gamme, les choses sont plus difficiles. La priorité actuelle des opérateurs coréens est de vider le surstock du cœur de gamme, où la compétition casse les prix rapporte Ted Ko. Mais une fois cet apurement réalisé, le distributeur estime qu’il n’y aura d’aussi fortes fluctuations à la baisse sur ce marché. « On récupère d’une tendance négative » et la consommation se normalise, « les consommateurs passés aux vins y restent fidèles, ne me demandez pas pourquoi » plaisante Ted Ko.