Jérôme Bauer : La CNAOC a été la première à dire que cette distillation serait une rustine insuffisante et à se positionner pour l’arrachage définitif. Force est de constater que l’on va distiller 200 millions € de vin, mais qu’avec la déconsommation actuelle de vin, accentuée par l’inflation, on va rester dans une situation moribonde. La question à se poser est celle d’un excès de potentiel de production de vin en France. Il faut avoir le courage de se poser la question.
À la CNAOC on pense qu’il y a trop de potentiel de production de vin français. Je ne me vois pas retoquer à la porte du ministre pour redemander une distillation en 2024 ! Tous les représentants de la filière l’ont dit et répété. Il faut maintenant prendre son courage à deux mains et dire qu’il faut arracher de la vigne en France
Si la demande d’arrachage définitif est portée depuis 2022 par l’interprofession de Bordeaux face à la déconsommation de vins rouges AOC, les vignobles du Midi et de la Vallée du Rhône ne lui ont pas emboîté le pas…
Plus on parle de l’arrachage, plus il y a d’autres vignobles qui semblent intéressés. Ce qui n’est pas une bonne nouvelle ! Aujourd’hui, il n’y a pas de consensus sur la stratégie de la filière. Il faut se caler sur les principes de régulation. C’est-à-dire sur le contrôle des plantations et de l’arrachage. À partir de là, il faudra trouver des leviers d’action pour financer l’arrachage. Aujourd’hui, des fonds européens sont dédiés à la restructuration. Arracher des vignes pour maintenir la pérennité du reste du vignoble en France correspond à de la restructuration pour moi. Ce n’est pas possible actuellement, mais il va falloir ouvrir de nouvelles portes réglementaires. Les vignobles espagnols et italiens pourraient être intéressés.
Un plan de filière est en discussion au sein du conseil spécialisé vin de FranceAgriMer. Il n’est pas suffisamment avancé pour en tirer conclusion. L’enjeu est de savoir si l’on continue à laisser faire ou si l’on trouve des solutions.
Face aux replis commerciaux actuels, la vendange 2023 voient des stratégies de réduction des rendements, de mise en réserve ou d’espoir de rétablissement dans les syndicats viticoles.
Il faut plusieurs leviers pour s’adapter aux situations différentes. La baisse des rendements et la constitution de réserve sont des solutions. Mais réduire le rendement augmente le coût de production, ça ne peut être que temporaire. Réduire de 10 % le rendement, c’est augmenter le coût de production.
Pour réguler l’offre, la fédération des vins IGP militent pour un dispositif d’étanchéité entre AOP et IGP.La CNAOC a été la première à porter le sujet de l’étanchéité des segments, il y a des années. Aujourd’hui, nous sommes tous mûrs pour remettre un tel dispositif en place. Nous sommes tous d’accord : AOC, IGP, vignoble, négoce… Il faut gagner en stabilité, les IGP ne peuvent pas être le déversoir des AOC quand ça ne va pas, et vice-versa. On travaille depuis un an à une proposition, que l’on va désormais travailler avec la fédération des vins IGP.