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Castel persiste et signe son attaque à 100 000 € des manifestants devant ses grilles
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Ça passe ou ça Castel
Castel persiste et signe son attaque à 100 000 € des manifestants devant ses grilles

Mettant les points sur les i d’une crise de confiance entre négoce et vignoble, le premier négociant français reste inflexible : il maintient son attaque en justice des organisations ayant manifesté devant ses grilles fin février.
Par Alexandre Abellan Le 06 mai 2024
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Castel persiste et signe son attaque à 100 000 € des manifestants devant ses grilles
« Pensez-vous qu’il est possible de construire ensemble cette filière [forte] quand devant nos portes se trouve un groupe de viticulteurs déterminés à salir non seulement notre entreprise, mais aussi notre image, comme point de départ aux négociations ? » réagit Castel dans sa lettre aux manifestants du 28 février. - crédit photo : Castel (photo diffusée dans sa lettre ouverte)
S

ortant de sa réserve proverbiale, le groupe de négoce Castel (vendant annuellement 400 millions de bouteilles de vin pour 720 millions d’euros de chiffre d’affaires dans le monde) règle ses comptes avec les 120 vignerons et trois organisations agricoles ayant manifesté ce 28 février devant les grilles de son siège à Blanquefort (une manifestation non déclarée d’après la préfecture de Gironde) dans une lettre ouverte (voir encadré) confirmant que le négoce assigne ce 4 juin devant la chambre civile du tribunal judiciaire de Bordeaux (soit la FDSEA 33, les Jeunes Agriculteurs de Gironde et le collectif Viti 33) pour leur demander 100 528 € en vertu de préjudices subis (dégradations et pertes d’exploitation).

« Est-ce que cette minorité de viticulteurs irrespectueux et virulents que nous avons vu à l’œuvre, et qui, nous l’affirmons, ont causé des dégradations et préjudices, sont les porte-paroles de toute la viticulture aujourd’hui ? » pose la lettre ouverte mise en ligne sur le site institutionnel Castel Familial & International (regroupant Barrières Frères, Barton & Guestier, châteaux Castel, Castel Frères, Kristel, Listel, Nicolas, Patriarche…). Ni signé, ni daté, ce texte répond sans surprise que « nous ne le pensons pas, et nous rejetons fermement ces comportements extrêmes qui ne sont pas dignes de notre grande famille viticole, qui a uni jusque-là vignerons et négociants. Une limite a été franchie ce 28 février dernier par ces viticulteurs, et nous faisons le choix légitime d’assigner en justice les responsables de ces actes, qui devront réparer les préjudices commis. »

Alors que certains vignerons et négociants invitent Castel à annuler son action en justice, pour soutenir le dialogue sur la juste rémunération établi au sein de la filière (notamment la réunion interprofessionnelle du 8 avril) et ne pas remettre de l’huile sur le feu de la colère vigneronne (très active ces dernières semaines chez des négociants et distributeurs, a priori sans poursuites), le groupe Castel se montre inflexible. « Aucun dialogue, aucune entente ne sera possible tant que continueront de planer des menaces non pas de manifestations, mais de blocages, qui promettent d’autres dégradations, et tant que l’image de l’entreprise Castel et plus largement du négoce ne sera pas restaurée » martèle la lettre.

Reproche mazette

Alors que des discussions ont lieu dans les instances bordelais pour résoudre cette tension entre Castel et les syndicats agricoles (comme évoqué lors de la dernière assemblée générale de l’interprofession, le CIVB), il semble que ces initiatives soient pour le moins infructueuses. Le premier négociant français annonçant se « retirer provisoirement de toutes les institutions de la filière des vins de Bordeaux, afin de faire entendre notre voix et notre colère ! » Et d’asséner un message que ne renierait pas le Collectif Viti 33 : « chaque membre de la filière, et tout particulièrement nos institutions, porte également une part de responsabilité dans l’image des vins de Bordeaux ». Castel poursuivant : « quels messages portent donc les institutions dont le rôle est de nous épauler ? Et bien sûr quels messages portent les médias, dont l’un se fait fort de porter un "coup d’estoc" au négoce ? » Cette dernière remarque semblant monter en épingle l’innocent titre « baron de l’estoc » publié sur Vitisphere, en référence décalée à sa marque phare Baron de Lestac (aussi emblématique que Roche Mazet).

Balayant devant sa porte, le négociant estime que « plus que toute autre entreprise, nous prenons la pleine mesure de cette crise dramatique et historique, que nous traversons également » et qui pousse à « maintenir notre choix de pratiques tarifaires qui valorisent les vins de Bordeaux, envers les viticulteurs, même si, nous le reconnaissons, cela reste lié à un contexte marché très difficile. Un choix qui, aujourd’hui, n’a pas été remis en question par nos partenaires. » Face aux débats sur un prix de référence du vin en vrac, via Egalim ou une organisation de producteur, Castel se montre poliment dubitatif « devons-nous croire que la crise actuelle pèse uniquement sur les épaules des négociants ? Que le cours du vrac est le seul levier capable de restructurer la filière dans son ensemble, rétablir l’équilibre de l’offre et la demande, et bien sûr comprendre les causes profondes de la déconsommation et les attentes des consommateurs d’aujourd’hui et de demain ? »

Sursaut de lucidité 

Contactés, le CIVB, la FDSEA 33 et le Collectif Viti 33 indiquent ne pas souhaiter commenter un sujet qui s’envenime. « Nous espérons toujours un sursaut de lucidité » de Castel glisse une partie prenante, pointant que « le feuilleton judiciaire serait négatif en premier lieu pour le vilain négoce qui maltraite les petits producteurs, c'est donc incompréhensible. » Le dialogue semble en effet difficile entre Castel se trouvant mal-aimé et le vignoble se sentant maltraité.

 

La lettre ouverte dans son intégralité

Au collectif Viti 33 et à tous les viticulteurs présents devant nos portes le 28 février dernier.

Vous parlez de construire une filière forte et de nous asseoir à la table des négociations.

Pensez-vous qu’il est possible de construire ensemble cette filière quand devant nos portes se trouve un groupe de viticulteurs déterminés à salir non seulement notre entreprise, mais aussi notre image, comme point de départ aux négociations ?

Comment s’asseoir dignement à cette table quand le négociant que nous sommes, qui œuvre jour après jour à faire vivre le Vin, le valoriser et le soutenir auprès des consommateurs du monde entier et sur tous les marchés, dans cette crise sans précédent qui nous affecte tous, est montré du doigt et calomnié ?

Ces viticulteurs sont-ils venus apporter un message à tous les collaborateurs de l’entreprise Castel, hommes et femmes de tout métier, en train de prendre soin de la vigne, de procéder au ouillage dans les chais, de sélectionner et déguster des vins, de créer des étiquettes, de travailler à l’embouteillage, au stockage ?

Sont-ils venus leur dire que nous ne sommes plus dans la même famille, la même filière ? Sont-ils venus les empêcher de travailler au développement de notre bien commun ? Ou pire, les inquiéter sur leur lieu de travail ?

Est-ce que cette minorité de viticulteurs irrespectueux et virulents que nous avons vu à l’œuvre, et qui, nous l’affirmons, ont causé des dégradations et préjudices, sont les porte-paroles de toute la viticulture aujourd’hui ?

Nous ne le pensons pas, et nous rejetons fermement ces comportements extrêmes qui ne sont pas dignes de notre grande famille viticole, qui a uni jusque-là vignerons et négociants.

Une limite a été franchie ce 28 février dernier par ces viticulteurs, et nous faisons le choix légitime d’assigner en justice les responsables de ces actes, qui devront réparer les préjudices commis. Aucun dialogue, aucune entente ne sera possible tant que continueront de planer des menaces non pas de manifestations, mais de blocages, qui promettent d’autres dégradations, et tant que l’image de l’entreprise Castel et plus largement du Négoce ne sera pas restaurée.

A tous les acteurs de la filière Vin de Bordeaux

Au-delà de ces méthodes parfaitement condamnables, quels messages portent haut et fort les viticulteurs aujourd’hui ? Quels messages portent donc les institutions dont le rôle est de nous épauler ? Et bien sûr quels messages portent les médias, dont l’un se fait fort de porter un « coup d’estoc » au négoce ?

Devons-nous croire que la crise actuelle pèse uniquement sur les épaules des négociants ? Que le cours du vrac est le seul levier capable de restructurer la filière dans son ensemble, rétablir l’équilibre de l’offre et la demande, et bien sûr comprendre les causes profondes de la déconsommation et les attentes des consommateurs d’aujourd’hui et de demain ?

Si le nom de l’entreprise Castel résonne bien sûr en tant que négociant, nous sommes depuis toujours Vignerons et nous sommes aussi Commerçants, et faire Vivre le Vin est notre Raison d’Être. C’est pourquoi plus que toute autre entreprise, nous prenons la pleine mesure de cette crise dramatique et historique, que nous traversons également, qui nous atteint et oriente nos décisions.

Aussi, nous avons décidé de maintenir notre choix de pratiques tarifaires qui valorisent les vins de Bordeaux, envers les viticulteurs, même si, nous le reconnaissons, cela reste lié à un contexte marché très difficile. Un choix qui, aujourd’hui, n’a pas été remis en question par nos partenaires.

Mais nous faisons également le choix de nous retirer provisoirement de toutes les institutions de la filière des vins de Bordeaux, afin de faire entendre notre voix et notre colère !

Au-delà des viticulteurs, chaque membre de la filière, et tout particulièrement nos institutions, porte également une part de responsabilité dans l’image des Vins de Bordeaux et doit participer activement à la réhabilitation de l’image du Négoce



 

 

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Tous les commentaires (3)
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Arthur Le 11 mai 2024 à 22:01:43
C'est émouvant. Versons donc une larme pour les déboires subis par le soldat Castel. En effet c'est vraiment injuste ce qui lui arrive après avoir pourtant " décidé de maintenir notre choix de pratiques tarifaires qui valorisent les vins de Bordeaux, envers les viticulteurs..." En fait toute cette histoire repose sur un malentendu et un problème de vocabulaire : qu'est-ce qu'ils y connaissent à la valorisation ces 120 manants venus en découdre ce 28 février ? Aucune reconnaissance en plus! Ils n'ont même pas trié leurs déchets. Qu'ils payent et fichez moi les en tôle, ça leur apprendra le français !
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Fabrice Chaudier Le 06 mai 2024 à 14:39:14
Je suis toujours étonné de lire des commentaires « anonymisés » sous pseudo : comme le montre me semble-t-il l'article, la nécessité de l'heure est au dialogue ouvert, transparent et contradictoire pour trouver une stratégie commune.
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bill et boule Le 06 mai 2024 à 05:41:06
La difficulté vient du fait que , au moment où les grands crus classes bordelais sortent leur millésime 2023 en primeur dans des conditions conjoncturelles difficiles , le groupe Castel et ses filiales semble ,de source sure , "balancer" depuis peu des offres massives, à prix très bas, sur le segment livrable bouteilles et milieu de gamme , notamment crus bourgeois du medoc , toutes aoc confondues . Suivi en cela il est vrai par GCF qui enclenche le même processus sur le même segment , créant un trou d air massif et bloquant toute transaction qualitative sur ce créneau. 4 semaines très exactement après la réunion au sommet du 8 avril au civb , comment ne pas deplorer ce double langage ? On décide en haut lieu de jouer le partenariat entre production et negoce .. et peu après non seulement les assignations castel et cordier sont maintenues mais castel et gcf destockent massivement (ou du moins cherchent à le faire car rien ne prouve que l acheteur domestique ou étranger mordra à cet hameçon printanier) . Sommes à 4 semaines de Vinexpo Hong Kong et il serait opportun que le planète vins bordeaux se deplace la bas autrement qu en ordre dispersé.. A defaut , nos confrères italiens espagnols américains et le club des 5 de l hémisphère sud ne feront de nous qu une bouchée . Une nouvelle réunion sous forme de rapport d étape semble s imposer rapidement pour enrayer un processus délétère. Sans attendre les débats sur la loi agriculture, sans attendre les élections européennes de juin , ni à fortiori celles des chambres d'agriculure de début 2025. Certes "le civb ne peut pas prendre la responsabilité de tous les maux " comme il nous a ete dit tout au long de 2023 , mais peut être peut il garder celle de quelques remèdes 2024 , comme il s y est d ailleurs engagé formellement vis à vis de Matignon il y a peu. Solidarite entre grands crus et petits châteaux, entre grands châteaux et petits négoces et enfin entre grand négoce et petits châteaux : les recettes sont connues mais tardent à être appliquées et cela devient suicidaire.
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